Une anomalie dans son passeport qui date d’il y a plus de deux ans, et voici Roman Kreuziger suspendu provisoirement par l’UCI, privé de Vuelta après avoir déjà fait une croix sur le Tour de France. Un coup dur pour l’équipe Tinkoff, mais surtout, une nouvelle preuve que tout ne fonctionne pas parfaitement – et surtout pas très vite – chez les grandes instances de ce monde.

Plus de deux ans d’attente…

Les données sanguines du Tchèque ont variées entre fin 2011 et mai 2012, soit lors de ses années Astana. Il y a une éternité ! Quand certaines sanctions tombent quelques semaines seulement après les contrôles ou les anomalies décelées dans les passeports biologiques, l’ancien meilleur jeune du Tour d’Italie a attendu plus d’un an pour être informé de ces irrégularités – une simple lettre d’avertissement à laquelle il avait répondu avec l’avis de plusieurs experts -, et plus de deux ans pour avoir une réponse définitive de la part de l’UCI. Et la sanction est sans appel : en attendant la suite de l’enquête, Roman Kreuziger a été provisoirement suspendu, ce qui aurait pour conséquence de lui faire louper la Vuelta. Une affaire qui ressort au plus mauvais moment, quand l’équipe Tinkoff-Saxo annonce que son grand leader, Alberto Contador, est certain de ne pas pouvoir disputer son Tour national. Preuve d’incompétence de la part de l’UCI et des autres instances antidopage ? Pas forcément, car au moins, elles ont pris le temps d’examiner le dossier, c’est sûr. Mais le délais a de quoi mettre mal à l’aise : en rendant son verdict immédiatement après les faits, et si sanction il y avait eu (deux ans si l’on se réfère aux sanctions habituelles pour des anomalies sur un passeport biologique), le Tchèque l’aurait déjà purgée en intégralité, et serait libre de courir à nouveau.

…et une défense crédible

Assez logiquement – même si l’on ne souhaite absolument pas défendre un possible tricheur -, Kreuziger a donc fait appel de cette décision devant le TAS dans le but de pouvoir disputer la Vuelta. Et jusqu’à maintenant, ses arguments pour se défendre sont d’une crédibilité rare. Pour ce qui est des irrégularités, le natif de Moravska avance une forte déshydratation suite à une étape du Giro 2012 où il avait connu une défaillance. Pourquoi pas ? Evidemment, tout n’est pas parfait dans la défense du Tchèque, qui avance que « les données du profil sanguin n’ont jamais dépassé les valeurs limites fixées par l’UCI elle-même », alors qu’il s’agit justement du principe du passeport biologique, qui ne fixe plus seulement un seuil, mais qui vise un suivi sur le long terme. Cependant, le vainqueur de l’Amstel Gold Race 2013 et ses représentants assurent également que sa suspension est injustifiée. « Une telle sanction ne peut être imposée que dans le cas d’un échantillon A positif, ce qui n’est pas le cas, ou lorsqu’il y a un risque que les résultats d’une course soient imposés par le dopage présumé du coureur. » Mais comme l’avancent les avocats de Kreuziger, et sur ce point on ne peut qu’être d’accord, difficile d’imaginer que les irrégularités d’il y a deux ans influent sur les résultats d’aujourd’hui et d’une possible Vuelta.

Une bataille qui s’annonce longue

A court terme, Kreuziger pourrait donc obtenir gain de cause et être au départ du Tour d’Espagne le 23 août prochain. Mais l’enquête va continuer, quoi qu’en dise le principal intéressé (« Je ne suis pas un tricheur, je n’ai commis aucune infraction antidopage. Des experts confirment qu’il n’y a aucune preuve de violations supposées dans mon dossier. Cela dure depuis juin 2013 et il n’y a toujours aucun dossier formellement ouvert à mon encontre. Pourtant, je suis suspendu provisoirement. J’espère sincèrement que cette situation pourra être résolue rapidement et ne deviendra pas un problème politique. »), et si le dopage est avéré, la sanction pourrait alors être plus lourde que prévue. Malgré tout, on peut imaginer que si l’affaire a été si longue à se dessiner et à être révélée, c’est parce que les tests ne sont pas formels. Peut-être que l’explication de la déshydratation est plausible, et que l’UCI fait erreur en voulant suspendre provisoirement Kreuziger. De quoi nous tenir en haleine quelques semaines, voire quelques mois, car les instances ne lâcheront pas un potentiel tricheur. En espérant avant tout que la vérité éclate, car c’est finalement tout ce qui importe.

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