Digne héritière d’une fusion entre Radioshack et Leopard ayant tourné au vinaigre, avec au cœur de l’action le mauvais feuilleton des Schleck, la formation Trek Factory Racing a cependant tenté de faire peau neuve en 2014, avec un vivier de jeunes plus accru qu’à l’accoutumée, bien encadrés par des ténors toujours aussi précieux. De quoi donner un bilan globalement satisfaisant, mais teinté de petits bémols par-ci par-là…

Trois raisons d’être satisfaits

Un Cancellara indispensable. Âgé de 33 ans, le Bernois n’est peut-être plus sur une dynamique censée l’emmener dans ses meilleures années, surtout depuis sa stagnation au haut niveau contre-la-montre, ayant influencé son choix de tout miser sur les classiques. Malgré encore de nombreuses places d’honneur, et des regrets qui durent, comme ceux de ne pas accrocher une nouvelle Primavera, ou de grimper sur la plus haute marche de la course en ligne des Mondiaux, “Spartacus” garde son rang dans la tradition des plus grands. Un troisième Tour des Flandres après avoir été harcelé par la meute Belge, qui lui permet de devenir l’un des six co-détenteurs de l’épreuve au même titre que Boonen ou Museeuw, et un Paris-Roubaix ou il fut vaincu par sa pancarte. Même si il n’a pas été aussi brillant qu’en 2013 ou en 2010, c’est un gage de réussite sur le plan comptable, mais également l’un des hommes les plus appréciés du peloton, tirant vers le haut sa garde rapprochée et stimulant la spirale collective.

Arredondo, quelle niaque ! Il n’est jamais simple de faire le grand saut entre l’échelon de la Continental Pro et la division reine du World Tour. Sauf que dans le cas présent, Julian Arredondo venait tout droit d’une formation de troisième division, Nippo ! D’où l’agréable surprise de le voir briller en haut de l’affiche pendant toute la première partie de la saison, de San Luis à Trieste. Vainqueur avec cette fameuse classe colombienne sur deux des trois arrivées au sommet, il a ensuite tenu le choc sur sa première course par étapes de renom, à savoir Tirreno-Adriatico. Une cinquième place au général, et déjà les signes d’une abnégation sans faille qui sera sa marque de fabrique, d’autant plus durant son premier Monument, et pas n’importe lequel, la Doyenne, où il fut tout près de griller des favoris très attentistes en accompagnant Domenico Pozzovivo dans la Roche-Aux-Faucons. Pour couronner le tout, il y a eu la der’ des premières, avec ce premier Grand Tour bouclé avec les honneurs du maillot de meilleur grimpeur, empoché grâce à un tempérament offensif désormais incontournable, lui ayant permis de glaner une étape au Refuge Panarotta. Un test grandeur nature réussi haut la main !

Un Fränk Schleck timidement de retour. Pendant que son frère Andy vécut une année en guise de calvaire avant la retraîte prématurée, Fränk, lui, a retrouvé des couleurs, pour le plus grand bien des sponsors, des fans, et du staff, qui ne pouvait pas d’un jour à l’autre l’écarter des plans de l’équipe. Un Paris-Nice encourageant annonçant un Critérium International au niveau des meilleurs, puis un chemin de la gagne retrouvé lors de ses championnats nationaux qui lui échappaient depuis 2011, en préambule d’une douzième place finale sur les Champs-Elysées. Ce n’est pas l’aîné d’une fratrie trustant les podiums de la Grande Boucle qui a refait surface, mais un coureur reprenant du plaisir sur le vélo, et qui, à 34 ans, n’est pas encore fini, n’en déplaise à ses détracteurs.

Trois raisons d’être déçus

On attend toujours le franchissement de ce fameux palier… Kiserlovski, Nizzolo, Zoidl, Vandewalle… Tant de coureurs prometteurs depuis plusieurs années, mais possédant comme caractéristique identique une stagnation relative. Le Croate, diriez-vous, a certes réalisé des tops 10 sur des courses d’une semaine ainsi qu’au Tour d’Italie, mais ce n’est ni plus ni moins que son maximum entrevu pendant son passage chez Liquigas. Toujours incorrigible en chrono, on attend davantage de lui, au même titre que Riccardo Zoidl, pour qui l’autre grand saut hiérarchique s’est fait dans la douleur, ou Kristof Vandewalle, restant un rouleur de second rang. Concernant l’Italien, il est devenu spécialiste des placettes sur tout type de sprints. Incapable de saisir la moindre occasion sur son Giro après l’abandon de Kittel, il s’est fait outrageusement dominer par Bouhanni. Sur les classiques, ce n’est pas franchement mieux, imitant ses précédentes références sur la Vatenfall, ou Plouay. Deux victoires seulement, pour 24 tops 10, la balance est trop déséquilibrée.

Redescendue dans le rang sur trois semaines. Du temps de la Radioshack, ou même encore l’an dernier, on avait l’impression d’avoir en face de nous une équipe qui pèse chaque jour sur les Grands Tours, prête à y imposer sa tactique, placer quotidiennement ses pions et viser quelque chose de précis. La preuve en était du classement par équipes, remporté en 2010 et 2012 sur le Tour de France. Certes, la chute du rendement des frères Schleck y est cependant pour quelque chose, mais Trek peine à se trouver un “killer” durable. Arredondo a animé le Giro dans sa quête d’un maillot distinctif sans jouer le général, Zubeldia est impressionnant de régularité, mais a quand même 37 balais, Horner et Fuglsang sont partis, et Kiserlovski doit progresser. Cela donne une équipe parfois brouillonne. La venue de Mollema pour 2015 sera donc surveillée de près.

« Seulement » 19 victoires. Trek en 2014, c’est 19 bouquets de janvier à août, contre 24 l’an dernier. Un léger souci de concrétisation, et surtout une treizième place à l’UCI assez modeste compte tenu des exigeances de la structure de Luca Guercilena. Ne dépassant pas la barre des vingt succès, elle se place très en retrait vis-à-vis des autres grosses écuries, et même doublée par…Rusvelo ! Une année de transition, en somme toute, symbolisée par l’arrêt de l’éternel Jens Voigt, offrant comme dernier cadeau un record de l’heure. Trek tourne une page, et espère en ouvrir d’autres !

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