Ayant marqué les esprits en fin de saison, le grand espoir du cyclisme italien, Diego Ulissi, ainsi que son directeur sportif basque Joxean Fernandez Matxin, ont pris le temps de se confier à la Chronique du Vélo. Entre le bilan de son année écoulée, un point sur ses capacités physiques, sa relation avec l’équipe mais surtout ses objectifs futurs au sein de l’équipe Lampre-Merida, cela permet de mieux connaître le Toscan.

« Remporter une course d’un jour renommée »

En pleine intersaison, le temps des vacances a certainement « empêché » Diego Ulissi de continuer sur sa lancée phénoménale, mais le natif de Cecina a surtout voulu recharger les batteries. Objectif détente après une saison tout de même éprouvante. « Je suis d’abord parti en vacances avec toute ma famille et des amis aux Îles Canaries, afin de me détendre un bout de temps. » Si sportivement le garçon était irrésistible, c’est un homme quelque peu éprouvé de son année qui s’est confié, après un printemps chaotique, et surtout des Mondiaux ne lui laissant aucun répit, sacrifice de 270 kilomètres pour la Squadra Azzura oblige. « C’est clair que les conditions météo furent dantesques lors du Mondial, mais j’ai dû m’y faire. J’étais prêt pour les affronter et je n’ai pas trop ressenti de différences lors du début de course, mais, dans les dernières côtes, ce fut très dur. » Mais le Toscan de 24 ans ne cherche absolument pas d’excuses, et réplique aussitôt : « Cela n’a pas changé mon niveau de performances. » Si le jeune homme fut quelque peu discret sur les grandes épreuves auxquelles il a participé, c’était toutefois « le moment parfait pour qu’il exprime ses qualités, sur des courses de seconde zone. »

Un moyen idéal de rappeler à tous qu’il est capable du meilleur, du moins sur ses terres ? Matxin nous explique qu’ « Ulissi n’a couru qu’en Italie en octobre, pris d’affection pour ces courses en raison de sa nationalité. Il y court depuis tout petit, dans toutes les catégories. » Le symbole national est évidemment fort chez ce coureur, mais on sent néanmoins une volonté de s’ouvrir encore plus et de tutoyer les sommets. « Les classiques italiennes ne représentent qu’une préoccupation mineure. Cela me ferait plaisir d’en gagner une belle à la maison, mais je préférerais vraiment pouvoir remporter une course d’un jour renommée dans le monde ! » Pour cela, c’est inévitablement sur ses aptitudes physiques qu’Ulissi devra réaliser un travail important. Le constat est assez simple, et il est clair qu’il n’a pas pesé bien lourd dans un final de course, lorsque celle-ci passait le seuil des 200 kilomètres… « Je veux avant tout améliorer ma résistance en 2014», nous dit-il, soucieux de profiter de ses autres qualités remarquables, comme sa récupération. Désormais habitué du Giro, il a mis à contribution son explosivité pour tenter sa chance sur la Vuelta, ainsi que sur de nombreuses courses d’une semaine. Mais le hic, c’est bien lorsqu’il faut lever les bras, l’expert qu’est Matxin développe : « Il a réussi de belles choses cette saison sur des courses de haut niveau comme sur le Tour de Pologne, et surtout sur la Vuelta. Mais, hormis l’étape de Madonna di Campiglio, il terminait deuxième, troisième, et il n’arrivait pas à gagner… » Celui qu’on avait découvert lors d’une étape du Paris-Nice 2010 pêche encore dans les moments clés, mais, l’avenir est pour lui.

