BOUHANNI
Malgré des résultats honorables, Nacer Bouhanni ne semble plus le même qu’il y a quelques mois – Photo Facebook FDJ

Au cours de ces derniers mois, Nacer Bouhanni a curieusement pris l’habitude de faire parler de lui un peu plus pour ses accrocs aux micros et sur les réseaux sociaux qu’en levant les bras. Il souffle le chaud et le froid et ne s’est pas vraiment rassuré sur un Dauphiné qui ne lui correspondait toutefois pas vraiment. Mais après un bon début de saison, l’euphorie semble retombée depuis un Giro éprouvant. Doit-il s’inquiéter ou tout ne serait-ce qu’exagération ?

Une mauvaise réputation…

Tout avait pourtant très bien commencé pour le dernier Champion de France. Auteur d’une bonne campagne orientale ponctuée par une victoire lors de la dernière joute offerte par le sultanat d’Oman, son début de saison était très prometteur. Confirmant à Paris-Nice en s’imposant avec brio à Nemours et en portant le maillot jaune, il s’est en tout et pour tout octroyé quatre bouquets pendant les mois précédants le Giro, son grand objectif de l’année. Sauf que la machine Bouhanni s’est stoppée sur les routes transalpines, butant sur un Cavendish fulgurant accompagné de quelques italiens surmotivés. Incapable de trouver l’ouverture de Naples à Trévise où il obtiendra son meilleur résultat avec une deuxième place, son aventure prendra fin le jour suivant à Cherasco. Officiellement fatigué par des conditions déjà peu clémentes, on doute que sa motivation ne fut atteinte par ses échecs. Sa lutte annoncée sur les étapes escarpées avec son rival Degenkolb n’aura pas eu lieu, et pire, c’est surtout dans les barrières, aux micros de télévision et derrière son clavier que le jeune français se sera globalement fait remarquer.

Certes peu encouragé par de nombreuses chutes, il aura été rendu coupable de nombreux litiges dans des sprints houleux. C’est d’abord Bernhard Eisel qui a fustigé l’attitude du Frenchie : « Renvoyez Bouhanni à la maison avant qu’il ne tue quelqu’un ! » Celui-ci s’est contenté de répondre avec un provoquant « I love you Bernhard » à Naples. Mais ce n’est pas tout, il s’est aussi attiré les foudres des italiens Viviani et Modolo à Trévise lors d’un finish compliqué qui a vu les locaux poussés contre les barrières, face à un Cavendish de toute manière intouchable. Si l’on rajoute une altercation avec Matteo Pelucchi sur le Circuit de la Sarthe, il est évident que la réputation du sprinteur tricolore en a pris un coup. De plus, il montre un état d’esprit pour le moins inhabituel. Lui qui paraissait si détendu la saison dernière s’est brutalement mis à adopter un caractère teigneux lors de l’après course. Pestiférant envers ses équipiers ou bien un adversaire, rien ne semble aller ces derniers mois, l’enfermant dans une spirale négative. Chez Bouhanni, c’est un peu « toujours de la faute des autres », et cette attitude pourrait lui nuire.

Une nouvelle pression difficile à gérer

Cependant, tout cela pourrait s’expliquer par une seule chose : la pression. L’an dernier, Nacer Bouhanni a pris une nouvelle dimension. De Bessèges à la Vuelta en passant par les Championnats de France, il n’a cessé de se montrer, alors qu’il était plutôt inattendu en début de saison. Cette année, le duo qu’il forme avec Arnaud Démare est bien évidemment redoutable, mais surtout redouté sur toutes les épreuves, petites et grandes. Le Vosgien ne peut plus se cacher, il est même régulièrement désigné comme l’un des favoris. Une pression totalement nouvelle dont il n’a pas l’habitude, lui qui avait tendance à s’imposer à la surprise générale. Les attentes placées en lui lors du début de saison par son équipe ne sont donc sûrement pas pour rien dans ces sautes d’humeur. A seulement 22 ans, difficile d’assumer un rôle de fer de lance du cyclisme français. Mais Bouhanni doit s’y faire, car cette pression va aller en croissant. Soit il continue de progresser et on attendra encore plus de lui, soit sa cadence ralentie et nombreux seront ceux qui lui tomberont dessus. Toutefois, pour poursuivre son ascension et se rapprocher encore un peu des tout meilleurs sprinteurs mondiaux, Nacer Bouhanni va devoir quitter cette nervosité un peu trop présente. Il sera attendu dans quelques semaines sur le Tour de France, qui permettra de tirer de nouveaux enseignements.

Alexis Midol et Robin Watt


 

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