Il y a des deuxièmes places acceptables. Mais sur le GP E3, ce vendredi, Peter Sagan n’avait pas le droit de perdre. Le champion du monde était sorti de la meilleure des manières, à presque 35 kilomètres de l’arrivée, avec Michal Kwiatkowski. La victoire devait être une formalité. Mais il a encore fait deuxième…

Une faute de débutant

En juillet dernier, le Slovaque avait cumulé cinq deuxièmes places sur les routes du Tour de France. Mais pour chacune d’entre elles, il avait une explication. Souvent, il met d’ailleurs sa polyvalence en cause. « La valeur de la victoire ou d’une deuxième place est relative. Si je fais deuxième d’un sprint, je peux être content puisque je ne suis pas un pur sprinteur. Si je termine à la même place dans un final en montagne, je suis content aussi puisque je ne suis pas un grimpeur », jugeait-il dans une interview accordée à Vélo Magazine cet hiver. On a envie de dire qu’il n’a pas tort sur ce point. Beaucoup de coureurs ne seraient même pas capables d’aller chercher des tops 10 sur des terrains aussi variés : lui va y accrocher des deuxièmes places. Mais sur ce GP E3, la montagne était absente, et la victoire ne s’est pas jouée au sprint ! Ils n’étaient que deux hommes à se battre pour le bouquet du vainqueur dans la dernière ligne droite. Et face à Kwiatkowski, Sagan aurait dû s’imposer.

« Si la deuxième place est liée à une erreur de ma part, à une faute de jugement, de placement, alors c’est autre chose ! », poursuivait Sagan, toujours dans Vélo Magazine. C’est pourtant ce qu’il s’est passé. En tête à tête avec le Polonais dans les derniers hectomètres d’une épreuve qu’il a déjà remportée, l’enfant de Zilina s’est troué. Et avec la manière. Fort logiquement, Kwiatkowski refusait de passer devant. Sagan le surveillait, jusqu’à la pancarte des 300 mètres, où il a jeté un dernier coup d’oeil. Tout le monde pensait alors qu’il allait lancer son sprint, mais il s’est rassis, a presque arrêté de pédaler et regardait bien en face de lui. Son adversaire, lui, l’a déboité sur sa gauche et l’a surpris. Tout de suite, le champion du monde s’est retrouvé distancé de quelques mètres, qu’il n’a pu boucher. Une erreur grossière, qui lui a coûté une nouvelle victoire. Sur la ligne, il a encore fait deuxième. Mais cette fois, il n’y a aucune excuse. Il n’est pas allé chercher un podium, il a laissé filer un succès. “C’est mon destin, lâchait-il dépité au micro de Sporza à l’arrivée. Qui a plus de deuxièmes places que moi ? Il serait temps de gagner.”

Les classiques, c’est pourtant son domaine

Alors les sprints, la montagne, on a compris, ce n’est pas sa spécialité, et il ne faut pas s’attendre à le voir y lever les bras. Mais s’il reste un endroit où le Slovaque doit imposer sa domination, c’est bien sur les classiques. Or déjà deuxième de l’Omloop Het Nieuwsblad lors du week-end d’ouverture, il n’y a toujours pas levé les bras. Il n’y a pas d’urgence, mais les scénarios de course ont de quoi frustrer le principal intéressé. Il nous offre du spectacle, et encore vers Harelbeke, il n’a pas hésité à sauter dans la roue de Kwiatkowski et à prendre de gros relais quand il a fallu fausser compagnie au reste des favoris. Mais ça ne suffit pas. Tenter, prendre des risques, c’est un état d’esprit qui conquiert tout le monde. Sauf que ça ne fait pas tout. Depuis le début de la saison, soit en dix-huit jours de course, le Slovaque a déjà collectionné six places de « deux ». Beaucoup trop. Il y a quelques mois sur Twitter, après une nouvelle deuxième place, il avait écrit : « Ça ne me manquait pas, mais nous y revoilà ! » Aujourd’hui, le gag a assez duré, il est temps d’y mettre fin.

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