Sa performance plutôt inattendue sur le contre-la-montre inaugural nous avait enchantée. A Utrecht, Pinot devançait les quatre fantastiques, et se posait en cinquième homme légitime. Sauf qu’en deux jours, il a concédé près de trois minutes, et se retrouve déjà bien loin du maillot jaune, Christopher Froome.

Pourtant, on y croyait…

Après son Tour de Suisse, il y avait de quoi être enthousiaste au sujet du Français. Il avait dominé en montagne, semblé à son aise en descente, et s’il avait perdu quelques poignées de secondes dans la plaine, personne ne s’en inquiétait véritablement. L’importance du placement, cela semblait acquis pour Pinot, enfin conscient que tout ne se jouait pas lorsque la pente s’élève. Mais chassez le naturel, il revient au galop. Vers Zélande, tous les observateurs mettaient en garde contre les bordures, et ça n’a pas loupé. L’expérimenté Contador a fait rouler ses troupes, la très organisée Sky n’a pas loupé le coche, et les autres se sont faits piéger. Alors vu que Pinot terminait avec Nibali, Quintana et Péraud, on ne lui est pas vraiment tombé dessus. Tous les favoris, à l’exception de deux, étaient dans le même paquet. Et si Astana, avec une équipe qui ne veille qu’au placement de son leader italien, se fait prendre, on ne peut pas en vouloir à la FDJ d’être dans la même situation.

Mais hier en revanche, vers le Mur de Huy, il y a de quoi enrager, autant pour Pinot que pour ses plus fidèles supporters. A l’arrivée, on a eu quelques explications : la très grosse chute de William Bonnet est intervenue alors qu’il tentait de remonter son leader. Le Franc-Comtois n’a pas goûté au bitume, mais a été très affecté par ce qu’il s’était passé devant lui. De quoi nous rappeler le Tour de Suisse 2013, où une chute devant ses yeux lors d’une descente pluvieuse l’avait tétanisé pour plusieurs semaines. Il n’empêche que dans la côte de Cherave, à quelques kilomètres de l’arrivée, lorsque les Tinkoff ont accéléré – comme la veille -, Pinot, qui n’avait pas les jambes, traînait en queue de peloton. Résultat, une nouvelle cassure, où cette fois, il est seul. Nibali et Quintana ne se font pas piéger deux jours, Pinot si. Au sommet du Mur de Huy, ça fait donc une minute et trente secondes de retard, qui ajoutée au temps concédé la veille, relègue le Français à près de trois minutes de Froome, nouveau maillot jaune.

Encore les pavés, et le chrono par équipes…

Quand on sait que la montagne va se faire attendre encore une semaine, et que d’ici là, les pavés dès aujourd’hui et le chrono par équipes dimanche seront de nouveaux obstacles dans lesquelles ne devraient pas briller Pinot et son équipe, il y a de quoi être un tout petit peu inquiet. Pour le moment, aucun favori n’a perdu le Tour, mais le Français, qui était l’un des principaux outsiders au départ des Pays-Bas, n’a plus vraiment le droit à l’erreur. Sauf qu’il faudra faire sans Bonnet, un coureur qui aurait pu être d’une aide précieuse entre Seraing et Cambrai autant que dimanche entre Vannes et Plumelec. Et surtout, Pinot va devoir faire, comme tous ses coéquipiers, avec la peur de chuter. Bonnet, qui souffre d’une fracture des cervicales, a jusque là été le plus malheureux de tous, et en plus, sa malchance pourrait affecter le reste de son équipe. Comme quoi tout peut s’envoler sur un détail.

L’optimisme, lui, nous pousse à croire que Pinot va passer sans encombre les prochaines difficultés, qu’il se remettra en confiance vers le Mur de Bretagne et que le 14 juillet, pour la première étape de montagne, il mettra tout le monde d’accord. Si on ne croit pas à un tel scénario, alors on aura du mal à espérer encore quelque chose des coureurs français, qui chacun leur tour ont eu droit à leur lot de galères. Et si finalement, pour Pinot comme pour les autres, ce n’est pas surprenant de les voir en difficulté la première semaine, c’est surtout frustrant compte tenu de l’espoir qui était né du Tour 2014 comme du début de saison 2015. Alors continuons à rêver, même si pour Thibaut Pinot, la meilleure chance de podium tricolore, le temps perdu sera très difficile à rattraper.

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