La performance de Chris Froome dans l’ascension d'Ax 3 Domaines fait jaser : un grand classique - Photo ASO
La performance de Chris Froome dans l’ascension d’Ax 3 Domaines fait jaser : un grand classique – Photo ASO

Magnifique vainqueur à Ax-3 Domaines – du moins pour certains -, Christopher Froome se retrouve, comme tant d’autres avant lui, sous le feu des critiques. Sa domination agace le public, qui l’accuse de tuer le Tour. L’essorage de la Sky dès la première étape de montagne déplaît. Pourtant, le spectacle a été au rendez-vous, force est de constater que pour une fois, cette ascension a donné lieu à un résultat intéressant : il y a eu une lutte, et des écarts !

Faut-il gagner « à la Evans » pour être apprécié ?

Quelque part, le problème est toujours le même : si un coureur écrase la concurrence, il sera détesté. Gino Bartali, sur le Tour 1950, avait été victime des coups de spectateurs français déchaînés contre le campioni, qui fut contraint d’abandonner pour échapper à la fureur d’un peuple lassé de voir les Italiens dominer l’équipe de France. Un quart de siècle plus tard, Eddy Merckx, reconnu unanimement comme étant le plus grand cycliste de l’histoire, reçut un terrible coup de poing au foie qui marqua la fin de son ère de domination ! Totalement rangé derrière Poulidor, l’éternel second, puis Thévenet, l’espoir montant, une sorte de coalition de tout le peuple français avait finalement eu raison d’un champion dont le panache et l’élégance ne faisaient qu’empirer le ressentiment du public à son égard…

Plus récemment, Alberto Contador, déclassé du Tour 2010 pour dopage, constamment raillé pour l’affaire « du steak », a vu sa cote de popularité remonter en flèche ! Autrefois détesté pour avoir « privé »  l’adulé Andy Schleck du maillot jaune, Contador est devenu le porte drapeau de l’Anti-Froomisme ! Les sifflets l’accompagnant à chacun de ses passages sur les podiums français se sont transformés en cris d’applaudissement : tous attendaient que le Pistolero, revenu en grâce, face tomber l’ogre Froome. Un retournement de veste express qui confirme l’avertie du public non pas pour le coureur dominant, mais pour la domination en elle même. Tout le monde préfère voir un Cadel Evans, plus limité, certainement plus humain, s’accrocher jusqu’au bout pour gagner un Tour de France à l’arrache.

Le Tour a rompu avec sa monotonie

Concrètement, qui s’est ennuyé lors de l’étape d’hier ? Personne. Nous avons eu des défaillances terribles (Van Garderen, Pinot), de bonnes surprises, telles que la présence au plus haut niveau de Kreuziger, qui est apparu plus fort que Contador lui-même ! Les Basques d’Euskaltel et les Néerlandais de la Belkin ont également répondu présents. Le travail considérable de Porte n’a fait que révéler les faiblesses latentes de certains outsiders tout bonnement surcotés. Autrefois, comprenez l’époque antérieure à celle de Froome, n’importe quel coureur mal en point arrivait à masquer ses faiblesses : normal, un train peu soutenu dicté par un coureur moyen tractait jusqu’à 1 kilomètre du sommet un groupe maillot jaune où tout le monde s’observait. C’est ainsi qu’Andy Schleck, pourtant fort, a manqué de nombreuses occasions de se défaire de Contador dans les Alpes en 2010, ou que Ryder Hesjedal est parvenu à remporter un grand tour… Mais Froome n’est pas Wiggins. Froome passe à l’offensive dès que l’occasion se présente. Il honore le maillot jaune et son histoire. C’est un coureur de panache qui sera apprécié à sa juste valeur quand il sera trop tard, comme ce fus le cas pour tous les grands champions qui l’ont précédé.

Ses performances ne sont pas inhumaines. Il n’est pas Lance Armstrong. Simplement, une nouvelle ère s’est ouverte au cours du début de cette décennie : Contador, Valverde et Evans sont vieillissants, ils ont fait leur temps, ont pesé pendant de nombreuses années avant de céder naturellement leur place ; Andy Schleck n’est pas encore revenu à son meilleur niveau ; la génération Van Garderen – Pinot a encore prouvé qu’elle n’était pas prête à prendre la relève. Aucun coureur de grand tour n’étant actuellement à son meilleur niveau, sauf peut-être Nibali, il est parfaitement logique que Froome et Porte, en plein âge fort, dominent le Tour de France 2013. En plus, ils y ajoutent la manière. Entre deux cris de rage, prenez le temps d’apprécier la performance de ces deux grands champions, vous pourriez être surpris. Malgré les apparences, la Sky est de fait entrain de sauver ce 100e Tour de France de la banalité.

Louis Rivas


 

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