Thibaut Pinot est un pur grimpeur. Le genre de coureur à être soulagé quand vient enfin le moment de monter les cols. Cela l’a mené à de belles places sur les grands tours et à de magnifiques victoires d’étapes. Assez ironiquement, le Franc-Comtois n’a pourtant jamais réussi à rapporter un maillot à pois jusqu’à Paris. Pour l’instant.

Son premier exploit

Il a certes complété son profil en progressant sur l’effort chronométré et en descente. Il est devenu un vrai leader, capable de diriger ses hommes. Mais quand il aperçoit les sommets, Thibaut Pinot garde le regard d’un homme croisant un oasis après une traversée du désert. Depuis ses débuts, quand ça grimpe, le Français est délivré, c’est en altitude qu’il respire le mieux. Le leader de la FDJ a commencé sa carrière professionnelle à 19 ans, en 2009. La précocité du garçon s’est accompagnée de résultats d’envergures dès l’année suivante. C’est en Suisse, pendant le mois d’avril 2010, que le Franc-Comtois crève l’écran pour la première fois en World Tour. Sur le tour de Romandie, Pinot se régale pendant les ascensions dans lesquelles il s’échappe devant dès que possible. À la fin de sa troisième épreuve majeure seulement, Thibaut Pinot remporte déjà un maillot distinctif. Pas celui de meilleur jeune, le Français n’a pas encore l’âge ni l’endurance nécessaire pour jouer le général, mais le rose. Celui de meilleur grimpeur.

C’est le premier exploit d’une carrière qui démarre très fort. Quelques semaines plus tard, Pinot finit troisième de la cinquième étape du Dauphiné. À 20 ans, c’est très fort. Tout le monde pense alors que le Français est le crack qui va remettre l’Hexagone sur la carte du cyclisme mondial. Le jeune homme prend son temps, et accepte que Madiot le laisse sur le carreau pour le Tour cette année-là : « Mon coeur me dit que je dois faire le Tour mais ma raison doit gagner aujourd’hui. » Le jeune loup n’a alors pas tort, beaucoup se sont brûlés les ailes, trop confiants. Cyclingnews, le site britannique de référence, rappelait d’ailleurs à l’époque avec cynisme que la France avait souvent connu des étoiles filantes. Remy Di Gregorio prenant la tête d’une longue liste de nouveaux Virenque.

Avancer masqué

Finalement, les deux seuls Français à avoir succédé au presque roi Richard, Anthony Charteau en 2010 puis Thomas Voeckler en 2012, ont remporté des pois un peu dévalorisés par l’époque. Avec le doublé de Rafal Majka, le rouge du maillot de meilleur grimpeur a depuis repris quelques couleurs. Il redevient une véritable attraction. Thibaut Pinot y avait d’ailleurs succombé l’an passé en se jetant dans la course pendant quelques jours, avant de finalement abandonner le Tour le 15 juillet, alors même qu’il dominait le classement. Alors cette année, débarrassé du poids d’un objectif au général par un Giro plutôt réussi, Pinot a les mains et l’esprit libre pour penser à devenir ce que le destin lui a toujours indiqué : le meilleur grimpeur de la Grande Boucle.

Ce maillot qu’il a porté quatre journées sur les épaules, c’est Richard Virenque qui lui a donné envie de le revêtir. La Virenquemania connaissait son apogée pendant les jeunes années du Franc-Comtois et Thibaut Pinot n’y a pas échappé. L’homme qui a gardé sept fois la tunique à pois jusqu’à Paris le faisait rêver plus jeune. Son premier vélo? « C’était un Peugeot jaune et bleu. Le même que Richard Virenque, j’étais un vrai fan de lui », révélait Thibaut Pinot en 2013 à Eurosport. En 2014 déjà, il était devenu le premier tricolore à monter sur la troisième marche du podium à Paris depuis Virenque. Il a cette année une occasion en or d’imiter un peu plus son idole de jeunesse.

Pourtant, Pinot cache son jeu. En conférence de presse hier, le maillot blanc 2014 a indiqué ne pas en faire sa priorité : « Je pars vraiment pour une belle victoire d’étape. » Le Français n’a t-il pas tatoué « seule la victoire est belle » sur son bras droit ? Pinot est arrivé à Düsseldorf « sans pression » et ne compte pas s’en mettre avec un objectif sur trois semaines. « Le classement de la montagne, c’est difficile car j’ai vu sur le road book qu’il n’y avait pas beaucoup de départs donnés au pied d’une bosse. Cela peut être compliqué de prendre l’échappée. » Oui, les pois sont compliqués à chasser, mais ils sont si beaux à porter.

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