Italien, professionnel dans les années 1990 et 2000, passé par la Gerolsteiner, contrôlé positif à l’EPO Cera : Davide Rebellin cumule tous les stéréotypes d’un coureur gangrené par le dopage. Mais à 46 ans, le voilà qui a rempilé pour une année. Preuve qu’au-delà des histoires qui ont pu entacher sa carrière, la passion prime sur tout.

La dure vie de repenti

« Je suis contradictoire, plus j’avance dans les années et plus je me sens jeune. » Les mots de Davide Rebellin, dans une interview accordée l’an passé à Velo-Club.net, suffisent à résumer la carrière du garçon. Le Vénitien, en fait, exagère à peine. C’est bien à presque 33 ans, déjà, qu’il avait connu le sommet de sa carrière avec le triplé ardennais, en 2004. Il n’a jamais vraiment été un précoce et à 37 ans, il gagnait encore la Flèche wallonne. C’était juste avant une suspension qui, pensait-on, sonnerait le glas de sa carrière. Mais plus de sept années après la révélation de son contrôle positif à l’EPO Cera (lors des Jeux Olympiques de Pékin), le garçon est toujours là. Ces dernières semaines, il a même proposé ses services à Jérôme Pineau et à l’équipe Vital Concept, qui n’a pas donné suite. On comprend le néo-manager français, pas enchanté à l’idée d’accueillir un coureur à mauvaise réputation dès sa première année d’existence. Mais le fait est que Rebellin a trouvé un autre point de chute très rapidement.

En 2018, l’année de ses 47 printemps, il courra donc en troisième division, pour Natura4Ever. Parce que l’Italien, qui vit désormais à Monaco avec sa femme française, ne se voit toujours pas faire autre chose que du vélo. « Ma femme me dit souvent que je suis né pour pédaler, confiait-il, toujours à Velo-Club.net. Je me vois pédaler la nuit aussi, pendant que je dors. » Certains lui tiendront rigueur de toujours avoir nié s’être dopé – il a, depuis, été blanchi, sans que toute la lumière ne soit faite sur cette affaire. Preuve que les erreurs du passé ne s’oublient jamais vraiment, lorsqu’il courait en 2015 pour l’équipe CCC Sprandi, Rebellin avait vu le Giro lui passer sous le nez. Mauro Vegni, le directeur de l’épreuve, avait fait part de son hostilité envers le repenti transalpin, et la formation polonaise s’était privée de son leader sur la course rose. Sportivement, pourtant, Rebellin aurait largement mérité d’en être.

A droite, à gauche, pour la passion

Mais le vétéran, à l’époque, n’en avait pas fait un scandale. De toute évidence, il ne court pas pour les records, même si question longévité, il est en train d’en battre beaucoup. En fait, c’est même à se demander s’il court encore pour gagner. Il lui arrive de lever les bras, mais ce ne semble plus être sa raison de vivre. Lui veut simplement faire partie du peloton. Être présent, partager des moments de vie, des courses, transmettre son expérience aux plus jeunes. Et advienne que pourra. « Sa vie tourne autour du vélo 24 heures du 24 », confirmait pour L’Equipe son ancien directeur sportif chez CCC, Piotr Wadecki. En 2012, déjà, Rebellin souriait en confiant qu’il ne connait pas la majorité des coureurs du peloton.

Alors oui, par moments, il lui arrive de se plaindre. Un peu. Et de façon pas si illogique. Le cyclisme italien a connu des années compliquées, mais des coureurs comme Basso ou Scarponi ont retrouvé une place dans des équipes de premier plan après leurs suspensions. Ils ont même réussi à gagner ou regagner un Tour d’Italie chacun. Rebellin, lui, a dû se contenter des restes. Uniquement de la seconde division, parfois plus bas encore. « Je dois accepter ma suspension de deux ans, reconnaissait-il pour Cyclingnews début 2016. Mais au final, c’était presque une suspension de sept ans à cause des portes fermées que j’ai reçu en plein visage, de la part de grandes équipes et de grandes courses. »

Fataliste, un peu, réaliste, surtout, et pas si rancunier, il a fait le deuil de cette deuxième partie de carrière qui aurait pu se passer autrement. Année après année, il découvre ainsi des courses de moins en moins réputées, baladé au gré de ses employeurs, un coup polonais, un autre koweitiens, désormais belges. Peut-être accro à la gloire et à certains produits par le passé, Davide Rebellin ne l’est donc aujourd’hui plus qu’à une chose : le plaisir de rouler.

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