A Burgos, Fabio Aru s’était offert le devoir de gagner la Vuelta. Avec une poignée de secondes de retard sur Tom Dumoulin, il n’avait presque pas le droit de terminer deuxième. Ce samedi vers Cercedilla, il est donc passé à l’action, et a fait craquer son rival pour s’offrir un premier grand tour. Avec la manière.

Un plan sans accroc

Au cours des trois dernières semaines, Aru a eu des jours sans. Parfois à la rupture, notamment sous le joug de Joaquim Rodriguez, il n’a pas volé sur la Vuelta comme Contador et Froome ont pu le faire cette année sur le Giro ou sur le Tour. Mais l’Italien, dès qu’il a eu les jambes, a tenté de faire exploser la course, avec ce panache qui le caractérise. Bien sûr, le Sarde a ses détracteurs. Courir chez Astana suffit à en avoir. Mais sur les routes ibériques, il a apporté un spectacle que les Rodriguez, Majka et même Quintana n’ont jamais été capables d’incarner. L’étape de ce samedi en a été l’illustration parfaite : le leader de la formation kazakhe, pointé à six secondes du maillot rouge, a attaqué dans l’avant-dernière difficulté du jour, faisant exploser Tom Dumoulin et nous offrant une fin d’épreuve en apothéose. Embarquant avec lui quelques autres grimpeurs, il a bouleversé le classement général, et montré à tous qu’il était davantage qu’un leader de substitution derrière Vincenzo Nibali.

Tactiquement, le coup était parfait. Aru a placé une première banderille, observant la relative faiblesse d’un Dumoulin hier épatant, mais aujourd’hui chancelant. Puis la deuxième attaque, dans les plus forts pourcentages du jour, fut la bonne, et le Puerto de la Morcuera restera donc comme l’ascension où a basculé la Vuelta 2015. En prenant rapidement une vingtaine de secondes d’avance, l’Italien avait fait le plus dur, et a ensuite pu compter sur Andrey Zeits et Luis Leon Sanchez, présents dans l’échappée matinale et qui en se laissant reprendre, ont été d’une aide plus que décisive. Sans eux, Dumoulin serait sans doute revenu dans la descente, et tout aurait été à refaire dans le col suivant. Mais Aru n’a pas eu besoin de se tortionner l’esprit avec ça, puisque le Néerlandais n’a jamais revu sa roue. Un coup de maître, la veille de l’arrivée. Le fantasme des observateurs sur chaque grand tour, qui pour une fois se réalise. Il faut dire que peu de monde aurait pardonné au Sarde de terminer deuxième, malgré la vaillance de son rival.

Dans la cour des grands

A l’arrivée, les écarts étaient donc conséquents. Dumoulin, conscient de sa défaite, a baissé les armes et concédé quatre minutes, reculant à la sixième place du général. Après avoir déjà tenté hier de faire la différence, Fabio Aru a lui confirmé que le panache était une de ses forces. Au cours de cette même Vuelta, cela s’est d’ailleurs par moments retourné contre lui. S’il a su gérer ses journées un peu plus difficiles, sa confiance en lui presque démesurée l’a parfois poussé à se mettre en danger. Il peut donc remercier l’attentisme de ses adversaires, sans quoi il serait peut-être passé à côté de ce succès final sur une épreuve de trois semaines. Mais à l’heure de rejoindre Madrid, le temps de refaire la course est passé, et l’audace du transalpin est finalement récompensée. L’Italien a gagné, et rentre un peu plus dans la cour des grands. Orpheline de Nibali, l’équipe Astana a la preuve qu’elle peut compter sur Aru. Le cadet est d’ailleurs en train de suivre les traces de son aîné : après avoir connu le podium sur le Giro, le voilà sacré sur son premier Tour d’Espagne, à 25 ans. S’il poursuit dans cette voie, les prochaines années pourraient donc apporter leur lot de consécrations à Fabio Aru. Avec on espère toujours le même état d’esprit.

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