Après l’étape de ce dimanche arrivant à Valdepeñas de Jean, Daniel Moreno porte le maillot rouge. La récompense d’une semaine qui a vu le Madrilène remporter deux étapes avec une facilité déconcertante qui en aurait fait le leader incontestable dans bon nombre d’équipes. Mais pas chez Katusha, où ce rôle va à Joaquim Rodriguez. Du moins jusqu’à maintenant…

Un véritable clone

Le mot pourrait paraître péjoratif, car bien évidemment, Daniel Moreno n’est pas Joaquim Rodriguez. Mais sur un vélo, difficile de distinguer les deux. Le lieutenant de Purito possède exactement les mêmes qualités : une incroyable explosivité, un amour certain pour les côtes courtes et raides, ainsi qu’une capacité à suivre en haute montagne. Les qualités pour remporter un grand tour, et particulièrement la Vuelta, qui fait chaque année la part belle aux puncheurs comme l’Espagnol. Longtemps équipier de Valverde chez Caisse d’Epargne – au même titre que Rodriguez -, l’Ibère avait décidé de tenter sa chance chez Lotto en 2010. Avant de retrouver son ami Purito justement, chez Katusha, dès l’année suivante. Pour se mettre à son service, du moins dans un premier temps. Car au fil des courses, l’homme se révèle et démontre une capacité à suppléer avec brio son leader.

Quelques fois par an, le garçon d’aujourd’hui 31 ans change donc de statut. Comme sur ce Dauphiné en 2012, où Rodriguez n’est pas aligné. Moreno va alors chercher deux étapes. Mais aussi sur sa Vuelta bien aimée, évidemment. Où son leader lui laisse aller glaner une étape en 2011, mais aussi garder sur quelques journées son énergie pour jouer le général final en 2012. Résultat, une cinquième place finale avec un statut de lieutenant de luxe qui laisse plein d’espoirs. Le garçon a trois ans de moi que son coéquipier Joaquim Rodriguez, de quoi assurer la relève, au moins pour un temps. Katusha s’en rend compte, et le Catalan lui-même souhaite laisser à son ami la chance de s’épanouir. Sur la Flèche wallonne, où il ne se sent pas bien, le tenant du titre laisse donc carte blanche à Moreno, qui s’en va gagner sa première classique. Idem en juin dernier sur le Dauphiné, où l’homme de 34 ans n’est pas au mieux. Dani joue alors sa chance à fond et termine 3e du général, derrière les intouchables Froome et Porte. Presque prodigieux…

Capable de s’imposer ?

Gagner la Vuelta reste une question qu’il est presque incongru de se poser aujourd’hui, au sujet de qui que ce soit. Personne parmi les gros favoris n’a encore perdu, donc rien n’est fait. Mais Moreno pourrait s’imposer au sein de sa formation, ce qui sera déjà une grande victoire. Même si cela n’a jamais été l’objectif affirmé du Madrilène, les circonstances pourraient amener son staff à y songer sérieusement. Lui qui avait la voie totalement libre en cette première semaine sur des arrivées pas censées faire la différence parmi les cadors, en a profité comme personne. Deux étapes sont venues s’ajouter à un palmarès de plus en plus prestigieux. Et avec la manière, comme l’Espagnol en a l’habitude. Alors si à Fisterra il a dominé des seconds couteaux, il a devancé ce dimanche au sommet du mur de Valdepeñas de Jean de sacrés pointures. Son coéquipier Rodriguez, accompagné de son compatriote Valverde, ont concédé quatre secondes, tous les autres un peu plus. Le tout en seulement 700 mètres.

Désormais maillot rouge, Dani Moreno peut donc légitimement penser au leadership. Mais Rodriguez n’est qu’à 56 secondes. Si c’est un handicap non négligeable, il est en fait bien plus proche de ses rivaux annoncés Nibali et Valverde, eux-mêmes à plus de 20 secondes du leader de l’épreuve. Et quand on connaît l’amitié qui lie les deux hommes, il apparaît évident que Moreno ne fera rien sans l’aval de Purito. Le leader reste le Catalan et toute l’équipe Katusha est là pour le servir. Si l’homme qui fêtera ses 32 ans dans quelques jours – le 5 septembre prochain – devient leader, c’est donc que Rodriguez lui aura confié le rôle. Et on peut compter sur le troisième du dernier Tour de France pour laisser la chance à son ami s’il ne se sent pas au top. Même si le garçon, toujours en quête d’un grand tour, était venu pour gagner, il pourrait revoir ses plans. Ou alors demander à son habituel lieutenant de faire sa course sans se soucier de lui. Ainsi, le meilleur gagnerait. Une solution morale, mais qui risquerait de faire perdre les deux. Sacré dilemme pour Purito… Mais une chose est sûre, la victoire finale est plus qu’envisageable pour les deux larrons de la formation russe. Reste à bien gérer les deux prochaines semaines de course.

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