Être cycliste professionnel à presque 42 ans, c’est rare. Gagner une étape du Tour d’Espagne à cet âge l’est encore plus. Christopher Horner, vétéran parmi les vétérans, s’est imposé ce lundi au sommet du Mirador de Lobeira. De quoi montrer à tout le monde que le temps n’a pas d’influence sur lui.

Digne d’un vin français

Chris Horner, en fait, c’est l’histoire d’un bon vin de notre territoire. Plus il vieillit, plus il est bon. Longtemps équipier et voyageur – il a connu dix équipes différentes dans sa carrière -, il lui aura fallu attendre la quarantaine pour changer de statut. Et devenir, enfin, le leader qu’il méritait d’être. Lui, l’Américain dans l’ombre des Armstrong, Landis, Zabriskie ou Leipheimer, pouvait enfin se révéler. Place donc à un premier top 10 sur le Tour de France, en 2010. Cette année correspond d’ailleurs au début de son envolée. Avant ça, Horner, c’était des places d’honneur sur des courses d’une semaines ou des classiques, mais sans grande régularité. A partir de cette saison, sans s’affirmer comme un cador du peloton, le Japonais de naissance est devenu un coureur qui compte et dont on se méfie.

Toutefois, ce n’est pas pour autant que le garçon apprend à lever les bras. Son truc à lui, c’est d’être placé. Peut-être a-t-il peur de gagner, ou alors est-ce un problème de tactique ? En tout cas, c’est chez lui qu’il se sent le plus à l’aise. Devant son public, de l’autre côté de l’Atlantique. Les Tours de Californie et de l’Utah sont les seules épreuves à avoir vu Horner monter sur la plus haute marche du podium depuis trois ans. Sûrement pas un hasard. Alors désormais, il va falloir rajouter la Vuelta. Mais c’est bien une nouveauté. Car jusque là, l’homme avait pour habitude de se faire discret, et d’aller décrocher ses accessits grâce à sa régularité plus que suite à des coups de folie. Et alors qu’on pensait qu’il ne changerait jamais, le « ricain » a bluffé tout son monde en devançant ce lundi Valverde, Rodriguez et autres Nibali sur la ligne.

Surprendre, encore ?

En plus de sa victoire d’étape, Horner a donc pris ce lundi le maillot rouge de leader. Une aubaine pour Vincenzo Nibali, qui voulait s’en séparer. Et aussi un joli coup de pub pour l’Américain, trop souvent sous-estimé. Mais comment imaginer la suite de l’épreuve ibérique pour un homme qui n’a jamais eu à gérer une telle situation ? Car il y a fort à parier que le maillot ne changera pas d’épaules avant samedi. D’ici là, la Radioshack va se retrouver au travail forcé, et sûrement dépenser de l’énergie pour finalement pas grand chose. Il aurait peut-être été préférable de rester en embuscade pour Horner mais aussi Zubeldia et Kiserlovski, respectivement classés à 16 et 23 secondes de leur coéquipier. La stratégie adoptée par la formation luxembourgeoise dans les prochains jours sera donc déterminante.

Car à n’en pas douter, Chris Horner peut espérer bien plus que simplement porter le maillot rouge en première semaine… Avec ce qu’il a montré sur les pentes du Mirador de Lobeira, prouvant une nouvelle fois qu’il était un redoutable puncheur, l’Américain peut sans doute viser un bon classement général final. Avec deux lieutenants de grand luxe habitués des grands tours à ses côtés, c’est presque le top 5 qui, sur le papier, lui tend les bras. Reste à assumer la pression nouvelle qui va peser sur ses épaules et dont il n’a absolument pas l’habitude. Mais ce qui tombe aujourd’hui sur Chris Horner ne peut qu’être une aubaine. Ce pourrait enfin être son heure. Celle de se montrer et de prouver que malgré les 42 printemps approchant, tout reste possible. Avant, peut-être, de songer à raccrocher le vélo au garage. Parce qu’à un moment, il y sera forcé. Mais on espère le plus tard possible.

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