Son explosion de joie était à la hauteur de la surprise. Sur la ligne d’arrivée d’Orio, ce jeudi, personne ne l’attendait. Mais Samuel Sanchez, 38 ans, est venu s’imposer chez lui, dans ce Pays Basque qui l’a adopté il y a de ça plus de 15 ans. Preuve que les histoires d’amour peuvent aussi se terminer de la plus belle des façons.

Euskaltel encore dans les têtes

« A mon âge, c’est de plus en plus compliqué de faire la différence », lâchait Sanchez après l’arrivée. On n’aurait pas dit mieux. Depuis deux saisons et demi, il prouve à tous qu’il est encore compétitif chez BMC, mais ses supporters gardent en tête tout ce qu’il y a eu avant. Aussi enclin soit-il à découvrir autre chose, Sanchez reste un coureur à qui l’on a retiré tous ses repères. Celui que les Basques aiment appeler « Samu » répond présent, mais n’est plus le même. Parce que sa vie, finalement, c’était l’équipe Euskaltel, disparue fin 2013. C’est d’ailleurs sous le maillot orange qu’il avait connu son dernier succès, sur une étape du Dauphiné, il y a presque trois ans. Alors à Orio, après avoir renoué avec le goût de la victoire, il a eu un mot ému pour son ancienne formation. Cette équipe 100 % basque qui avait finalement accueilli un Asturien de naissance, jusqu’à en faire son leader emblématique : Sanchez lui doit tant, et il le sait. Gagner devant ses supporters relève alors d’une symbolique forte.

Pourtant, chez BMC, l’Espagnol a trouvé une nouvelle famille. A l’heure où il était sans équipe et s’entraînait sans savoir de quoi serait fait son avenir, le champion olympique de Pékin a trouvé en Jim Ochowicz quelqu’un qui lui faisait confiance malgré les années. « Avec lui, je peux parler très directement », assurait-il à Cyclingnews il y a quelques mois. Sa première année réussie, Sanchez est prolongé. Puis dès le début de sa deuxième saison au sein de l’équipe américaine, son manager général décide de la jouer gentleman. Il assure à Sanchez que quoi qu’il advienne, il pourra continuer une année s’il le souhaite. « Il m’a dit que j’avais ma place chez BMC. A partir de ce moment-là, je n’ai pu me concentrer que sur le vélo », soulignait le principal intéressé plein de reconnaissance. Alors sur le Tour, quand Tejay van Garderen abandonne, « SSG » se transcende et termine en trombe. Résultat, douzième à Paris en dépit du temps presque volontairement concédé en première semaine. « Je me sentais très fort, se souvient-il, et j’ai montré que même à 37 ans, je pouvais être à l’avant avec les meilleurs. »

S’arrêter, mais pourquoi ?

Cette fin de Tour sonne comme une surprise, y compris pour lui-même. « Je me suis dit ‘’Pourquoi ne pas continuer une année de plus ?’’ J’avais encore la motivation, et il n’y avait aucune raison pour que je laisse tomber le vélo. » Voilà donc « Samu » reparti pour un tour, qui pourrait encore ne pas être le dernier. Le garçon d’Oviedo refuse en effet de se fixer une date limite : il arrêtera quand il aura décidé, ou que plus aucune équipe ne voudra de lui. Mais à la vue de sa semaine basque, on a envie de le voir encore très longtemps sur les routes. Car sur ses terres adoptives, il est omniprésent. Mardi, déjà, il avait terminé quatrième au sommet du Garrastatxu. Alors deux jours plus tard, quand il est sorti dans la dernière bosse du parcours, tout le monde aurait dû sentir que ce n’était pas un coup pour rien. Parce que Sanchez n’attaque de toute façon jamais pour faire beau. Lui veut gagner. A raison d’une victoire en trois ans, pas sûr qu’on y ait droit de nouveau avant qu’il finisse par raccrocher. Mais qu’importe, le symbole d’un ultime succès décroché au Pays Basque restera dans les mémoires. Et personne ne pouvait pas rêver meilleure fin.

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