Alors qu’il n’a pourtant participé qu’à six manches des plus grandes compétitions de cyclo-cross de la saison, Zdenek Stybar s’est offert le grand favori Sven Nys au bout du suspense. Devant plus de 35 000 spectateurs, les deux meilleurs coureurs de leur génération auront offert un magnifique spectacle. Un dynamisme fou pour une course qui s’est déroulée à cent à l’heure, tandis que derrière, ce fut bien plus difficile de trouver des éclaircies…

Un mano à mano somptueux

Le duel entre les hommes forts du cyclo cross a commencé très tôt, dès le deuxième tour. Après un premier round d’observation où les deux coureurs se trouvaient en retrait, Stybar lança une première attaque sur le plat – après avoir repris un Francis Mourey débutant tambour battant -, mais est immédiatement rejoint par un Sven Nys très combatif.  Un premier écrémage qui sera le bon, puisque le deux coureurs ne se quitteront plus jusqu’à la fin. Derrière, seuls Van Den Haar et Mourey arrivent à faire illusion pendant quelques tours, mais à la mi-course, les deux cadors se retrouvent déjà seuls et la bataille peut enfin commencer. Si les multiples attaques fusent à un rythme démentiel, aucun des deux n’arrive à creuser un écart, et ce n’est qu’ à un tour et demi de l’arrivée que la course va réellement se jouer. Lorsque Stybar est soudainement victime d’une chute à l’entrée du septième tour, Nys prend quelques longueurs d’avance et semble alors intouchable… Mais comme pour maintenir le suspense jusqu’au bout, la malchance touche quelques hectomètres plus tard le champion de Belgique. Victime lui aussi d’une chute, lors d’un virage à 180° , il voit le Tchèque revenir et se refaire une santé. Le dernier tour est insoutenable, et c’est cette fois-ci Stybar, visiblement plus lucide, qui pousse définitivement à la faute Nys à deux reprises. Le Belge ne reviendra pas et Stybar lève les bras pour célébrer son troisième titre de champion du monde, véritablement le plus surprenant de sa carrière.

Ce mano à mano s’est joué sur des détails, comme souvent, malgré deux coureurs n’ayant jamais relâché la pression qui pesait sur leurs épaules. Le plus résistant l’emporte sur un circuit d’Hoogerheide n’ayant laissé aucun répit et qui ne pardonne pas, au grand malheur des Belges, déjà touchés au départ par une chute de Niels Albert. Bénéficiant des circonstances de course, Stybar a ensuite magnifiquement joué le coup lors du dernier tour, poussant réellement Sven Nys dans ses retranchements lors des moments stratégiques du parcours, là où le maître s’y attendait le moins. Un duel qui fait sensiblement penser au précédent match les opposant lors des Mondiaux de 2011, à Saint-Wendel, en Allemagne. Déjà à l’époque, le vainqueur du dernier Eneco Tour avait profité d’un ennui mécanique de son ennemi du play-pays pour s’échapper dans le final. Moins attendu encore cette année du fait de ses rares apparitions durant l’hiver, le Tchèque fait donc un joli pied de nez aux adversaires de Nys, qui n’ont pas du tout été à la hauteur de l’événement.

Van Den Haar tombe sous la pression

C’était le jeune vainqueur prodige de la Coupe du monde que le public néerlandais attendait ce dimanche, mais Lars Van der Haar a complètement craqué sous la pression, montrant un autre visage, beaucoup plus nerveux qu’à l’accoutumée. Enchaînant faute sur faute, le natif d’Amersfoort n’a à aucun moment pu rivaliser avec les deux cadors de la discipline, malgré l’apport de la masse populaire acquise à sa cause. Chutant dès le départ, le jeune hollandais a semblé perdre l’ insouciance qui avait forgée ses victoires précédentes au fur et à mesure du rendez-vous. Après avoir goûté une première fois aux labourés, le champion des Pays-Bas multiplia les erreurs de jeunesses, amplifiant sa nervosité, palpable – et c’est compréhensible. Après une énième chute lors d’un ravitaillement pourtant anodin, il persista à vouloir suivre le duo Stybar-Nys, se mettant ainsi définitivement dans le rouge. La mi-course causera sa perte définitive à la suite d’une nouvelle faute… Par la suite, ce sont les deux compatriotes belges, Vantornout et Pauwels, qui le rattrapent, le harcèlent en tant que chiens de garde de Nys, puis le lâchent irrémédiablement, avant que Tom Meeusen lui porte le coup de grâce au moral. Au final, VDH fini à une sixième place décevante compte tenu de ses qualités montrées durant un hiver prolifique.

Plus globalement, ce dimanche noir aura donc été un récital de tout ce qu’il ne fallait pas faire pour briller lors d’un championnat du monde. Il ne fait aucun doute que le coureur de la Rabobank se souviendra longtemps de cet échec à domicile, même si il ne peut qu’être formateur pour le futur. Albert et Walsleben transparents, Mourey trop court, l’opposition était discrète en ce début de mois de février. Vainqueur en 2009 sur ce même parcours, le coureur de BKCP-Powerplus a malheureusement été complètement hors du coup ce dimanche, cinq ans plus tard. Après un premier tour  de circuit catastrophique, l’ancien champion du monde n’a pas su redresser la barre et fini à une piteuse vingtième place pour un cyclocross-man de son standing. Digne de son irrégularité constante. Quant à l’Allemand Walsleben, ce ne fût guère mieux. Outre sa maigre accélération au début du troisième tour pour recoller au groupe Mourey, il fût complètement absent et fini à une décevante onzième place.

Au final, le podium du général de la dernière Coupe du Monde aura clairement été en deçà des attentes qui leur étaient fixées, confirmant le renouvellement encore très progressif de la discipline ; s’internationalisant de plus en plus, mais réunissant toujours, à peu de choses près, les mêmes protagonistes dans les moments clés. Même Francis Mourey, survolté après sa victoire à Namur et le show réalisé à domicile à Nommay, n’a pas tenu le choc très longtemps. Il repart d’Hoogerheide avec une huitième place dans sa besace, mais pouvait-il vraiment faire mieux ? Obnubilé par un titre de champion du monde, sa fougue en a décidé autrement, puisqu’il s’est vraisemblablement épuisé inutilement lors des premiers tours, avant de dégringoler dans la hiérarchie. En prenant le risque de vouloir suivre le tempo fou des insatiables Stybar et Nys, il aura tout perdu. A n’en pas douter, il aurait mérité mieux, mais pourra toujours se consoler en se disant qu’il n’est pas le seul dans ce cas de figure. Finalement, le scénario était bien plus limpide qu’on ne l’imaginait.

Classement final

1Zdenek StybarRépublique Tchèque
2Sven NysBelgique+ 12 ″
3Kevin PauwelsBelgique+ 40 ″
4Klaas VantornoutBelgique+ 58 ″
5Tom MeeusenBelgique+ 1’07 ″
6Lars Van Der HaarPays-Bas+ 1’21 ″
7Rob PeetersBelgique+ 1’42 ″
8Francis MoureyFrance+ 1’52 ″
9Radomir Simunek
République Tchèque+ 2’03 ″
10Wietse Bosmans
Belgique+ 2’10 ″
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