Cette semaine, le pistard Kirill Sveshnikov a été suspendu par la fédération russe de cyclisme. La raison, un contrôle positif a une substance illicite. C’est le huitième coureur russe sanctionné en moins de douze mois, un record peu glorieux. Ces problèmes de dopage posent évidemment des questions et la réputation du cyclisme russe est tombée au plus bas.

Rusvelo et Katusha en tête de fil

Une des raisons de cette mauvaise image est la réputation médiocre des formations russes au sein du peloton et du public. « Nous sommes une équipe jeune et nous voulons nous développer en suivant les principes d’un cyclisme propre et d’une tolérance zéro pour le dopage. » Cette déclaration du manager de Rusvelo, Renat Khamidulin, sonne creux face au résultat chiffré. La formation Pro-Continentale a passé une saison 2013 calamiteuse en matière de lutte antidopage. En l’espace d’une saison, pas moins de quatre coureurs de l’équipe russe ont été suspendu en raison de présence de substances interdite dans leur urine. Le coup de massue a été la suspension successive d’Artem Ovechkin, Roman Maikin et Andrey Solomennikov, qui a couté une condamnation à 8 jours d’arrêt par le MPCC. Mais ces différents contrôles sont encore plus inquiétants qu’on pourrait le penser. Tout d’abord, ces affaires touchent des coureurs relativement jeunes. Le cycliste le plus âgé du lot a 27 ans, cela concerne donc bien la génération actuelle et non les anciens souvent pointés du doigt. Ensuite, par les produits utilisés. Valery Kaykov est tombé à cause du sulfone GW501516. Cette substance interdite est une des priorités des agences antidopage, au même titre que l’Aicar.

L’équipe Katusha, faisant aussi partie du MPCC, a également une relation ambiguë avec le dopage. Depuis sa création, la formation traîne une mauvaise réputation. Tout a commencé avec les suspensions d’Antonio Colom et Christian Pfannberger en 2009. Les années suivantes, d’autres coureurs se sont retrouvés dans le collimateur des agences antidopage, et cette fois-ci, il s’agissant de locaux. C’est d’abord Alexandr Kolobnev, deuxième de la Doyenne en 2010, qui fût inquiété par les instances mondiales, contrôlé positif à l’hydrochlorothiazide durant le Tour 2011. Grâce à la clémence de la fédération russe, il s’en est sorti avec une simple amende. 12 mois plus tard, c’est le grand espoir Denis Galimzyanov qui est suspendu deux années à cause d’un contrôle positif à l’EPO. Résultat, quand l’hiver arrive, un coup de massue s’abat sur la tête des Russes. À la surprise générale, l’Union cycliste internationale refuse d’accorder la licence World Tour à l’équipe russe, en raison d’un manque d’éthique en matière de lutte antidopage. La décision fut cassée par le TAS par la suite, mais elle reste dans les mémoires et fait planer le doute autour du groupe. En ajoutant à cela, les suspensions récentes de Serebryakov, Novitov et maintenant Sveshnikov, l’image du cyclisme soviet n’en sort pas grandi.

Menchov, la star au long dossier

Denis Menchov a été pendant de nombreuses années l’étoile qui brillait au sommet du cyclisme russe. Vainqueur de la Vuelta 2007, du Giro 2009 et à deux reprises sur le podium de la Grande Boucle, le grimpeur a atteint les sommets de son sport. Mais pendant toutes ces années, l’ancien coureur de la Rabobank a été traîné dans de multiples affaires qui ont terni son image et celle de sa fédération. En premier lieu, il fût convoqué pour témoigner lors de l’affaire Humanplasma, survenue après les aveux de Bernhard Kohl. Avant la fameuse affaire de la liste secrète de l’UCI, rendue public par le journal l’Équipe. Cette liste énumère de 0 à 10 le degré de suspicion envers un coureur. Menchi arrive en tête de cette liste, avec une note de 9. En 2013, les accusations s’accélèrent. Après avoir été accusé de verser de l’argent au sulfureux Docteur Ferrari, c’est son ancien coéquipier Rasmussen qui le charge. Le Danois affirme lors d’une interview qu’il a vu son ancien leader se doper. Les semaines passent et les attaque envers Denis Menchov s’accentuent. Fin mai, il prend sa retraite dans l’incompréhension la plus totale. Le Secret Pro, coureur anonyme tenant une chronique sur le site australien Cycling Tips, lâche des affirmations assassines envers le nouveau retraité « Un coureur qui touche deux millions par an arrête brusquement à cause d’une blessure au genou. Pourquoi ne pas se rétablir tout en continuant à toucher son salaire ? Personne ne se pose la question . »

Le Secret Pro avait aussi déclaré au sujet de Katusha que  « plusieurs de ses coureurs font l’objet d’une enquête. Au sein du peloton, Katusha n’a pas la réputation d’être très fiable. Or, en cyclisme, il n’y a jamais de fumée sans feu. » Ces différentes critiques reflètent bien la réputation de la Russie dans le cyclisme moderne. Elle entretient le stéréotype d’un pays malhonnête, de magouilleurs sans scrupules. Pour sortir de cette dynamique, elle va devoir mettre les bouchées doubles. Tout d’abord, l’Agence antidopage russe (RUSADA) devra collaborer intensivement avec les agences internationales pour éviter un énième quiproquo, comme ce fut le cas lors de l’affaire Kolobnev. Ensuite, les équipes Katusha et Rusvelo vont devoir retrouver du crédit au sein du monde cycliste. Les deux formations ont longtemps peiné à devenir clairement transparente en matière de lutte antidopage. Elles ont intégré le MPCC l’an passé, premier pas vers une visibilité et une vraie lutte contre le plus gros fléau du cyclisme. Mais il faut poursuivre ces efforts. Pour finir, la Russie devra trouver une nouvelle star, une nouvelle tête d’affiche. À l’instar de l’Italie avec Nibali, l’arrivée d’un véritable leader à la réputation propre est indispensable à la Russie pour donner un nouvel élan à ce cyclisme qui en a tellement besoin.

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