Dans les tuyaux depuis quelques semaines, bientôt officiel, Peter Sagan ne courra plus l’an prochain pour Cannondale – dont on annonce une fusion imminente avec l’équipe Garmin. Mais où atterrira le Slovaque, l’un des meilleurs, voir le meilleur sprinteur-puncheur au monde, ou plus simplement le coureur le plus complet du peloton ? En tout cas une chose est sûre, la lutte sera acharnée pour recruter «Tourminator», et cela pourrait bien devenir le feuilleton de l’été.
Le problème salarial
Evidemment, Peter Sagan est donc très courtisé, mais équipes seulement se détachent du lot. Parmi elles, la nouvelle équipe de Fernando Alonso, qui tarde malgré tout à se créer et qui pourrait être sortie de la course à la signature du natif de Zilina. Car en effet, depuis quelques jours, c’est de l’équipe Astana qu’on parle avec le plus d’insistance. La formation d’Alexandre Vinokourov multiplie les pistes folles pour se renforcer, Lars Boom, Luis Leon Sanchez et quelques équipiers italiens ayant déjà signés ces derniers jours. Mais pour Sagan, il pourrait y avoir un problème : le salaire du coureur de 24 ans, qui réclamerait trois millions d’euros annuels. Un salaire exorbitant qui pourrait effrayer l’équipe kazakhe déjà pléthorique, qui doit déjà assurer par exemple le salaire de quatre millions d’euros de Vincenzo Nibali… Pour le triple maillot vert du Tour, il y aurait donc une dernière piste : l’équipe d’Oleg Tinkov, qui n’aurait aucun mal à combler les émoluments de Sagan. Sur son compte Twitter, le patron de l’équipe Tinkoff-Saxo s’est même laissé emporter dans un bain de folie, avec un : « 1000 retweets et j’achète Sagan », avant de déboucher virtuellement un magnum de vodka… La démesure habituelle du magnat russe, en somme.
Des résultats en dents de scie
Toutefois, il y a un hic dans le cas Sagan : les résultats. Cette année, en tout cas. D’accord il a ramené pour la troisième fois de suite le maillot vert du Tour de France sur les Champs-Elysées, mais il n’a pas remporté une seule étape sur ce Tour où quelques étapes auraient pu lui convenir. Quatre fois deuxième, et même battu par l’inattendu Matteo Trentin à Nancy, la déception a de quoi être conséquence pour un coureur qui avait pourtant toute une équipe à son service. A sa décharge, il faut dire aussi que sa pancarte était énorme, personne ne le laissant œuvrer comme il le souhaitait. Mais cette panne de résultats avait débuté bien avant la Grande Boucle : sept victoires à l’heure actuelle – en comptant son titre de champion de Slovaquie – contre treize il y a un an à la même époque. Certains diront que c’est déjà pas mal mais pour un coureur de ce calibre, c’est en fait bien peu. Sa forme était peut-être changeante, mais à chaque fois qu’il a pu s’octroyer un grand succès, il a semblé passer à côté. Il lui reste donc la Vuelta pour se racheter un peu, mais une razzia serait de toute façon à relativiser compte tenu de la concurrence. Puis il sera temps de changer d’air, chose rare pour le Slovaque qui n’a connu qu’une équipe continentale dans son pays, puis la Liquigas-Cannondale…
Le besoin d’une équipe autour de lui
Il paraît évident qu’un coureur du calibre de Sagan sera un leader incontestable dans sa nouvelle équipe. Mais qui pourra l’entourer dans les sprints massifs s’il signe chez Tinkoff ou chez Astana ? Dans l’équipe russe, on peut compter seulement trois sprinteurs, à savoir l’expérimenté Daniele Bennati, le polyvalent Matti Breschel et le jeune Michael Valgren Andersen. Les deux premiers ne sont toutefois plus très frais, alors que Valgren, qui apparaît comme l’une des pépites en devenir, n’a pas encore la caisse suffisante pour emmener un Peter Sagan dans de meilleures dispositions par rapport à ses expériences au sein de la Cannondale. En ce qui concerne les étapes vallonnées et les grandes classiques, il y a par contre assez de coureurs capable de remplir le job de capitaine de route, à l’image de Michael Rogers, pour essayer d’épauler le triple maillot vert de la Grande Boucle à ne pas se retrouver seul au plus mauvais moment, contre tous. Si «Rambo» veut se consacrer aux classiques du Nord avant tout, ce ne sera pas vraiment le geand luxe dans l’équipe de Bjarne Riis, un point commun aux caractéristiques d’Astana, qui mise sur les courses àétapes. Hormis Breschel et le quarantenaire Tosatto chez Tinkoff et l’énigmatique Maxim Ingliskiy chez Astana, c’est presque le néant ! De quoi se demander s’il ne serait pas mieux entouré actuellement. Sagan veut changer d’équipe afin de franchir un dernier cap, celui qui lui permettra de passer dans la cour des très grands ! Mais comme on le voit bien, le fameux transfert impliquera une spécialisation peut-être plus approfondie dans une de ses nombreuses spécialités. Le choix s’annonce difficile, et surtout décisif pour la suite de sa carrière.
Antoine Ledez