Si la Vuelta n’a jamais eu pour habitude d’attirer les meilleurs sprinteurs du peloton, on atteint cette année des sommets. Les candidats à la victoire sur les arrivées massives sont des hommes peu habitués à endosser un tel costume, qui profitent du vide pour cueillir des bouquets qu’on ne leur prédisait pas.

Les Mondiaux comme responsables

Ironie du sort, il y avait cette semaine plus de concurrence dans les sprints au Tour du Poitou-Charentes que sur la Vuelta. Meersman et Vangenecthen se sont ainsi partagés les victoires sur les arrivées groupées. Pour les deux hommes, c’était une première sur un grand tour. Même si Meersman n’est pas un débutant sur l’épreuve ibérique, il n’avait jamais eu l’opportunité de lever les bras. Le signe bien réel qu’il manque un patron du sprint. D’habitude, même si tous les spécialistes ne font pas le déplacement sur l’ultime grand tour de l’année, ou que certains quittent l’épreuve avant son terme, on peut malgré tout compter quelques grands noms, qui profitent d’ailleurs du peu de concurrence pour s’offrir une pléiade de succès « faciles ». L’an dernier, il y avait ainsi Degenkolb et Sagan, déjà là en 2014 avec Bouhanni et Matthews. Et en remontant davantage, on retrouve des traces de Kittel, Farrar ou Boonen. Des coureurs qui manquent cette année pour rendre plus intéressants des sprints presque trop ouverts.

A l’origine de ce désaveu des sprinteurs pour la Vuelta, il y a les Championnats du monde de Doha, promis aux sprinteurs mais prévus le 16 octobre, presque trois semaines plus tard qu’à l’accoutumée, en raison de la chaleur qui règne au Qatar. Du coup, la préparation que venaient chercher certains sur le Tour d’Espagne les années précédentes n’a plus lieu d’être. Pour être en forme au Mondial mi-octobre, il ne faut pas l’être fin août et début septembre sur les routes espagnoles. Pour Kittel, Greipel, Cavendish et tous les autres, il était donc complètement absurde de se rendre au départ d’Ourense. La préparation est décalée, et ils reviendront à la compétition un peu plus tard, après avoir pour la plupart bataillé sur le Tour de France. Les éditions du Mondial destinées aux sprinteurs sont rares, on ne peut donc pas leur en vouloir de mettre toutes les chances de leur côté pour l’emporter à Doha. Mais le problème a peut-être été dans l’attribution de ces Championnats : le Qatar, pas vraiment un pays de vélo, a obligé à chambouler le calendrier, et c’est la Vuelta qui en paie les conséquences.

Une habitude à ne pas prendre

Est-ce que le jeu en valait la chandelle pour le cyclisme ? La réponse ne sera connue que dans un mois et demi, lorsqu’on pourra juger de la réussite de ces Mondiaux dans le Golfe. Mais aussi intéressantes soient les épreuves à Doha, elles ne méritent sans doute pas que l’on sacrifie les sprints de la Vuelta. Le troisième grand tour de l’année éprouve suffisamment de difficultés, chaque année, pour attirer les spécialistes de l’emballage final : il n’a pas besoin qu’on lui ajoute des obstacles. Aussi respectables soient Meersman et Vangenecthen, ils n’auraient sûrement pas gagné d’étapes sur une édition plus relevée en terme de plateau. Alors bien leur a pris de profiter du vide cette année, mais pour le spectacle et l’intérêt de la Vuelta, mieux vaut que l’on retrouve rapidement quelques grands sprinteurs sur l’épreuve. Car même si la montagne pointe le bout de son nez et nous fera oublier pour quelques temps ces considérations, le constat nous reviendra au visage dès la prochaine étape de transition.

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