Malgré ses 23 printemps seulement, certains commençaient à s’impatienter. Les qualités de Nacer Bouhanni sont en effet bien connues, mais en trois participations à un grand tour, il n’était jamais parvenu à décrocher une étape. Ce mardi, au moment où le Giro a rejoint l’Italie, le Français a réparé ce qui commençait à être une anomalie.

A la quatrième tentative…

La Vuelta en 2012 puis le Giro en 2013 avaient permis au public de découvrir Bouhanni. Originaire de la boxe, le natif d’Epinal semblait fait pour briller dans les sprints. N’ayant absolument pas peur de frotter ou de se débrouiller seul, il a su faire sa place dans les finals d’étapes depuis quelques saisons. De plus en plus respecté et surtout redouté, il a accumulé les places d’honneur. Jusqu’aux podiums, qu’il a connu sur les routes espagnoles comme transalpines. Deuxième à Sanxenxo sur la Vuelta 2012, derrière Degenkolb, il avait aussi échoué tout près du but il y a un an sur la course rose, seulement battu par le maître Cavendish à Trevise. Et si le dernier Tour de France a été un échec cuisant pour lui, il ne s’est pas résigné, et misait gros sur ce 97e Tour d’Italie. Accompagné par une équipe FDJ.fr présente presque uniquement pour son sprinteur, il a joué placé lors des étapes irlandaises, deuxième à Belfast derrière le nouveau patron du sprint, Marcel Kittel, puis cinquième à Dublin.

Avant de sortir de sa boîte ce mardi, au moment du retour de l’épreuve sur les routes italiennes. Celles qu’il préfère, clairement. Le Giro mais aussi Milan-Sanremo, Bouhanni adore. Comme un amoureux des courses de la Botte, il était presque écrit que sa première victoire sur une épreuve de trois semaines devait arriver sur le Tour d’Italie. Toujours difficile par ses conditions météorologiques et pouvant toujours compter sur un plateau conséquent pour les sprints – souvent en dessous de la Grande Boucle, mais clairement supérieur à la Vuelta -, le Tour d’Italie semblait être le terrain de jeu idéal pour le Lorrain. Ca n’a pas manqué ! Et comme par hasard, l’ancien champion de France a été sacré au terme d’une journée très particulière, où l’abandon de Kittel a marqué le début de course, avant que la pluie diluvienne ne vienne perturber le final avec de nombreuses chutes. De quoi sublimer la victoire de Nacer Bouhanni.

… et avec les trippes !

En effet, le sprinteur allemand, double vainqueur en Irlande ce week-end, a été contraint à l’abandon peu après le départ. Il est clair que cela fait un peu de place à Bouhanni, et que cela aurait même pu dévaloriser sa victoire. Mais que nenni, compte tenu de la journée qu’ont vécu les coureurs du Giro ce mardi. Car il fallait déjà être très costaud pour être de la partie dans les derniers kilomètres. En plus de l’abandon de Kittel, il y avait effectivement eu de très nombreuses chutes, la faute aux conditions extrêmes « made in Giro. » Et Bouhanni, lui aussi, est passé pas loin de l’échec. Victime d’une crevaison à dix bornes de Bari, il a dû produire un gros effort pour recoller. Avant d’éviter de justesse de goûter au bitume lorsqu’un concurrent est tombé juste devant lui à 2000 mètres de la ligne. Presque un miracle, que l’on peut interpréter différemment après la victoire. Tout simplement, le Français a persévéré, a continué de croire en ses chances, et a assis son statut.

Désormais maillot rouge et vainqueur d’étape, il fait figure de nouveau favori pour les sprints à venir. Luka Mezgec, Elia Viviani, Giacomo Nizzolo ou Roberto Ferrari seront des concurrents sérieux, mais ils n’ont rien à voir avec l’ogre Kittel qui semblait presque imbattable à la régulière, en témoigne sa remontée fantastique à Dublin, dimanche. Ce qu’il décrivait comme « une grosse satisfaction » à l’arrivée pourrait donc être même un peu plus pour Bouhanni. La voie dégagée, les victoires pourraient s’accumuler, et lui apporter la confiance – si importante pour les sprinteurs – qui lui manque parfois. Car il a forcément franchi un cap. Présent dans tous les sprints depuis le départ irlandais, il brille par sa régularité, et a enfin décroché cette victoire qu’il attendait tant. Il n’y a plus qu’à confirmer dans les dix jours qui vont suivre, avant que la haute montagne ne pointe le bout de son nez…

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