Décevant lors du défilé néerlandais, qui a vu Marcel Kittel faire le plein de victoires, André Greipel avait presque été oublié au moment de citer les favoris du jour sur la cinquième étape du Giro. Mais c’était bien trop vite oublier les qualités monstrueuses de l’Allemand, qui empoche un nouveau succès en terre italienne et se positionne pour les prochaines journées. Sa forme devrait bel et bien aller crescendo, du Giro au Tour de France, pour atteindre Doha.

Efficacité et puissance

À trente-trois ans, André Greipel n’est plus un débutant dans l’exercice du sprint. Lauréat à quatre reprises sur le dernier Tour de France, il a franchi un cap en 2015, s’imposant temporairement comme le meilleur sprinteur du peloton, en l’absence de Marcel Kittel. Son compatriote, après de longs mois d’errance, a depuis retrouvé ses meilleures jambes, promettant sur le papier un duel de titans sur les emballages massifs du Tour d’Italie. Mais à vrai dire, celui qui vient de décrocher sa dix-huitième victoire en grand tour n’est pas encore au top de sa forme. Blessé au Tour d’Algarve, il a ensuite eu du mal à revenir. Diminué sur Paris-Nice, il a dû abandonner, comme sur Gand-Wevelgem où il n’a pu jouer sa carte. Troisième du Grand Prix de l’Escaut, c’est principalement en Turquie, une course où il a ses habitudes, qu’il s’est refait une santé. Récompensé d’une tactique collective plus qu’audacieuse sur la troisième étape, où les hommes de Lotto-Soudal ont réalisé un contre-la-montre par équipes hors du commun, Greipel s’est rassuré, et ne s’est pas trop épuisé en vue du Giro.

“Les précédents mois n’ont pas été des plus faciles. Il s’agit peut-être même du printemps le plus difficile de ma carrière, avec beaucoup de blessures et de chutes. Je n’ai pas non plus atteint ma meilleure forme. […] Mais je pense que la condition est bonne et que je vais pouvoir tenter de gagner une étape.”, assurait-il lors de la présentation des équipes de la course rose. Objectif atteint au bout de la cinquième journée de course, à Bénévent, sur une étape parfaitement taillée pour la fusée d’Outre-Rhin. Bien protégé par ses coéquipiers qui ont fait le travail nécessaire dans les dix derniers kilomètres, Greipel a profité des limites de ses adversaires sur ce faux-plat pavé, distançant irrémédiablement Arnaud Démare et Sonny Colbrelli avec le coup de pédale des grands jours. En effet, c’est en solitaire que Greipel a pu lever les bras, prouvant qu’il était bel et bien un sérieux concurrent pour les finals d’étapes de ce Giro. Beaucoup plus complet que par le passé, il a trouvé un terrain à sa convenance sur les routes italiennes, qui n’offrent pratiquement jamais de tapis roulant comme en est la coutume aux Pays-Bas.

Un programme de courses plus réfléchi

Il s’agit donc d’un excellent signal en vue des prochaines étapes de transition, mais aussi du Tour de France, où il aura à cœur de répéter ses exploits de juillet dernier. Greipel surfe sur une dynamique à contre-courant des trajectoires générales des sprinteurs, perdant leur jump la trentaine passée pour se tourner vers les classiques. En arrivant à maturité sur le tard, après avoir longtemps stagné, le Poméranien s’est aussi assagi dans un calendrier beaucoup moins chargé, lui permettant d’être plus constant sur les grands rendez-vous. Fini les shows du début d’année, au Tour Down Under ou au Moyen-Orient. La saison d’André Greipel démarre désormais du Challenge de Majorque, avant de sillonner les routes portugaises et celles de la Course au Soleil. Fin prêt pour la campagne des classiques où il n’est pas rare de le voir assister ses leaders du printemps sur les pavés des Flandres, il retourne ensuite en Turquie, et atterrit en Italie.

Avant 2016, il n’avait disputé qu’à deux reprises la course rose, en 2008 et 2010, deux éditions où il avait chaque fois décroché un bouquet. Ensuite, évitant le Critérium du Dauphiné ou le Tour de Suisse, peu à l’avantage des hommes rapides ces derniers temps, Greipel vient augmenter sa moisson d’étapes au Luxembourg ou au ZLM Toer, avant de disputer le Tour, et de prolonger sa condition maximale sur l’Eneco Tour ou la Vatenfall. Cette année, il faudra être encore plus endurant, puisque les championnats du Monde, annoncés comme tout plats, seront son objectif principal. Nul doute qu’en interne, le leadership sera disputé avec Degenkolb et Kittel, même si le dernier cité est toujours à la peine sur les longues distances. “La course peut-être terminée dès les cinq premiers kilomètres et un groupe de 20 coureurs à l’avant sera dur à aller chercher. Chaque coureur qui connaît le Qatar sait qu’il fera plus chaud que d’habitude, et qu’en plus il y aura du vent. Il faudra une équipe forte”, disait-il en mars. En plus d’un maillot arc-en-ciel, il y a également le premier maillot jaune de la Grande Boucle dans un coin de sa tête, après deux échecs en 2013 et 2014. Des rêves en passe d’être réalisés.

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