A 36 ans, voilà Joaquim Rodriguez en position de remporter son premier grand tour. Dimanche vers l’Alto de Sotres, il était le plus costaud et s’est rapproché à une petite seconde de Fabio Aru au classement général. Mais le Catalan a encore attaqué dans le dernier kilomètre, alors qu’il aurait pu faire beaucoup plus de dégâts en partant de plus loin…
Des erreurs qu’il répète
L’histoire de Purito avec les grands tours est assez épique. Plusieurs fois, la victoire lui semblait promise, avant de finalement le fuir. En 2012 par exemple, il avait tout pour remporter le Giro puis la Vuelta, mais a dû se contenter de deux podiums, battu par Hesjedal au mois de mai puis par Contador en septembre. Et à chaque fois, le scénario a des airs dramatiques. Sur la course rose, Rodriguez avait fait du maillot de leader sa seconde peau, mais l’avait perdu le jour de l’arrivée, sur l’ultime chrono milanais. Pour 16 secondes, le Catalan avait perdu le Giro. Puis sur le Tour d’Espagne, tout s’était également joué sur une seule étape : le lendemain de la deuxième journée de repos, vers Fuenté Dé. Dans un jour sans, Rodriguez avait concédé pas loin de trois minutes à Contador : à Madrid, il perdra l’épreuve pour moins de deux minutes. Le Barcelonais a donc appris, surtout à ses dépens pour le moment, qu’un grand tour peut basculer à tout moment, et dans des proportions qu’on n’ose parfois même pas imaginer. Et pourtant, il reste tactiquement le même.
Malgré les années, il reste l’un des coureurs à la giclette la plus impressionnante. Même Nairo Quintana, sur cette Vuelta 2015, ne rivalise pas. Sa stratégie, saison après saison, consiste donc à attaquer dans les derniers hectomètres des ascensions pour prendre quelques secondes d’avance et limiter les risques de défaillance. Même s’il tombe sur plus fort que lui, le leader de l’équipe Katusha s’assure en effet de ne pas perdre trop de temps en attaquant le plus proche possible de l’arrivée. Aidé dans son entreprise par les organisateurs ibériques, qui offrent des bonifications aux trois premiers de chaque étape, il reste persuadé que c’est de cette façon qu’il finira par gagner un grand tour. Sauf que justement, le passé lui à prouvé qu’à jouer au gagne petit, il finit toujours par perdre. Mais ce lieutenant devenu cador du peloton a semble-t-il du mal à changer. Dimanche, au cœur d’un triptyque montagneux censé affiner le classement général, il a donc suivi son schéma prédéfini, en portant son estocade à un peu plus d’un kilomètre de la ligne. On aurait tant aimé le voir passer à l’offensive un peu plus tôt…
Moreno et les forts pourcentages deviennent inutiles
S’il avait osé sortir du groupe des favoris à ne serait-ce que trois kilomètres du sommet, Rodriguez aurait pu profiter de sa forme pour s’envoler sur les très forts pourcentages. Fabio Aru, que l’on a vu à la rupture dès que Purito s’est dressé sur ses pédales, aurait peut-être alors craqué davantage, au même titre que Dumoulin, dont tout le monde se méfie sans pour autant l’attaquer franchement. Et à l’aube de la dernière semaine, le Catalan serait alors un confortable maillot rouge. Mais le protégé de Viacheslav Ekimov, sans doute par peur – de Quintana peut-être, virevoltant en début d’ascension – a préféré patienter, observer et n’attaquer qu’une fois sûr de son coup. Au sommet, les écarts sont donc minimes : les onze premiers se tiennent en 41 secondes ! Tout le monde a remarqué que Joaquim Rodriguez était le plus fort, mais lui-même n’en a pas profité autant qu’il aurait pu, et autant qu’il aurait dû.
