L’Américain a triché. Il a fallu du temps, mais il a été puni. Suspendu à vie, déchu de ses sept titres sur le Tour, contraint de payer des dizaines de millions d’euros de dédommagement et lancé dans une quête de restauration de son image, il est en train de payer sa dette au cyclisme. Alors s’il a de nouveaux projets, extérieurs au monde professionnel, pourquoi ne pas le laisser tranquille ?

Le mouton noir

A chaque fois que Lance Armstrong dit, fait ou est même simplement impliqué dans quelque chose, l’ensemble du monde cycliste se sent obligé de réagir. Comme s’il fallait absolument décrédibiliser une fois de plus le Texan catalogué comme le plus grand tricheur de l’histoire du sport. Mais franchement, on a compris. L’Américain s’est dopé, on ne sait pas exactement quand et comment, mais assez pour mériter qu’on lui retire toutes ses victoires sur la Grande Boucle et qu’on le lynche sur la place publique. C’est assez pour qu’on n’ait pas besoin d’en remettre une couche à chaque fois qu’il fait l’actualité. Qu’en sous-main, un homme comme Travis Tygart fasse son maximum pour ne pas réduire la sanction de « L.A » passe encore. Mais on se passerait volontiers, lorsqu’on apprend que l’Américain souhaite voir sa peine revue à la baisse, que tous les dirigeants d’instances montent au créneau pour le dézinguer. L’USADA est la seule à être parvenue à faire tomber Armstrong, laissons-la faire jusqu’au bout.

Evidemment, nous ne défendons pas Lance Armstrong. Il a contribué au développement des clichés du cyclisme, et énormément porté préjudice à l’image de son sport à travers le monde. Mais il a aussi apporté au vélo, il est impossible de le nier. Son professionnalisme a souvent été mis en avant, à juste titre. Les plus rancuniers diront que si Armstrong n’avait pas été là, un autre aurait pu apporter cette minutie qu’il a parfois manqué aux champions. Mais alors, pour ce qui est du rayonnement de la « Petite Reine » outre-Atlantique, qui aurait pu remplacer « L.A » ? Assurément personne. Aussi tricheur et odieux fut-il, celui qui a conservé son titre de champion du monde n’a été nuisible au vélo qu’après ses aveux. Avant, il était surtout ce champion que beaucoup idolâtraient, cultivant le mystère et donc les suspicions – qui s’avèreront légitimes. C’est d’ailleurs sans doute cet enthousiasme devant ses victoires qui pousse certains à être démesurément obstinés à son sujet.

L’hypocrisie avant tout

Aujourd’hui, Lance Armstrong souhaite simplement participer à un projet caritatif pour aider des personnes qui souffrent du cancer. Comment oser l’en empêcher ? Oui, pour cela, il devra revenir sur les routes du Tour, et parcourir certaines étapes un jour avant les coureurs. Mais il n’a pas sollicité cette opération, le footballeur britannique Geoff Thomas lui a simplement demandé son aide. Après ses aveux, l’Américain avait confié qu’il passerait le reste de sa vie à s’excuser et à tenter de restaurer son image. Il est en train de le faire. Alors que ça ne fasse pas plaisir à l’UCI est une chose. Qu’elle l’exprime en est une autre, assez peu honorable. Les mots de Brian Cookson ont en effet été très durs. « Franchement, c’est complètement inapproprié et irrespectueux pour le Tour. Il serait bien avisé de renoncer », a lâché le président de l’UCI. Après avoir collaboré avec la Commission indépendante ces derniers mois, l’Américain n’aurait donc même pas le droit de poursuivre son engagement humanitaire ?

« Soyons clairs, je ne critique pas les gens qui se lancent dans des initiatives humanitaires de ce genre. Mais je pense que Lance pourrait trouver un moyen plus adapté que celui-ci pour continuer à lever des fonds. Il peut faire du vélo en France aussi souvent qu’il le souhaite, ça n’a rien à voir avec moi ou avec l’UCI », a poursuivi Cookson. Une déclaration évidemment hypocrite tant l’Anglais est l’un des mieux placés pour savoir que le mois de juillet, grâce à l’engouement généré par la plus grande course au monde, est le moment parfait pour mobiliser autour d’une cause importante. Geoff Thomas espère récolter grâce à son projet environ 1,4 million d’euros. Mais ce ne sera possible qu’avec l’aide d’Armstrong. On en veut donc tous à l’Américain, parce qu’il incarnait une si belle histoire qu’on a voulu y croire, et qu’on s’est tous fait avoir. Mais aujourd’hui, il continue de vivre. Et pour une fois qu’il respecte les règles, ayons l’intelligence de le laisser tranquille. D’autant plus quand il œuvre pour la bonne cause.

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