« Les classiques avant tout »

Car en 2014, il ne sera pas question de traîner ! S’il représente encore l’avenir, l’Italien est désormais âgé de 24 ans. Un âge et une année 2014 qui s’annonce déjà clé, puisque la confirmation se fait attendre à grand pas. Pour cela, les classiques seront encore au programme, avec le seul slogan des « classiques avant tout. » De plus en plus dans le coup lors du triptyque ardennais, Ulissi souhaite désormais profiter de la dynamique d’un groupe revitalisé par l’arrivée de Rui Costa, censé faire oublier le fantomatique Cunego. « Ce sera un avantage pour moi, mais surtout pour l’équipe du point de vue collectif. On pourra gérer différemment les finals d’étapes, et surtout gagner plus ! Avoir un maillot de champion du monde dans son équipe sera une motivation supplémentaire. J’ai hâte », s’enthousiasme le Toscan. Pauvre en victoires lors des dernières saisons, la Lampre-Merida abordera le prochain mois de janvier la fleur au fusil, et comptera sur un Ulissi revanchard, déterminé à saisir les occasions. « Je crois que l’an prochain, il y parviendra » appuie Matxin, confiant comme son poulain, sentant qu’qu’il est “encore jeune” et motivé à “franchir ce palier”. “Mais je ne m’inquiète pas, cela devrait venir”, reprend aussitôt Ulissi. Cependant, la concurrence sera encore rude, et malgré ses ambitions premières, il ne faudra pas se focaliser sur un unique objectif au risque de tout perdre. En solide chasseur d’étapes, il nous livre ses ambitions. « Si je peux y participer, je viserai le Giro dans un petit coin de ma tête. Mais je garde surtout à l’idée le fait de réaliser une solide deuxième partie de saison. » Comme en 2013, en somme. « Je préfère courir au jour le jour et gagner des étapes ou des classiques, c’est ce que je préfère. Après, faire honneur au classement général est important, mais les placettes m’intéressent peu. Je pourrais essayer mais je préfère vraiment me focaliser ailleurs. »

Entre Matxin et Ulissi, on devine une grande complicité. Décrit comme proche de ses coureurs et attentif à la progression de son protégé, le Basque ne tarit pas d’éloges sur celui qui a déjà gagné une étape de son tour national, en 2011, décrivant « un coureur sans aucune pression sur les courses par étapes auxquelles il participe.” Selon lui, “c’est pour ça qu’à l’avenir, il pourrait remporter de grandes courses World tour. Il apprend vite sur les courses importantes et joue la victoire sur les courses qui le sont moins. Alors, il peut devenir un redoutable spécialiste des courses à étapes, il possède une très bonne récupération. » Optimiste en vue d’un avenir radieux, mais surtout à la vue de la progression du gamin. Brûlant les étapes, vainqueur du GP de Prato en 2010, du Tour de Slovénie et d’une étape du Giro en 2011, du GP Carnaghese en 2012, « sa progression fut rapide, mais logique et linéaire ! », assure Matxin. « Pour un jeune comme lui, il sait déjà tout ce qu’il veut. On le verra sur les ardennaises et à moyen terme sur le Giro, sans avoir le rôle de leader désigné. On ne veut pas lui mettre la pression, mais juste lui offrir les libertés nécessaires. » Sa reprise aura donc lieu aux antipodes du Tour Down Under, course idéale selon Ulissi pour « reprendre sereinement la préparation en vue des objectifs à venir. » Surtout, sa volonté est de continuer avec le calme relatif qui accompagne son début de carrière. A en croire son directeur sportif admiratif, ce sera « l’un des meilleurs coureurs du monde d’ici quelques années. Il faut lui laisser du temps et vous verrez le résultat. » En tout cas, Ulissi reste un fuchsia dans son cœur, et est très loin d’envisager un quelconque départ. « Je n’ai pas vraiment l’envie d’aller voir ailleurs pour l’instant. Je me sens très bien dans l’équipe, et à mon âge c’est déjà très bien d’être considéré comme l’un des leaders de l’équipe. Alors, pourquoi changer ? » Peut-être de quoi voir un côté plus virevoltant encore de l’Italien dans les prochains mois. C’est en tout cas ce que toute l’Italie espère.

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