On ne savait pas trop quoi espérer de Julian Alaphilippe cette semaine. Son inexpérience sur le triptyque ardennais ne jouait pas en sa faveur. Mais malgré ça, en plus de travailler pour son leader Kwiatkowski, le jeune coureur de 22 ans a saisi sa chance et s’est immiscé parmi les cadors. Prodigieux.
De surprise en surprise
« Je suis heureux d’avoir assisté à la naissance d’un champion. » Ces mots sont signés Mark Cavendish, sur la dernière édition du Tour de l’Ain. Le Britannique ne tarissait pas d’éloges au sujet du jeune français. Et il avait raison. En l’espace de sept jours, Julian Alaphilippe est passé par toutes les émotions. Celle du devoir accompli après le succès du champion du monde Michal Kwiatkowski sur l’Amstel Gold Race, mais aussi celle d’un rêve éveillé sur la Flèche wallonne et Liège-Bastogne-Liège, où le coureur d’Etixx s’est élevé au rang de prétendant à la victoire. Pour autant, le natif de Saint-Amand-Montrond a gardé la tête froide à chaque arrivée, nous permettant de déceler chez lui un caractère posé et une maturité jouant grandement en sa faveur auprès de ses coéquipiers. Car oui, il ne faut pas oublier qu’Alaphilippe venait sur ce triptyque dans le but de protéger Kwiatkowski. Ce fut une réussite aux Pays-Bas, où le tricolore prenait au passage une septième place récompensant ses efforts.
Mais c’est sur la Flèche wallonne, mercredi, que Julian Alaphilippe a fait étalage de tout son potentiel. Le Berrichon, d’abord cantonné à un rôle de lieutenant pour Kwiatkowski a emmené le champion du monde au pied du Mur de Huy dans les meilleures dispositions, a finalement joué sa carte personnelle. Aérien dans les pourcentages importants du tracé, le Français n’a jamais quitté les premières places du peloton, preuve que les jambes étaient au rendez-vous. Et surtout, sa sérénité pour refroidir les attaquants dans la côte de Cherave laissait déjà présager quelques promesses à l’approche du juge de paix. Pourtant, le garçon était lui-même surpris à l’arrivée. « L’objectif était de placer Michal dans les premières places au pied du Mur. On l’a fait, mais il y a eu un flottement. C’est monté très vite et j’ai perdu Michal de vue. J’étais devant lui, j’avais de bonnes jambes, et mon directeur sportif Tom Steels m’a dit : ‘’Allez Julian, tu peux le faire !’’ Je me suis retrouvé devant, avec Valverde et Rodriguez. » Sans complexe, il a donc saisi sa chance à bon escient. Roue contre roue avec Valverde, Moreno ou encore Albasini, Alaphilippe est finalement parvenu à terminer derrière le coureur de la Movistar « Je suis content et déçu à la fois, j’arrive pour la gagne sur une des plus belles courses du calendrier. Une deuxième place, c’est toujours une défaite, mais Valverde, ce n’est pas n’importe qui. »
Plus qu’un leader de rechange
Enfin, la Doyenne est venue conclure une formidable épopée pour le jeune coureur. Venu pour découvrir une des plus belles course de la saison, il l’a finalement marqué de son empreinte. Acteur majeur du final, il a profité d’un Michal Kwiatkowski une nouvelle fois juste physiquement pour prendre le pouvoir de l’équipe belge. « Il fallait que je reste avec lui le plus possible, même s’il n’était pas en super forme. Comme il était derrière, on m’a dit d’y aller », racontait-il après l’épreuve. Impressionnant sur les pentes de Saint-Nicolas, il s’est fait ensuite discret, se positionnant en queue du groupe des favoris. Et malgré un positionnement plus que douteux à l’amorce de l’emballage final, il est revenu prendre les roues, échouant à quelques mètres d’Alejandro Valverde. Sur la ligne, les sentiments étaient donc les mêmes qu’à Huy : un mélange de satisfaction et de déception. Personne n’attendait Alaphilippe aussi bien placé, mais en terminant si proche de la victoire, il est impossible de ne pas ressentir une pointe de frustration.
Malgré tout, ces résultats surprenants réjouissent autant qu’ils confirment les bonnes dispositions du Français sur ce type d’épreuves. L’an passé, il avait déjà obtenu une excellente cinquième place au GP de Plouay, signe de réelles qualités de puncheur et d’une pointe de vitesse remarquables. Après un début de carrière compliqué, démarré en cyclo-cross avant un arrêt forcé et un retour sur la route avec l’Armée de Terre, Julian Alaphilippe a définitivement montré qu’il faudrait compter sur lui à l’avenir. Sa régularité est pleine d’espoirs, et pourrait même redistribuer les cartes au sein d’une équipe qui ne tourne plus seulement autour du champion du monde sur les ardennaises. De quoi avoir déjà hâte d’être à l’année prochaine.
Thomas Bernier
Bonjour,
Je ne comprends pas pourquoi l’équipe Etixx n’a pas autorisé Alaphilippe à courir en tant que co-leader sur les 30 derniers km de LBL. Si Kwiatkowski avait joué cartes sur table et mis son égo de côté en avouant à son directeur sportif qu’il serait juste dans le final, Julian n’aurait pas réalisé d’efforts parasites qui lui coûtent quoi qu’on puisse dire une victoire dans un monument. Le tout en sachant qu’il a été impliqué dans la grosse chute intervenue au pied de la Redoute. C’était le même cas de figure avec Benoot au Tour des Flandres, lequel s’étai montré supérieur à Roelandts dans les ultimes difficultés alors qu’il était initialement son équipier. Vraiment, je pense qu’Alaphilippe avait les jambes pour gagner dimanche et le manque de réactivité de l’équipe belge fut rédhibitoire pour lui. Quand on possède un tel coureur dans ses rangs, on ne doit rien exclure, qui plus est lorsque ce dernier termine deuxième de la Flèche Wallonne en damant le pion à son leader.
