Deuxième à Harrogate, Londres et Nancy. Quatrième à Lille et à Arenberg. Peter Sagan est de loin le coureur le plus régulier de cette première partie de Tour de France, et possède une avance de 137 points sur son dauphin Bryan Coquard au classement du maillot vert. Endurant sur les pavés, à l’aise dès que la route s’élève, et véloce dans les arrivées massives, il ne lui manque quasiment rien pour briller sur tout type de terrain. Et pourtant, aucune victoire n’est encore au compteur en cette édition 2014, lui qui en avait claqué trois dans la première semaine de 2012 et une en 2013. Ses recours semblent bientôt épuisés…

La pancarte est-elle trop grosse ?

Reconnu par tous comme le coureur le plus complet du peloton, à seulement 24 ans, le prodige slovaque pêche encore et toujours dans la phase la plus difficile du cyclisme, à savoir concrétiser ses occasions, sans doute trop nombreuses pour pouvoir être converties. Entre l’envie d’aller remporter un Tour des Flandres où une Amstel Gold Race, un championnat du monde qui lui donne des envies de sacre avec des parcours presque toujours favorables à un coureur de sa trempe depuis quelques années, rien ne lui manque, mais voila, il y a toujours un grain de sable déguisé en concurrent qui rompt sa marche en avant dans les derniers kilomètres. Sa victoire à Gand-Wevelgem était impressionnante, loin s’en faut, mais aurait pu être contestée si le groupe d’opportunistes ne lui avait pas corsé l’affaire. Tout l’inverse des scénarii de cette Grande Boucle, où systématiquement, l’équipe Cannondale ne maitrîse pas l’intégralité des étapes. Un cadeau pour OPQS qui pouvait positionner Trentin sur orbite, à la manière de la victoire de Delémont en juin dernier, où pour des attaquants, comme Nibali où Gallopin.

C’est bien connu que lorsqu’un favori s’accapare toute l’attention médiatique et les citations des favoris au départ, le peloton entier est prêt à lui faire la peau, quitte à perdre plutôt que de le voir gagner. Lorsque le Squale attaque dans la descente de Jenkin Road, le peloton en comité restreint sait pertinemment qu’il emmènera sur un plateau le vainqueur du GP de Montréal, prêt à aligner tout ce beau monde dans un sprint. Alors, plutôt que de faire un effort pour un concurrent, on préfère se regarder, et espérer qu’un autre baroudeur tente d’opérer la jonction. Et cela tient de l’hypothétique, tellement les profils à la Sagan, incarnés par Kwiatkowski où encore Degenkolb, Kristoff, sont de plus en plus nombreux dans le cyclisme moderne. Il ne reste alors plus qu’une solution, à savoir faire honneur à son statut et se donner les chances de l’emporter, mais il est évident que votre fraîcheur en prend un coup. Pourtant, c’est ce qu’il aurait pu faire aujourd’hui, quand Tony Gallopin était repris une première fois dans la descente finale, car hormis Michael Rogers, les petites cassures d’une descente abordée à presque 90 km/h avaient mis en difficulté une partie du peloton. Sauf qu’une fois de plus, les mauvais choix ont été préférés.

Pourtant, le vert lui est promis

En dehors de ça, le natif de Zilina sait que le maillot vert ne peut pratiquement plus lui échapper, sauf chute, où retournement de situation exceptionnel. Il file tout droit vers un troisième classement par points consécutif et pourrait rejoindre dans la légende Eddy Merckx, Robby McEwen ou encore Freddy Maertens. Mais la physionomie à venir du mois de juillet actuel est moins réjouissante pour Tourminator, car les Alpes vont bientôt se dresser, suivies des Pyrénées, entrecoupées par une seule étape plate de transition. Ensuite ? Un autre étape de plaine, un chrono et les Champs Parisiens. L’étape de demain à Saint-Etienne pourrait aussi sourire à une échappée et priver une nouvelle fois Sagan de victoire. Pas simple donc, et il y a fort à parier que l’objectif d’une victoire d’étape s’assombrisse considérablement. Car sur des sprints purs, les monstres de puissance Kittel et Greipel lui sont supérieurs. Une certaine stagnation donc, pour quelqu’un qui avait battu Cavendish et les autres sur des étapes du Tirreno-Adriatico.

Il pourrait alors devenir l’un des rares coureurs à remporter le classement par points du Tour de France sans avoir décroché le moindre bouquet. Un fait rare et qui mérite d’être souligné, puisque ce n’est certainement pas le genre de record que recherche notre homme. Qui plus est, son accession insolente aux sommets de l’échelon mondial lui a valu quelques ennemis, dont Fabian Cancellara – cependant reparti à la maison -, n’hésitant pas à lui mettre quelques bâtons dans les roues. Un contre tous ? Ce n’est pas ce qu’on lui souhaite, mais il y a fort à parier que la suite de son été ressemble à cela…

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