Les négociations ont été longues, mais voilà qu’une étape a été franchie. Samuel Sanchez a rompu son contrat avec la formation Euskaltel, qui courait jusqu’à la fin de l’année prochaine. Le voici donc libre de s’engager où il le souhaite ; mais les offres ne se bousculent pas. Fortement pressenti chez Colombia ou Tinkoff, à chaque fois, le transfert ne s’est pas fait, et aujourd’hui, l’un des meilleurs coureurs de ces dernières années se retrouve sur le carreau. Libre, alors qu’il voudrait tellement poursuivre sa carrière…
Des rumeurs et un contrat rompu
L’année a été difficile pour l’Asturien de naissance, adopté par les Basques. « Emotionnellement, c’était les montagnes russes, a-t-il confié à Cyclingnews dans un long entretien. Depuis le Giro, c’était un coup une bonne nouvelle, puis juste après une mauvaise. Il n’y a eu aucun moment de répit. » Alors il a fallu faire avec, courir sans savoir de quoi sera fait l’avenir. Du haut de ses 35 ans, Sanchez est allé décrocher la plus belle victoire de son équipe en 2013, sur le Dauphiné. Mais la seule pour un homme qui il y a quelques années encore, faisait partie du gratin mondial. Malgré ses nombreuses années passées chez les professionnelles, Sanchez veut donc continuer sa carrière, et remonter la pente. « Avec Euskaltel, nous sommes parvenus à un accord pour mettre fin à mon contrat, et maintenant, je dois passer à autre chose, chercher une équipe avec si possible un calendrier qui me conviendrait », déclarait-il juste avant le réveillon de Noël, confiant ainsi qu’un « nouveau contrat serait le cadeau idéal. » Mais désormais, c’est le nouvel an qui approche, et rien n’a avancé. Heureusement, libéré de son contrat, le natif d’Oviedo pourra signer quelque part même après le 31 décembre, date de la fin du marché des transferts. Mais pourquoi les équipes se bousculeraient-elles au portillon après n’avoir rien tenté pendant des mois ?
Car en effet, depuis que l’arrêt de l’équipe ibérique a été officialisé, de nombreux coureurs ont trouvé un point de chute, mais pour Sanchez, il n’y a eu que des rumeurs. Omega-Pharma Quick-Step ou Wanty ont un temps été évoqué comme destinations possibles. Puis, avec un peu plus d’insistance, l’hypothèse Colombia est arrivée sur la table. Une équipe où il aurait été facile de voir Sanchez évoluer, entouré de grimpeurs et apportant toute son expérience. Sauf que cela ne s’est pas fait, et qu’aujourd’hui, cela semble être du passé alors même qu’il y a un mois, le porte-parole de l’équipe sud-américaine affirmait que c’était en bonne voie, et que seul son contrat avec Euskaltel posait problème. On a ensuite parlé de SkyDive, une équipe basée à Dubaï et qui semblait vouloir offrir à l’ancien champion olympique un gros contrat. Le challenge sportif étant trop peu intéressant, encore une fois, cela n’a pas abouti. Est alors survenue la piste la plus sérieuse, celle de Tinkoff-Saxo. Le principal intéressé avait multiplié les appels du pied, assurant qu’il aimerait beaucoup être au service d’un leader comme Alberto Contador. Mais les négociations ont capoté. Ces derniers jours, la faute a été mise sur Oleg Tinkov, qui n’aurait en fait jamais voulu de Sanchez dans son effectif. Mais l’homme d’affaire russe s’est dédouané, réaffirmant qu’au sein de la structure danoise, l’aspect sportif était le domaine de Bjarne Riis. A l’heure où chacun se renvoie la balle, le quintuple vainqueur d’étape sur le Tour d’Espagne demeure donc dans l’inconnue la plus totale.
Rester en forme et espérer
Les solutions ne sont donc pas très nombreuses pour Samuel Sanchez. Pour l’instant, il continue de s’entraîner, en espérant que la bonne nouvelle tombe à un moment. « J’ai repris l’entrainement de façon à ce que si une équipe vient vers moi, je sois en bonne forme. » De retour en Espagne pour les fêtes de fin d’année, Samu vit la période la plus difficile de sa carrière pour une simple histoire de contrat, alors que jamais on aurait pensé qu’il puisse se retrouver dans pareille situation. Un moment fut alors évoquée l’hypothèse d’un retour chez les amateurs, le temps d’une année, pour prospecter de nouveau en vue de 2015. Fernando Alonso et son ambitieux projet aurait alors pu recruter l’Espagnol, mais Sanchez a coupé court, et c’est une solution à rayer de la liste. Finalement, il ne reste donc plus grand chose de concret pour un garçon qui a terminé trois fois sur le podium d’un grand tour, et encore huitième de la Vuelta l’été dernier. Après avoir débuté chez Euskaltel en 2000, Sanchez pourrait donc ne connaître aucune autre équipe. Une grande preuve de fidélité, mais clairement pas la fin espérée par SSG. Car s’il a souvent tenu tête aux Valverde et autres Contador, il est l’un des rares grands coureurs ibériques à ne jamais avoir remporté le Tour d’Espagne, terminant deuxième en 2009, mais jamais mieux. Peut-être paie-t-il aujourd’hui un palmarès et une réputation en-deçà de ce qu’il aurait pu espérer compte tenu de son talent.
Qu’importe, celui qui fêtera ses 36 ans en février prochain ne perd pas espoir, et a même des objectifs plein la tête. « Quand vous êtes cycliste, vous pensez toujours aux prochains objectif que vous pouvez vous fixer. Pour ma part, je voudrais encore gagner un grand tour et la course en ligne des Mondiaux. Je sais que ce sera dur, mais bon, le rêve est gratuit ! » On ne peut pas lui donner tort, et on retrouve cet état d’esprit quand il décrit ses entrainements. « C’est assez étranger de rouler sans aucun sponsor sur votre maillot ou sur votre vélo pour la première fois de votre carrière, et de ne pas savoir où vous courrez l’année suivante. » Preuve que Sanchez est encore loin d’imaginer un arrêt définitif, persuadé qu’une équipe finira par venir à lui. D’ailleurs, il ne s’est pas fixé de date limite pour prendre sa retraite, au cas où personne ne le solliciterait. Peut-être un peu naïf, ou alors refusant de voir en face une réalité qui se rapproche de plus en plus, l’Espagnol vit comme s’il serait encore professionnel en 2014, alors qu’il n’en a aucune certitude. Pas plus que nous. Pourtant, on espère autant que lui qu’il trouvera quelqu’un pour lui donner un maillot et un salaire, histoire qu’on puisse le voir dans le peloton, au moins une saison encore. « La dernière chose que je veux, c’est me retirer comme ça, parce que je n’ai pas le choix », confie-t-il. Et de conclure, dans un élan de lucidité : « Mon plus grand rêve désormais, c’est d’aller sur des courses. » Nous aussi.