@Isaak : Je pense qu’on peut mettre cette « erreur » sur le compte de la jeunesse, autant chez Kwiatkowski que chez Alaphilippe. Après avoir gagné l’Amstel, le Polonais se sentait en confiance et c’est parfois difficile de savoir si on pourra suivre ou non dans le final. Il suffit de voir Nibali, qui a fait rouler et envoyé des équipiers à l’avant alors que finalement il n’a rien pu faire dans les derniers kilomètres car il n’était pas assez fort. Pourtant, on sait que l’Italien ne fait pas bosser son équipe dans le vide, s’il avait su qu’il ne jouerait pas la gagne, il n’aurait pas demandé tout ça. Je ne veux pas retirer toute la faute à Kwiatkowski, mais ce n’est pas toujours évident de se jauger par rapport à ses adversaires.
@Robin Watt : c’est toujours une prise de risque de confier les rennes d’une telle équipe à un jeunot de 22 ans mais quand on termine 7ème de l’Amstel puis 2ème de la Flèche, on peut légitimement prétendre avoir des prérogatives comme ne pas boucher tous les trous pour le leader, en l’occurrence Kwiatkowski. Après c’est sûr que médiatiquement, il est préférable pour Lefevere que le champion du monde soit sur le cliché représentant le vainqueur… L’équipe AG2R la mondiale a placé deux coureurs dans le top 10, ce qui prouve que l’on peut aborder une grande classique avec deux coureurs protégés. Je crois surtout que l’équipe Etixx fut complètement dépassée par l’ascension au plus haut niveau d’Alaphilippe. Ils ont dû se frotter les yeux en le voyant franchir les étapes plus vite que prévu…
Je pense que du côté de chez Etixx on a parfaitement pris conscience de la valeur de Julian Alaphilippe- il vient de la réserve, ne l’oublions pas – et depuis un moment déjà. Je ne pense pas qu’ils aient été dépassés par sa progression.
En ce qui concerne la stratégie d’équipe, les efforts qu’a fait Alaphilippe pour son leader ou même ceux pour revenir après la chute, ne lui coûtent pas la victoire, à mon avis.
Il avait les jambes pour la gagne, mais si on observe bien le final, il se fait un peu enfermer avant son sprint. Un sprint qu’il aurait pu et même dû lancer plus tôt -comme le souligne d’ailleurs très justement Jalabert sur France Tv.
Et ça en revanche, c’est le métier qui rentre.
Une pépite de plus pour le cyclisme français, on va se régaler.
P.S: à Thomas Bernier, en début de dernier paragraphe : la Doyenne « est allée » conclure.
Difficile pour moi de critiquer la course d’Alaphilppe.
Il a sûrement perdu beaucoup de force en bouchant les trous. Mais ce sont ces mouvements et ces prises d’initiatives qui l’on placé dans le bon groupe, usé ses adversaires etc…
La seule « faute » tactique à mon sens, c’est de se faire un peu déborder dans la descente et du coup un peu enfermer au sprint.
Ensuite c’est lui qui doit recoler sur Valverde.
D’ailleurs je n’ai pas compris comment l’Imbatido avait pu faire un trou, alors qu’on lui suçait la roue depuis de kms… C’est incroyable… tout le monde attends le sprint et personne n’est capable d’accrocher le plus dangereux… Si ce n’est un « gamin » mal placé qui court son premier LBL.
Je n’attends pas les mêmes résultats l’année prochaine à cause du contrecoup, de la pression, de la pancarte. Mais je souhaite qu’il continue à tenter des coups et a tout donner. Il ne me semble pas être le type de coureur à la Van Avermaet, à se satisfaire d’une deuxième place.
Avec l’expérience, il peut faire très mal.
Je ne crois pas que Van Avermaet ne se satisfasse de ses accessits…
Alaphilippe a peut-être travaillé à protéger Kwiato mais c’est pas lui qui roulait pour boucher les trous, dans ce domaine Stybar a été assez phénoménal dimanche.
De fait ça n’aurait a priori pas changé grand-chose à la victoire de Valverde car le plus gros effort qu’Alaphilippe a dû fournir en amont c’est de revenir dans le peloton suite à sa chute. Et le mauvais placement du garçon au moment du sprint était rédhibitoire.
Certain que si tout se passe bien pour lui, il sera l’an prochain le fer de lance de son équipe. Rêvons un peu pour LBL 2016: Alaphillipe leader d’Ettix, Gallopin de Lotto et Barguil de Giant.Trois français leaders de grosses équipes étrangères! Ca serait pas beau pour le cyclisme français ( sans oublier Bardet bien sûr!) ?
Moi, j’attends de le voir sur le Tour de France, on verra ce qu’il vaut… De nouveau.. comme j’attends de voir si Bardet, Pinot, Barguil même si c’est son premier tour vont confirmer… Car cette année y aura une plus grande concurrence au niveau du classement général…
En tout cas Alaphilippe est dans la meilleur équipe pour apprendre sur les classiques mais j’espère qu’il ira dans une équipe française car ils en ont besoin… De même pour Barguil…
@rolfsorensen, n’étant pas dans sa tête, je n’en sais rien.
Mais beaucoup d’interview de Greg Van Avermaet finissent par « je me satisfait de cette Xème place, j’ai le temps de gagner de grandes courses… »
@Julian Alafilipo : Sur le dernier Paris-Roubaix oui mais pas sur les derniers Tours des Flandres.