Alors que les classiques pavées arrivent à leur terme, l’équipe de Patrick Lefevere n’y a toujours pas levé les bras – le maigre succès de Niki Terpstra sur le GP Samyn mis de côté. Leur meilleur résultat sur les flandriennes World Tour reste même une anecdotique sixième place sur Gand-Wevelgem, décrochée par Gaviria. Mais malgré ce bilan peu flatteur, les coéquipiers de Tom Boonen feront partie des gros favoris au départ de Paris-Roubaix, ce dimanche.

Terpstra et Stybar, nouveaux leaders

Le triple champion des Pays-Bas est l’un des coureurs les plus réguliers sur Paris-Roubaix ces dernières années. Depuis son arrivée chez Quick-Step en 2011, il n’a cessé de collectionner les bons résultats et n’a quitté le top 5 qu’à une seule reprise – l’an passé. La machine à rouler néerlandaise n’a jamais réussi à faire la différence sur les bergs du Tour des Flandres – exception faite à la saison passée – à cause de son manque d’explosivité. Mais sur les secteurs pavés bien plus plats de l’Enfer du Nord, ce sont ses qualités de rouleur et d’endurance qui priment. Souvent discret et économe dans sa gestion de course, Terpstra sait y faire. Sa victoire sur le vélodrome en 2014 en est le plus bel exemple. Son sens de la course, aux moments chauds, est une référence. Esseulé en tête de course, il fait partie de ceux qu’on ne revoit pas.

Du côté de Stybar, c’est un peu l’inverse. Même son entraîneur Peter Hespel conçoit qu’il a des lacunes tactiquement : « Il manque encore de sens tactique. Je ne dis pas que Zdenek n’est pas un coureur intelligent mais dans des courses nerveuses comme le Ronde, il faut pouvoir bien jauger ses concurrents et choisir le bon moment pour attaquer. Ce qui n’est pas évident, vu qu’il vient du cyclo-cross. » Malgré ce point faible, le Tchèque a toujours réussi à performer sur Paris-Roubaix, grâce à son extrême souplesse et surtout parce qu’il est presque impossible de le lâcher quand il décide de prendre la roue d’un favori. En 2013, Cancellara avait d’ailleurs dû subir ce marquage à la culotte avant qu’un supporter ne bouscule l’ancien champion du monde de cyclo-cross dans le Carrefour de l’Arbre. Ses qualités issues justement des labourés lui permettent de faire des choix de trajectoires impossibles pour d’autres, et font surtout de Stybar un coureur très habile : un véritable atout quand la fatigue s’accumule au fil des secteurs pavés.

Boonen, chez lui malgré les galères

Longtemps, les supporters belges ont espéré revoir Boonen au top. Mais définitivement, l’ancien champion du monde vit la pire période de sa longue carrière. Encore incapable d’accrocher le moindre accessit depuis le début de saison, l’Anversois paraît toujours avoir un temps de retard à l’approche des difficultés. Sa peur chronique de la chute et sa perte d’explosivité ont fait s’envoler tout espoir de le voir briller sur les classiques flamandes. Sa dernière victoire sur un monument pavé remonte à 2012, lors de son ultime doublé Ronde-Roubaix. Depuis, il enchaîne les galères. Pour preuve, il n’a participé qu’à un Paris-Roubaix en trois saisons. Forcément, il n’abordera donc pas l’épreuve de dimanche avec une confiance optimale.

Mais malgré cette méforme, Boonen reste Boonen, et Paris-Roubaix reste sa course. Recordman de victoires sur l’épreuve avec quatre succès, il n’y a terminé qu’une fois en dehors du top 10, c’était en 2003. « Tom connaît très bien cette course », a expliqué Wilfried Peeters à Sport Foot Magazine. « Il est moins explosif et l’époque où il remportait quinze courses par an est révolue, mais il est loin d’être fini. Il doit maintenant davantage miser sur son endurance. » Moins explosif mais toujours puissant, « Tommeke » peut encore faire des dégâts. Surtout à Roubaix. Le printemps 2014 notamment a de quoi laisser quelques uns rêveurs. En grande difficulté sur le Tour des Flandres, il avait répondu largement présent une semaine plus tard. Son anticipation à 65 kilomètres de l’arrivée avait surpris tout le monde et lancé la course. Résistant un long moment au retour des autres favoris, il avait permis à l’équipe Quick-Step de prendre l’ascendant sur la course, et de finalement s’imposer par l’intermédiaire de Terpstra. Dans ces conditions, Boonen pourrait donc retrouver un statut de prétendant à la victoire.

Le collectif comme dernier ressort

Très souvent en surnombre en fin d’épreuve, l’équipe Etixx n’est jusqu’à maintenant pas parvenue à en profiter. La raison ? Il manque clairement dans cette armada un leader désigné, capable de suivre les meilleurs. Tours à tours, Terpstra, Stybar et Boonen ont été sacrifiés sur l’autel du collectif. Mais sur Paris-Roubaix, cette force du nombre est un atout largement plus conséquent que sur les autres classiques. Alors que les plus forts sortent souvent ensemble sur le GP E3 ou le Tour des Flandres – ça s’est confirmé ces derniers jours -, le scénario de la plus ancienne des classiques pavées est souvent différent. Un effectif fourni a davantage de chances de prendre le dessus. Les victoires de Knaven, O’Grady, Vansummeren ou Terpstra en sont de parfaits exemples : les outsiders ont leurs chances du moment qu’un grand leader est également présent pour accaparer l’attention.

Mais surtout, on y revient, Boonen, Terpstra et Stybar sont davantage faits pour Paris-Roubaix que pour les autres classiques. Idem pour Vandenbergh, un coureur fait pour protéger ses leaders et rouler sur le plat, parfois au chômage technique mais qui aura dimanche un rôle déterminant. Les velléités de classiques de Tony Martin pourraient également se révéler précieuses sur les routes françaises, comme la présence de Keisse ou Maes, jusqu’ici bien discrets. Quand beaucoup des cadors actuels – Cancellara, Sagan, Van Avermaet, Kristoff – sont plus à l’aise sur le Ronde, l’équipe Etixx reste taillée pour Roubaix. Cette course est dans l’ADN de l’équipe. Et les chiffres le rappellent sans cesse. La formation belge a remporté 10 des 21 dernières éditions. Pour sauver sa campagne de flandriennes, Patrick Lefevere compte donc sur une onzième victoire dans l’Enfer du Nord. Et malgré les doutes, ses hommes en sont capables.

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