Décrié pour son attentisme au mois de juillet sur le Tour de France, Nairo Quintana montre un autre visage sur la Vuelta. Pour la première fois de l’été, il avait attaqué à La Camperona samedi dernier, et il a remis ça hier aux Lacs de Covadonga. En faisant à chaque fois la différence.

Enfin à son niveau

En danseuse, Quintana jette un petit coup d’oeil derrière lui. Il reste 3,5 kilomètres. Le seul cador qui l’avait suivi jusque-là, Alberto Contador, grimace et repose ses fesses sur sa selle. Il a compris, Quintana aussi. Sur cette Vuelta, le Colombien est pour le moment intouchable en montagne. Même sa chute – sans trop de gravité – en début d’étape, qui aurait pu le paralyser, ne l’a pas empêché de faire la différence dans le final. Face à un Contador amoindri physiquement, un Chaves énigmatique et un Froome qui a longtemps semblé se battre contre lui-même plus que contre les autres, le leader de l’équipe Movistar n’a personne pour venir le titiller. Alors il en profite, désireux de rendre notamment au Britannique un peu de la souffrance qu’il lui a infligé sur le Tour. « Nous devons continuer à l’éloigner davantage au classement général, car si nous arrivons au chrono (19e étape) avec cet écart, il restera le favori », a expliqué Quintana à l’arrivée. On l’avait rarement vu afficher autant de sérénité mais aussi de motivation dans un duel avec Froome.

Pour le moment pointé à moins d’une minute, le triple vainqueur du Tour est loin d’être hors-course pour le maillot rouge. Alors Quintana veut le repousser à « au moins trois minutes ». Une ambition qui laisse présager d’autres offensives du grimpeur colombien, si différent de celui qui se dandinait avec difficulté sur les routes hexagonales il y a un peu plus d’un mois seulement. Le signe, sans aucun doute, qu’il avait raté quelque chose dans sa préparation. En faisant le pari de s’entraîner chez lui, en Colombie, sans venir se tester sur des épreuves d’une semaine, il avait pris le risque d’être en retard dans sa recherche de pic de forme, et de ne pas s’en rendre compte avant de débarquer sur le Tour. C’est ce qui s’est passé, et juillet a été pour Quintana une longue bataille pour sauver les meubles, à savoir un podium à Paris. Déjà, à ce moment-là, il n’y avait donc que la Vuelta dans son esprit. Froome, Valverde, Chaves et quelques autres sont partis à Rio pour les Jeux. Pas lui. Comme Contador, il a voulu mettre toutes les chances de son côté pour s’offrir un nouveau grand tour.

Maître des cimes

Plus frais que tous ses rivaux sauf Contador, le Colombien aurait donc pu se heurter à la concurrence du Pistolero. Mais les chutes n’ont pas épargné l’Espagnol et voilà Quintana seul au monde. Il a même décroché sa première victoire d’étape sur la Vuelta, deux ans après avoir chuté, maillot rouge sur le dos, et abandonné le lendemain, sur une épreuve qui lui avait laissé un goût amer. Une petite revanche pour le protégé d’Eusebio Unzué, en position pour s’offrir le deuxième grand tour de sa carrière face au duo Froome-Contador qu’on lui oppose souvent. Et en faisant preuve d’un panache qu’on ne lui connaissait pas, il s’assure un flot de louanges bienvenus après toutes les critiques du début d’été. Le grand écart, même si les mauvaises langues ne manqueront pas de signaler que la Vuelta n’est pas le Tour, loin de là. Qu’importe, saluons au moins le changement. Nairo Quintana est passé, en un peu plus d’un mois, de grimpeur fantomatique à véritable maître des cimes.

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