Dès l’annonce du parcours de la centième édition du Tour de France, Joaquim Rodriguez l’a rapidement annoncé. Cette année, il fixe le cap sur l’échéance de juillet et changera radicalement de programme. Lui qui avait tant l’habitude d’enchaîner ses classiques fétiches avec le Giro et de pratiquer une longue coupure estivale change de registre et est décidément inspiré par un Tour qui tombe à pic pour un coureur dont la force réside dans son explosivité.
Tout pour le Tour !
Exprimant rapidement ses souhaits de privilégier la Grande Boucle lors de l’intersaison, c’est donc déterminé qu’arrive le grimpeur de poche de la Katusha sur le territoire corse. Reconnu pour sa régularité, le Catalan a de nouveau été numéro un mondial l’an passé – après 2010 – au terme de sa meilleure saison. Malheureux dauphin de Ryder Hesjedal sur la course rose et mourant les armes à la main dans les rues de Madrid sur « sa » Vuelta, il y a toujours eu un grain de sable pour faire disparaître ce qu’on lui eut promis. Heureusement, sur son terrain fétiche des forts pourcentages où impérial en haut du Mur de Huy et miraculé des eaux à Lecco, il s’est offert son premier monument et une classique lui faisant de l’oeil. L’ancien gregario d’Alejandro Valverde se porte donc très bien. Mais le temps n’attend pas, et il défile presque discrètement. Désormais âgé de 34 ans, Joaquim Rodriguez ne restera pas aussi fort physiquement très longtemps. Pour remporter le Tour, son grand objectif, il doit donc faire vite.
Crevant les yeux des spectateurs par sa facilité dès que la route s’élève, on patiente depuis un petit bout de temps de le voir se mesurer à la crème du gratin mondial sur la course proposant la plus forte opposition. Car il est vrai que pour un coureur de son style, la consécration sur trois semaines se fait attendre. Alors, pour faire taire ses détracteurs, le spécialiste des pourcentages sévères possède une nouvelle chance de briller et surtout sans pression. Souvent moins pétillant sur les longs cols français plus réguliers que de l’autre côté des Alpes et des Pyrénées, on l’oublie fréquemment au moment de désigner les favoris de ce Tour de France, sachant qu’on aurait même pu s’en passer définitivement si le TAS n’avait pas fait le nécessaire afin de forcer la remontée en World Tour de son équipe Katusha… C’est donc en outsider décontracté qu’il atterrira en Corse dans les jours à venir. Avec de réelles chances ? Depuis son départ de la Caisse d’Epargne, il semble avoir comblé ses lacunes en haute montagne si bien qu’il est devenu l’un des meilleurs grimpeurs du monde. Suffisant ? On n’est pas à l’abri du funeste jour sans, comme dans l’ascension du Fuente Dé sur la dernière Vuelta, mais encore une fois, il semble plus prêt que jamais…
Une préparation minutieuse ?
Sûr de son équipe et donc en conséquence nullement inquiété par le fiasco entre l’UCI et le TAS sur le sort de sa structure, le cap vers l’île de Beauté à été fixé très rapidement afin de pouvoir s’y préparer le mieux possible. C’est donc frais et concentré que Rodriguez devrait atterrir sur le sol insulaire. Membre du “club des cinq” lors du dernier Tour d’Oman en compagnie d’Evans, Nibali, Froome et Contador, il y avait montré son punch sur les pentes de Green Mountain. Grappillant de la confiance en. Mais encore une fois, le sort s’est acharné. Victime d’une chute sur l’Amstel, il l’a joué grand seigneur sur la Flèche en permettant à Moreno d’aller chercher la victoire, avant de buter une nouvelle fois sur l’Irlandais Martin dans le final de Liège. Est ensuite venu le temps d’une logique pause pour digérer, et de la dernière ligne droite en vue de la grande messe de juillet. Prenant part au Dauphiné pour principalement s’auto-évaluer, c’est aussi la majorité de la « Spain connexion » qu’il a apporté dans ses bagages. Comme à son habitude, il a inversé les rôles avec le virevoltant lutin Moreno pour lui permettre de monter sur la boîte finale. Montant en puissance durant le week-end décisif, tous les voyants sont donc a priori au vert pour le Barcelonais, qui saura à n’en pas douter gérer son affaire. Reniant si souvent le Tour en raison d’un parcours lui étant plus que défavorable, la centième édition semble être celle à ne pas rater pour le puncheur ibère.
Épaulé par une équipe Katusha bien coordonnée pour le rendez vous de Nice, il n’y a que les 33 kilomètres du chrono du Mont-Saint-Michel qui pourraient lui nuire. En effet, l’effort chronométré autour du Lac de Serre-Ponçon s’annonce très compliqué et Rodriguez devrait y concéder des secondes voire des minutes non-négligeables. Mais dans un grand jour, Purito semble capable de limiter la casse, comme il l’avait fait à Pontevedra sur le dernier Tour d’Espagne. Vraisemblablement dans les meilleures dispositions de sa carrière, ce Tour apparaît comme une aubaine pour lui, qui ne se fera pas prier pour mettre le feu aux poudres, sûrement avant les autres. Faisant partie de la si attendue alliance espagnole avec Contador et Valverde, il fera tout pour mettre la Sky au tapis et réussir le même exploit que Nibali sur Tirreno et le Giro. Dans une course qui a clairement manqué de folie l’année dernière, on peut compter sur Joaquim Rodriguez pour pimenter le tout. Avec, pourquoi pas, une victoire pas si surprennante sur les Champs-Elysées…
Alexis Midol