Après les accumulations montagneuses des dernières éditions, le 70ème Tour d’Espagne, lui, semble revenir à la raison. Exit les douze arrivées au sommet de la démesurée édition 2012, et place à l’originalité, qui semblait faire défaut à l’événement espagnol, toujours en quête d’identité. Du 22 août au 13 septembre prochain, les coureurs devront s’attaquer à un parcours varié, diversifié, mais toujours ponctué d’étapes difficiles, notamment concentrées en deuxième semaine. Avec neuf arrivées au sommet, toutes inédites, le clou de la Vuelta 2015 devrait cependant être la onzième journée, théâtre d’une étape reine gargantuesque en Andorre…

Le retour d’une certaine originalité

Face à un Tour de France n’hésitant pas à proposer un kilomètrage de contre-la-montre bien supérieur à la moyenne ces dernières années, et un Giro adepte de haute montagne éprouvante, la Vuelta, elle, a toujours quelque peu cherché sa formule. La société organisatrice Unipublic, dirigée par Javier Guillen, a ainsi redonné de l’attractivité à son épreuve en favorisant les étapes spectaculaires, se finissant fréquemment en haut de bosses très courtes, mais excessivement pentues, où de cols incongrus, comme ce Cuitu Negru dégusté il y a deux ans. Mais, bon nombre d’observateurs, s’étaient élevés contre cette tendance répétitive, en justifiant qu’il suffisait d’allumer son téléviseur à la flamme rouge. Cette fenêtre dite de Vuelta pour puncheurs explosifs semble se refermer petit à petit, et les puristes pourront dire qu’ils ont été écoutés, au moment de découvrir le nouveau tracé de la course ibère. Si l’entrée en matière s’annonce rude, avec une arrivée au sommet du pittoresque Caminito del Rey le deuxième jour, les sprinteurs ne seront pas mis de côté, avec pas moins de sep- voire huit – occasions de victoires tout au long des trois semaines de course. A condition bien sûr de passer les bosses.

En effet, si les arrivées à Malaga et Alcala de Guaidara ne semblent pas pouvoir échapper aux équipes de sprinteurs, au cœur de la tournée andalouse, la double ascension en 36 kilomètres de la Creste del Gallo, durant la huitième étape, pourrait sourire aux audacieux désireux de déjouer les plans des bolides. Même profil deux jours plus tard, entre Valence et Castellon, puisqu’un Alto de deuxième catégorie se dressera à 24 bornes de la ligne d’arrivée. Entre temps, il aura déjà fallu se farcir les arrivées en bosse de Vejer de la Frontera et en haut de la progressive Sierra de Cazorla, un long faux plat de plus de vingt kilomètres qui présentera des pentes supérieures à 10% dans ses deux derniers kilomètres. La première vraie explication montagneuse, elle, aura lieu le vendredi 28 septembre, avec la montée vers l’Alpujarra. Seize kilomètres de grimpette, pour atteindre les 1490 mètres d’altitude, au terme d’un profil en paliers, aux pentes exigeantes dans sa deuxième moitié. On aura vraisemblablement une hiérarchie au soir de cette journée, qui demandera toutefois à être confirmée dès le lendemain. Le long du littoral, il faudra gravir à deux reprises la très raide Cumbre del Sol, longue de quatre kilomètres pour un pourcentage moyen de 7% – et 18% par endroits. Il est bon de souligner par ailleurs le retour d’un kilométrage plus conséquent pour un grand tour qui nous avait habitué à des étapes souvent brèves, où il était rare de voir le compteur dépasser les 200 kilomètres. Cette année en revanche, cinq étapes dépasseront cette barre symbolique. La récupération sous la chaleur estivale sera un enjeu non négligeable.

Un concentré de sommets en Andorre et un triptyque cantabrique

Justement, parlons des journées de repos, et plus précisément de la première, qui interviendra le 1er septembre. Elle devrait être cruciale, puisqu’elle ne fera ni plus ni moins que précéder la journée la plus importante, sur le papier, de ce Tour d’Espagne 2015. La onzième étape n’est longue que de 138 kilomètres, entre Andorre-la-Vieille et le Cortals d’Encamp, et fait le tour de la principauté pyrénéenne, mais comporte six grands cols, qui seront enchaînés sans répit. D’abord trois premières catégories, avec la Collada de Beixalis (12 km à 6%), le Coll d’Ordino (9 km à 7%), suivi de l’irrégulière montée de la Rabassa (13 km à 6%), avant l’inédit versant de la Collada de la Gallina, classée hors catégorie cette fois. Après avoir escaladé les douze kilomètres à 8,8 % de moyenne, dont de longues portions dépassent les 15% de déclinaison, il en restera 38 parsemés du moins difficile Alto de la Cornella, précédant le final vers Cortals d’Encamp. Neuf kilomètres supplémentaires pour une pente moyenne de 9%, voici le bouquet final d’une journée décrite par tous comme extrêmement compliquée. Qui plus est, elle survient très tôt par rapport aux habituels feux d’artifice placés en troisième semaine, pour le coup sacrément dégarnie. Après deux étapes de transition pour sprinteurs ou baroudeurs, on entrera dans un triptyque montagneux abrupt, dans la Cordillère Cantabrique.

213 kilomètres pour une course de côte sur les routes du Fuente del Chivo en guise de quatorzième étape, le redoutable Alto de Sotres le lendemain dimanche – avec des pointes à 30%, avant un récital de cols locaux pouvant donner lieu à une course de mouvement si les opportunistes exploitent le terrain. La Cabrunana, le Tenebredo, et dans les 35 derniers kilomètres la traversée successive du Cordal et de la pentue Cobertoria annonçant la dernière trouvaille de l’Ermita de Alba (6 km à 11%), donnent la possibilité à des garçons fringants de bouleverser la course. Après, ce sera repos, puis interviendra le gros contre-la-montre individuel de cette Vuelta, redevenu tout plat, une première depuis le circuit de Salamanque en 2011. 39 kilomètres autour de Burgos serviront à départager les grands acteurs du moment, et ne manqueront pas de pénaliser les piètres rouleurs comme Joaquim Rodriguez, par le passé malheureux dans cet exercice, ou d’avantager un Christopher Froome qui se dit tenté par l’évènement. Il restera alors quatre étapes pour rallier Madrid, qu’on pourrait définir comme trompeuses. Vers Riaza, le sort de l’étape devrait se disputer entre des attaquants sortis dans le dernier col, et une échappée matinale roublarde. Le dernier vendredi est moins corsé jusqu’à Avila, et les puncheurs seront plus ou moins attendus. Mais il n’empêche que le général pourra se perdre du premier jour à Marbella avec un contre-la-montre par équipes très court – seulement 7,9 kilomètres – souvent riche en déconvenues, à l’avant-dernier, où les organisateurs ont concocté une jolie étape montagneuse avec un finish en descente à Cercedilla, dans la banlieue madrilène. Le Puerto de Navacerrada, Morcuera dans les deux sens, et enfin le Puerto de Cotos en juge de paix du prochain d’Espagne, précéderont les vingt kilomètres avant la dernière halte. Le lauréat sera sans aucun doute un très bon grimpeur, mais qui aura su éviter des pièges plus nombreux qu’à l’accoutumée. Valverde, Rodriguez, qui en ont déjà fait leur objectif de l’année, mais aussi tous les autres, sont prévenus. Cette Vuelta sort de l’ordinaire.

Retrouvez tous les profils d’étapes ici.

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