Le palmarès de Sylvain Chavanel conviendrait à de très nombreux coureurs au sein du peloton, mais en connaissant le potentiel du tricolore, on ne peut qu’être déçu du déroulement de certaines épreuves. Le monument que le natif de Châtellerault mériterait lui a toujours fuit ces dernières années, alors qu’il n’avait jamais semblé aussi fort. Avant que l’âge ne l’empêche donc de jouer la gagne, il a décidé de changer d’air pour être un leader incontesté – même s’il ne l’avoue pas – et enfin lever les bras sur l’une des plus belles épreuves d’un jour du calendrier.

Passé tout près chez OPQS

Au sein de la formation de Patrick Lefevere, Chavanel a eu du mal à faire son trou. Avec Tom Boonen comme coéquipier, difficile de faire comprendre à l’équipe que lui aussi pouvait, en s’appuyant sur quelques équipiers à son service, décrocher un monument. En cinq saisons dans la structure belge, il est passé près de la consécration plusieurs fois, mais à chaque fois il a du s’avouer vaincu. Peut-être trop souvent placé, on l’a rapidement pris pour un équipier, de luxe certes, mais rien de plus. Le grand Boonen avait besoin d’une armada à ses côtés pour remporter les flandriennes, Chava en ferait partie. Une excellente chose pour apprendre, bien sûr. Mais pas pour gagner. Le final du Tour des Flandres 2011 est encore dans toutes les têtes. Echappé avec Nick Nuyens et Fabian Cancellara, le Français a l’occasion de disputer la victoire finale à ses deux compères. Le Suisse est fatigué et le Belge pas plus habitué à gagner que Chavanel, dont on se dit alors qu’il a toute ses chances.

Mais voilà les poursuivants qui reviennent, parmi lesquels Tom Boonen, évidemment. Chavanel ne sait plus quoi faire, se retourne et hésite à attendre son leader. Mais le Flamand est trop loin et échouera à deux secondes des trois fuyards. Chavanel, lui, a sacrifié son sprint pour rien et prend la deuxième place. La suite, c’est une succession de tops 10 sur les classiques, surtout flandriennes, avant une saison 2013 qui fait renaître des espoirs légitimes. Sur Milan-Sanremo, le Poitevin a plus ou moins carte blanche. Il ne se fait pas prier et dans le final, parvient à suivre les meilleurs. Intrinsèquement, il ne peut ensuite rien faire face à Ciolek, Sagan et Cancellara, qui lui passent devant pour le podium. Mais Mimosa a prouvé sa valeur, si c’était encore à faire. Placé sur le Ronde et Roubaix, comme souvent, il demeure malgré tout assez loin de la victoire, même avec un Boonen blessé. Parce que son équipe, au lieu de le promulguer leader, fait de lui un électron libre au même titre que Terpstra, Stybar ou Vandenbergh. Le moment du déclic, sans doute. C’est la dernière campagne printanière de Sylvain Chavanel chez Omega-Pharma Quick-Step.

Courir avec Haussler, pas pour Haussler

Chez IAM, on a sauté sur l’occasion. A 34 ans, celui qui se faisait appeler La Machine en Belgique n’est pas fini, et ne s’est d’ailleurs pas fixé de date limite pour raccrocher. L’envie de remporter un monument, à n’en pas douter, le fera rester sur un vélo le plus longtemps possible. La saison en compte cinq, et trois semblent plus ou moins à sa portée : Milan-Sanremo, le Tour des Flandres et Paris-Roubaix. Avec sans doute une petite préférence pour l’épreuve belge, qui mêle bosses et pavés, les deux terrains favoris du Viennois. Chez les Suisses, après avoir fait signer Haussler l’année passée, la venue de Chavanel est donc accueillie comme le gros coup de l’hiver. Avec ces deux hommes, Michel Thétaz et Serge Beucherie s’offrent l’opportunité de briller de bout en bout de la campagne de classiques. Et si la stratégie n’est pas encore définie, une chose est sûre : Chavanel roulera pour lui-même, et pourra compter sur une équipe à sa disposition, au moins en partie.

Alors certes, dans son transfert, l’un des meilleurs coureurs français – si ce n’est le meilleur – quitte le World Tour pour la division inférieure. Mais ça ne l’inquiète pas, et il a sans doute raison, car le risque est mesuré. L’équipe IAM a le niveau des formations de l’élite, et sera invitée sur la plupart des épreuves qu’elle souhaite disputer. Surtout avec Chavanel, mais aussi Jérôme Pineau, dans l’effectif. RCS a déjà répondu favorablement pour Tirreno, Milan-Sanremo et le Tour de Lombardie. Désormais, il n’y a qu’à espérer qu’ASO suive le mouvement pour Paris-Nice, le Dauphiné et le Tour, notamment. Chavanel pourra alors s’épanouir sur ses courses favorites sans trop de pression, si ce n’est celle de prendre du plaisir. Car c’est le mot d’ordre du garçon, qui n’a pas coupé cet hiver dans le but de disputer quelques cyclo-cross, justement pour s’amuser. Et il en a même gagné quelques uns ! De quoi mettre en confiance le principal intéressé, mais aussi les quelques observateurs qui pouvaient douter de ses capacités physiques. Désormais, il est donc temps de reprendre sur la route, et d’ici quelques semaines seulement, les premières classiques pointeront le bout de leur nez…

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