Cette semaine, l’UCI a décidé d’accorder sa licence World Tour à l’équipe Astana. Après quelques jours d’hésitation, l’instance internationale a imposé à la formation kazakhe quelques contraintes, parmi lesquelles un futur audit et le respect dès 2014 du cahier des charges qui ne sera obligatoire qu’en 2017 pour le reste du peloton. Pas de quoi légitimer la présence des hommes d’Alexandre Vinokourov dans l’élite.

Trop de doutes

Avec cinq cas de dopage en moins de quatre mois, la structure Astana – à la fois l’équipe professionnelle et la réserve, en Continental Pro – ont perdu la crédibilité qui leur restait. Les frères Iglisnkiy, Ilya Davidenok, Viktor Okishev et Artur Fedosseyev ont tous été contrôlé positifs entre août et novembre. La formation kazakhe, conformément au règlement de MPCC, auquel elle adhère, s’est donc auto-suspendue pour le Tour de Pékin. En n’oubliant pas cependant de marteler que seuls deux cas concernaient l’équipe professionnelle, n’ayant  aucun lien avec la réserve, sorte de centre de formation duquel Davidenok était justement sorti l’été dernier afin de signer un contrat de stagiaire avec le groupe pro. Pas de quoi empêcher la nouvelle détérioration de l’image d’une équipe qui cherche depuis plusieurs saisons à conquérir la confiance de l’ensemble des observateurs. Chose compliquée compte tenu du passé d’Astana. En 2007 déjà, à la création de l’équipe, le manager Walter Godefroot était mis en cause par un ancien soigneur de Telekom, avant les contrôles positifs de Kessler, Kashechkin et surtout Vinokourov. Sans omettre d’innombrables suspicions renforcées à l’arrivée de Johan Bruyneel, mentor de Lance Armstrong, comme manager général pour 2008.

Une première année dans le peloton qui témoignait d’une constante encore vraie aujourd’hui : Astana est très souvent liée au dopage, souvent par des suspicions, parfois par un peu plus. Le fait que Vino soit aujourd’hui à la tête de l’équipe interroge forcément, comme les irrégularités du passeport biologique de Roman Kreuziger à l’époque où il courait sous le maillot bleu. Alors bien sûr, il ne faut pas accorder ou non la licence World Tour à une équipe en fonction de son passé. Mais les cas de 2014, incontestablement, renvoyaient à une histoire déjà parsemée de soupçons, et un refus d’accorder la licence aurait été le signe que l’UCI ose mettre à l’écart même les grosses formations. Certes la sanction aurait pénalisé tout un collectif à cause, sur le papier, de quelques individualités. Mais ces nombreux cas montrent aussi qu’Astana, si dopage généralisé il n’y a pas eu, n’a en tout cas pas su gérer ses coureurs.

L’UCI a semblé hésiter…

Evidemment, Brian Cookson a dû composer, et sans doute n’a-t-il pas pris la décision qu’il aurait souhaité. Le cas Katusha il y a deux ans, la présence de Nibali chez Astana et l’impossibilité de conclure à un dopage généralisé ont sans doute été des facteurs importants dans la décision du Britannique et de son équipe. Surtout que le critère éthique entrant en ligne de compte pour l’attribution des licences World Tour demeure très vague. Fin 2012 et malgré le choix catégorique de l’UCI, Katusha était parvenue à l’outrepasser devant le TAS. Sans doute Cookson n’a-t-il pas voulu prendre le risque d’un nouvel échec du genre. Sauf que cela n’empêche pas la décrédibilisation de l’instance, signe qu’il aurait peut-être fallu oser. Cela aurait favorisé les amalgames entre les quelques cas positifs et le reste de l’équipe, et forcément écorné l’image d’un Vincenzo Nibali que l’on a toujours envie de croire extérieur à ces affaires malgré que ce ne soit pas forcément le plus logique. Mais le bien du cyclisme aurait dû primer.

Surtout que ces derniers jours est tombée une nouvelle information – à prendre avec des pincettes. La Gazzetta dello Sport affirmait avoir en sa possession des photos du sulfureux Dr Michele Ferrari (banni à vie par l’USADA) au camp d’entraînement d’Astana de l’hiver dernier, sauf que vraisemblablement, l’UCI n’avait pas connaissance de ces éléments au moment de rendre son verdict. Alors heureusement, Brian Cookson assure que le cas des Kazakhs pourrait être réexaminé – si le rapport de l’affaire Padoue venait à mettre en cause les coureurs de l’équipe notamment -, mais on a du mal à croire qu’il le fera pour de bon. Plus le début de la prochaine saison approche, moins il est probable qu’Astana perde sa place dans l’élite. Pour faire bonne figure, le président britannique de l’UCI a avancé qu’il « n’y aura pas de seconde chance » pour Astana. Mais il semblerait qu’en réalité, la seconde chance soit passée depuis bien longtemps.

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