Si depuis quelques années, la rentrée cycliste officielle s’effectuait de plus en plus tôt, à savoir à la mi janvier, le véritable coup d’envoi des hostilités de la saison 2015 devrait en théorie avoir lieu cette semaine, avec trois courses hivernales de références. Le Tour d’Oman, pour clore en beauté la tournée au Moyen-Orient, et en simultané la Ruta del Sol et le Tour d’Algarve, sur les routes européennes. L’heure des premiers vrais tests à sonné, et les grandes stars s’apprêtent à en finir avec leurs premiers coups de pédale symboliques ? En apparence oui, mais c’est quand même plus compliqué que prévu.

Les projecteurs braqués sur Nibali au Sultanat

C’en est désormais devenu une tradition. Depuis sa création il y a seulement cinq ans, le Tour d’Oman s’est fait une spécialité d’attirer les coureurs les plus renommés du peloton, en plein mois de février, synonyme de conditions météorologiques enviées vis-à-vis des journées maussades du vieux continent, pouvant déboucher sur des infections bénines, poussant à retarder la préparation des coureurs pour leurs objectifs du printemps. Une startlist alléchante, qui se retrouve dans le palmarès de cette épreuve récente. Fabian Cancellara en 2010, Robert Gesink en 2011, puis Peter Velits l’année suivante, avant deux victoires consécutives de Christopher Froome lors des deux dernières éditions. C’est bien simple, entre vainqueurs de monuments et du Tour de France, beaucoup de courses par étapes rêveraient d’un tel livre d’or. D’autant plus impressionnant pour l’épreuve omanaise que d’avoir fait mouche dès sa création. Accueillant depuis trois ans le vainqueur de la Grande Boucle pour sa première course à enjeux, elle peut se targuer d’avoir accueilli il y a deux années de cela un imposant quintette, se disputant une bataille acharnée pour le gain de la victoire en haut d’une Green Mountain, propulsée au rang d’incontournable. Froome, Contador, Evans, Rodriguez, Nibali qui jouent le jeu, on ne demande qu’à voir cela plus souvent !

Bis repetita vendredi ? Le plateau de l’épreuve version 2015 est un peu moins brillant que par le passé au niveau quantitatif, mais contient entre autre Vincenzo Nibali, Thibaut Pinot – soit deux des trois membres du podium du Tour 2014 ndlr – , Joaquim Rodriguez, Tejay Van Garderen, Alejandro Valverde, Leopold König, Rui Costa, Warren Barguil, Mathias Frank… Les vrais spécialistes des courses d’une ou trois semaines s’y sont une nouvelle fois donnés rendez-vous sur un terrain apprécié de tous. De la matière pour des sprinteurs en voie de peaufinement, une arrivée au sommet, une belle étape pour puncheurs-grimpeurs, et auparavant un contre-la-montre. On est très loin de la monotonie, certes relative, du Tour du Qatar et de la nouvelle-née à Dubaï. Cela explique l’ancrage de cette 2.HC à l’ascension fulgurante qui s’apprête à se focaliser sur Vincenzo Nibali, qui apprend à composer avec un statut nouveau. Installé sur le trône de la hiérarchie mondiale, c’est en Oman que son programme débute. Alors, sera t-il dans les temps, où comme l’an dernier, va t-il vouloir se cacher avant les grandes échéances qui arriveront quelques mois plus tard ? Le Sicilien d’adoption possède toutefois un bon feeling avec une course qui l’a vu terminer à une seconde de Velits au général en 2012 en dépit d’une belle victoire en solitaire lors de l’étape reine. Venu accompagné d’une équipe Astana qui repart en rôdage autour de son leader incontesté, Nibali risque d’être épié au moindre fait et geste le concernant. De plus, tout résultat autre qu’une victoire finale serait forcément vendu comme une défaite du Requin de Messine face à la concurrence. Un cas de figure plutôt compliqué à gérer pour l’intéressé…

Le duel Contador-Froome, pourtant sans indications…

Sous cet aspect là, le Tour d’Andalousie risque fortement d’accoucher d’une souris, et ce malgré une grande pression médiatique axée sur les retrouvailles entre les deux combattants de la dernière Vuelta, qui démarreront leur objectif de reconquête après les désillusions communes de juillet. C’est bien simple, jamais la Ruta del Sol n’avait causé une pareille excitation autour de son organisation. Chasse gardée du viver espagnol dans les années 2000, d’Antonio Colom à Alejandro Valverde, tout en passant par le regretté Xavier Tondo et l’emblématique Oscar Freire, il avait même été question de la disparition de l’épreuve andalouse des tablettes de l’UCI, en raison de la crise financière. Mais en 2015, regain de forme pour cette petite course par étapes, qui se permet d’offrir cinq étapes dont la première qui sera découpée en deux parties, avec un chrono difficile l’après-midi. Mais ce sont surtout les deux arrivées aux sommets d’Hazallanas – théâtre d’un cavalier seul d’Horner au Tour d’Espagne 2013 ndlr – et Allanadas qui retiennent toutes les attentions. Un temps décrit comme royal, avec la présence supposée de Nairo Quintana, Contador et Froome, qui disputeront à l’image de Nibali en Oman leur première compétition de l’année, auront pour adversaires d’autres beaux noms comme Bauke Mollema, Daniel Navarro, Jürgen van den Broeck, Pierre Rolland ou encore Wilco Kelderman. À bientôt deux semaines du Paris-Nice et de Tirreno-Adriatico, l’importance du résultat et de la confiance engrangée devient prépondérante, même si, au risque de se répéter, ne constitue en aucun cas un socle de garantie pour la suite de événements. La tranquillité, c’est finalement en Algarve que les engagés la trouveront. Vainqueur sortant, le champion du monde Kwiatkowski abordera l’année 2015 sans pression, avec l’absence d’autres grands noms monopolisant l’attention.

C’est pourquoi tous les observateurs vont ainsi se concentrer sur le match entre Contador et Froome, entre la Sky et la Tinkoff, et ce en l’annonçant bien avant le money time. Au risque de surexploiter la situation, on finit généralement douché. Quid d’une victoire d’un outsider à la Julian Arredondo dans la péninsule Arabique, et au triomphe du Néerlandais Mollema en Espagne, qui reste sur une deuxième place au Tour de Murcie ? Devrait-on en être forcément surpris ? Non, et que ce soit dans les terrains escarpés où sur les lignes droites interminables, la hiérarchie met de plus en plus de temps à se dégager nettement. Personne n’est à l’abri d’un excès de forme qui arrive trop tôt, où d’un retard à l’allumage coutumier. Alexander Kristoff a gagné trois fois au Qatar, mais bien souvent, ses rivaux directs ont été éliminés sur bordures. Est-il pour autant devenu l’homme le plus rapide du monde et le probable meilleur sprinteur de l’année à venir ? Après, tout qui pouvait prédire la victoire de Daniel Diaz au Tour de San Luis, au nez et à la barbe du vainqueur du dernier Giro ? On met une pièce sur le fait que cette « vraie rentrée » ne sera ni vierge en surprises ni linéaire comme tout le monde aime le penser.

Buy me a coffeeOffrir un café
La Chronique du Vélo s'arrête, mais vous pouvez continuer de donner et participer aux frais pour que le site reste accessible.