Alors qu’un Quintana est capable de tenter le diable à dix kilomètres de l’arrivée, avant de craquer dans le final car il n’est pas au niveau, Rodriguez lui n’ose pas attaquer malgré son état de grâce. Et en attendant les derniers hectomètres de cette façon, il ne profite même pas de son coéquipier Dani Moreno, également en grande forme mais qui n’est d’aucune utilité avec une telle stratégie. Troisième au sommet, le lieutenant de Purito a fait sa course presque en solitaire, alors qu’avec une tactique plus élaborée, il aurait pu permettre à son leader de faire des dégâts autrement plus importants. Désormais, il ne reste donc plus qu’une seule arrivée au sommet, et les rivaux sont encore en course : Aru reste maillot rouge, et Dumoulin pointe à seulement 1’25’’. Quand on connaît les piètres qualités de Rodriguez en contre-la-montre, l’hypothèse d’un énième podium est plus qu’envisageable. Une nouvelle fois, en la jouant trop petit bras, Purito risque donc de passer à côté de son rêve.
Excellent article, alors vraiment, rien à dire. bravo!
Comme j’apprécie énormément le comportement de Rodriguez en général, j’espère qu’il vous donnera tord, en ne passant pas à côté de son rêve cette fois-ci. Mais effectivement j’ai peur que vous ayez raison…
Après je pense que c’est calculé, il sait qu’il peut produire tant de watts en disont 4 minutes max. Si ça se trouve, Aru en gérant l’aurait repris voire contrer
Bof, bof.. que viennent faire les bonifications dans la démonstration puisque les 3 GT en ont du moins cette année. . Rodriguez fait comme il peut.. à sa manière. . Aru plafonne. .
Constat.. Dumoulin, Moreno, Jeandeboz. .c’est leur 1e tour de l’année ou presque.. Purito 1/2 voire 1/3 de TdF.. Les derniers vainqueurs des Vuelta idem.. Contador et Froome l’an dernier, Horner en 13, Contador en 12.. Cobo et Froome en 11.. les grosses équipes vont y réfléchir à l’avenir. .. parcours de plus en plus, chaque GT voulant se démarquer
@gilbert5866 : J’ai évoqué les bonifications car il y a quelques années, et notamment en 2012, il n’y en avait que sur la Vuelta, et ça a pu conforter Rodriguez dans sa tactique.
Si Rodriguez gagne la Vuelta, eu égard à son palmarès, ce ne sera pas volé. Maintenant, les écarts étant minimes, rien n’est acquis. D’ailleurs, ce n’est pas lui le leader de la course aujourd’hui! Le contre la montre méritera vraiment son surnom d’épreuve de vérité!
quelle est la longueur du ClM de Burgos? ça en dira long sur le résultat final… Si c’est plus de 25km et que Dumoulin reste à moins de 2mn au général, ça risque d’être réglé. Même si un CLM de 3ème semaine, se joue beaucoup sur la fraicheur résiduelle.
38km, tout plat. Si Dumoulin reste où il est, c’est quasi gagné…
Le raisonnement ne tient pas si on tient compte que Rodriguez est une petite cylindrée qui ne tient pas au delà du kilomètre. Il perd le Giro dans le Stelvio car l’ascension était trop longue et il n’a pu partir que dans le dernier kilomètre et difficilement. Pour le faire perdre, rien de tel qu’une course de mouvement en montagne etlà, il ne peut qu’exploser face à des Contador, Froome ou Quintana. C’est un sprinter de montagne, un peu le Van Impe moderne et rien de plus
Pas d’accord avec cette analyse. Si Rodriguez n’attaque pas plus tôt ce n’est pas pour limiter les risques de défaillance, c’est parce que c’est comme ça qu’il fait les plus grosses différences, aussi limitées soient-elles à vos yeux. Rodriguez n’est tout simplement pas capable de maintenir un rythme lui permettant de creuser des écarts. Au delà d’un kilomètre d’effort (parfois moins même), il plafonne, ralentit. On l’a encore vu sur la montée de lundi où Aru lui a repris du temps petit à petit jusqu’à mourir sur ses talons. Si Rodriguez avait attaqué 500m plus tard il aurait peut-être fait plus d’écart sur l’Italien ! S’il est emmené par un coéquipier (ex : Moreno lors de la 11ème étape) ou des adversaires, oui il peut tenir longtemps. Mais il n’a pas le moteur de grimpeur pur pour pour maintenir de longs efforts seul. Il reste un puncheur avant tout, et c’est d’ailleurs logique que lorsqu’on soit capable de placer des accélérations aussi fulgurantes que celles qui ont fait sa renommée on ait moins d’essence et on en paye le contrecoup dans la foulée. C’est le revers de ses qualités. Même s’il a davantage de caisse aujourd’hui qu’il y a quelques… Lire la suite »