2014 nous a montré que les coureurs français pouvaient largement rivaliser avec les autres. Péraud et Pinot sur le podium du Tour, Rolland tout proche de celui du Giro, Bouhanni maillot rouge de la course rose et cinq fois vainqueur sur les grands tours, c’est la preuve que nos bleus n’ont pas à se cacher. Il faudra avoir le même état d’esprit en 2015.
La FDJ comme porte étendard
Cette saison peut-être plus que les précédentes, les grands leaders tricolores – à l’exception de Gallopin, Barguil voire Chavanel – seront répartis presque équitablement au sein des quatre plus grosses structures nationales. Rolland et Coquard chez Europcar, Bouhanni chez Cofidis, Péraud et Bardet avec AG2R La Mondiale et bien sûr Pinot, Démare et Vichot à la FDJ. C’est d’ailleurs ce dernier trio que l’on a tendance à mettre le plus en avant. Parce qu’il est composé de trois jeunes coureurs, parmi lesquels les deux derniers champions nationaux et l’homme que l’on aime à penser qu’il pourrait succéder à Bernard Hinault au palmarès du Tour de France. Peut-être en faisons-nous trop, aveuglés par trop d’enthousiasme et de naïveté, mais les coureurs eux-mêmes doivent croire à la folie s’ils veulent l’atteindre. Marc Madiot semble l’avoir bien compris, et c’est aussi pour ça que la formation au trèfle pourrait s’affirmer encore plus comme celle qui montre la voie.
Lors de la présentation de son équipe, l’ancien coureur s’est en effet montré très ambitieux : « On veut gagner. Tout… Même le Tour de France. » Un discours aussi réjouissant que surprenant. Il faut dire qu’on n’a plus l’habitude de voir des managers si expansifs. Depuis bien des années, on nous a davantage habitué aux discours de réserve, misant sur des tops 10 anecdotiques. Et la FDJ elle-même participait à ce rabaissement d’ambitions. Aujourd’hui, c’est comme si tout le monde avait pris conscience du potentiel de cette génération : pour les classements généraux comme pour les sprints et les classiques, la France a des candidats aussi sérieux que respectés. Et même si espérer décrocher un podium sur la Grande Boucle en 2015, alors que Nibali, Contador, Froome et Quintana devraient y participer, relèverait du miracle, il n’y a aucune raison, en début d’année, d’annoncer ne viser que la cinquième place.
Les coureurs doivent suivre
Malgré tout, le problème demeure. Si Madiot a fait preuve de courage en annonçant des objectifs élevés, les principaux intéressés ont eu tendance à minimiser les propos de leur manager. Surtout Thibaut Pinot. Devant les journalistes, il a largement calmé le jeu. « Le podium est peut-être venu trop tôt. Un top 5 sur le prochain Tour, ce serait déjà très bien… » Discours de façade diront les plus optimistes, difficultés à s’imaginer au sommet diront les plus réalistes. Alors après cette réaction à chaud, le Franc-Comtois a évidemment tenu à remettre de l’ordre dans la maison, et à ne surtout pas déjuger son boss. « Heureusement que Marc dit qu’on peut gagner le Tour de France. C’est aussi mon ambition donc c’est bien qu’il y croit avec moi. […] Si j’ai la même forme qu’en 2014, je n’aurai pas peur de viser le podium. » Bien rattrapé, mais nous, comment on fait le tri ?
Pour l’instant, on a décidé de ne pas en faire. On verra bien, lors des premières échéances importantes de la saison, où se situent nos tricolores. Mais sur tous les terrains, on en attendra certains. Sur les trois grands tours comme sur les grandes classiques, ils ont montré en 2014 qu’ils avaient le niveau pour s’immiscer parmi les meilleurs. Il y avait, pour la plupart, un petit effet de surprise sur lequel ils ne pourront pas compter cette année. Mais avec l’expérience et les certitudes acquises, ils devraient s’en sortir. Leur marge d’erreur, en tout cas, sera réduite malgré leur récente exposition. Parce que la France les attendait depuis longtemps, elle n’a plus envie de patienter. Messieurs, soyez donc décomplexés. Car si le panache embellira vos succès et atténuera vos échecs, l’attentisme risque de ne pas vous être pardonné.