Dimanche s’élancera la dernière épreuve des Championnats du Monde. La course en ligne des hommes. La plus attendue, et celle qui sera la plus suivie. A quelques jours du départ, notre chroniqueur Gianni Savio se livre au jeu des pronostics. Sans se mouiller de trop, il juge des chances de chacun. Avec, forcément, un petit faible pour l’Italie…
Des Mondiaux parmi les plus difficiles de l’histoire
Le parcours de Florence est l’un des plus difficiles de l’histoire, notamment grâce à son incroyable dénivelé. Il n’y a pas de comparaison possible avec l’édition de Sallanches en 1980, où Bernard Hinault avait gagné, mais je pense que de tous les autres Championnats du Monde, c’est le plus dur. C’est justement pour ça que la météo jouera un rôle très important dimanche. Je ne connais pas les prévisions pour la course, mais s’il pleut, ce sera compliqué pour tout le monde, et surtout pour les équipiers, qui pourraient abandonner plus vite que prévu. Mais s’il fait beau, un plus grand nombre de coureurs pourront rêver de remporter le titre mondial, même si vu le parcours, il y aura dans tous les cas une forte sélection.
Ce parcours d’ailleurs, n’est pas vraiment pour les grimpeurs selon moi. Il s’adressera plus aux hommes de classiques, surtout si la course n’est pas trop difficile lors des premiers tours. Même si tout dépendra de la physionomie de la course, car si ça se durcit, les forts dénivelés feront de nombreux dégâts. Mais le gros point faible des grimpeurs, ce sera les changements de rythme. Et dans ce domaine, des coureurs comme Gilbert ou Cancellara auront l’avantage. Mais je le répète, tout dépendra de la physionomie de la course et des conditions météos.
Les Italiens voudront briller à domicile
C’est toujours difficile de parler des favoris pour les Mondiaux. Pour l’équipe d’Italie, qui jouera à domicile, le leader désigné est Vincenzo Nibali, mais je pense qu’il n’est pas le seul à pouvoir briller sur ce parcours. Des coureurs qui se sont montrés dernièrement, comme Michele Scarponi, seront aussi présents. Courant à domicile, la formation italienne sera portée par ses supporters, comme dans un stade de football. On ne peut pas faire de comparaison avec Varèse, où l’Italie avait particulièrement brillé, car le parcours de Florence est plus dur que lors du triomphe de Ballan, et le déroulement de la course avait été particulier.
Les favoris avaient calqué leur course sur Bettini, permettant à Rebellin, Cunego et Ballan de s’échapper. Je ne pense pas non plus que Nibali soit le grand favori du Mondial comme l’avait été Bettini. Au contraire, il y a beaucoup de prétendants, même si une sélection naturelle réduira considérablement le nombre de coureurs pouvant remporter la course. À mon avis, l’Italie doit opter pour une course d’attaque, parce qu’elle a des coureurs de fond comme Nibali et Scarponi, à qui il faudra vraiment faire attention. Et encore plus en cas de mauvais temps, car ils font partie de ceux qui aiment bien les conditions difficiles.
Cancellara avec les grimpeurs ?
Cancellara, même s’il n’est pas un grimpeur, fera aussi partie des favoris. C’est un coureur très costaud, très puissant et il l’a encore montré sur le Tour des Flandres cette saison. En plus de ses qualités naturelles, il est sûrement le coureur qui s’est le mieux préparé pour ces Mondiaux. Il a participé à la Vuelta, avec du rythme et du fond, sans oublier qu’il a eu la possibilité d’abandonner avant la fin de l’épreuve, contrairement à Nibali, Valverde ou Rodriguez. Il faudra cependant faire très attention aux Espagnols, qui sortent de la Vuelta. Le parcours leur est favorable et ils ont une équipe très intéressante.
Pour les Colombiens, je mets un gros point d’interrogation. Ils ont beaucoup de coureurs qui peuvent être considérés comme des favoris, à l’instar de Nairo Quintana, Rigoberto Uran, Sergio Henao ou encore Carlos Betancur, sans oublier qu’ils seront accompagnés par un coureur que je connais bien – et qui est en grande forme -, Miguel Ángel Rubiano. Mais la question, ce sera de savoir qui se sacrifiera. Contrairement à l’Italie où Nibali aura l’équipe à sa disposition, la Colombie a plusieurs leaders mais la hiérarchie n’est pas encore établie.
Gilbert, peut-être ; Sagan, non
Philippe Gilbert n’a remporté qu’une course cette saison avec son maillot arc-en-ciel, mais je pense qu’il s’est très bien entraîné pour la fin de saison. Alors si la course n’est pas trop difficile, il pourrait tenir et s’imposer. Dans un sprint final à cinq ou six coureurs par exemple. Pour Sagan, je trouve le parcours trop dur pour lui, mais encore une fois, tout dépendra du déroulement de l’épreuve, la règle ne dérogera pas pour Sagan et Gilbert. Il y aura aussi quelques outsiders à surveiller, comme Breschel, Van Avermaet ou Gesink, qui ont été présents sur les classiques canadiennes, et qui sans être des favoris, tenteront leur chance.
Enfin, il faudra compter sur les deux francophones, Thibaut Pinot et Nicolas Roche, qui sont de potentiels outsiders. S’ils sont dans une grande journée, ils pourront devenir une alternative aux favoris. Les deux coureurs sortent d’une bonne Vuelta, et possèdent une bonne condition. Mais même avec toutes ces prévisions, on ne peut encore rien affirmer à l’heure actuelle, même quelques jours avant le départ. Et c’est ça, aussi, qui est fascinant dans le cyclisme et particulièrement sur les Championnats du Monde. Ce ne sera d’ailleurs peut-être pas le plus méritant qui gagnera, mais celui qui aura été le meilleur le jour J. Si les Mondiaux se déroulaient en plusieurs étapes, cela perdrait toute sa saveur et son côté indécis.