On attendait le duel entre Fabian Cancellara et Sep Vanmarcke, avec pourquoi pas Tom Boonen et Peter Sagan comme arbitres. Ces quatre là étaient présents dans le final, mais la victoire est revenue à un homme que l’on attendait bien moins : Niki Terpstra. Une surprise oui, mais un sacre totalement mérité tant le Néerlandais s’est montré costaud et malin.

OPQS aura eu du mal…

Cela faisait deux ans que les deux monuments pavés fuyaient l’équipe de Patrick Lefevere. La faute à un Fabian Cancellara ultra-dominateur, qui avait réalisé le doublé Flandres-Roubaix en 2013 avant d’être de nouveau sacré sur le Ronde la semaine dernière. Chez les Belges, on l’avait en travers de la gorge, surtout qu’OPQS comptait dans ses rangs les coureurs pour faire tomber le Suisse. Bien sûr, il y avait le chef de file Boonen, mais aussi des équipiers de grand luxe : Terpstra, Stybar, Vandenbergh et même Chavanel jusqu’à l’année dernière. Un collectif incroyable qui a échoué trois fois consécutivement sur les pavés du Ronde et de Roubaix, alors même qu’en 2012, avec à peu près les mêmes hommes, la formation flamande était parvenue, par l’intermédiaire de Tommeke, à faire le doublé. Souvent décriée pour sa tactique hasardeuse – notamment sur Paris-Roubaix 2013 et sur le dernier Tour de Flandres -, l’équipe spécialiste des flandriennes a donc remis les pendules à l’heure ce dimanche, avec une victoire de prestige qui met fin à la mauvaise série.

Malgré tout, on a longtemps cru que la victoire leur échapperait, pour ne pas changer. Car, une fois n’est pas coutume, la tactique a été plutôt surprenante, et pas loin de mener à l’échec. Quand Tom Boonen attaque, seul, à 65 kilomètres de l’arrivée, on se demande en effet ce qu’il espère. Son offensive est tranchante, mais une fois revenue sur la tête de course, que peut-il faire ? Si loin du but, impossible pour lui de partir seul, et il se retrouve obligé de collaborer avec un groupe d’outsiders pas forcément enclin à l’emmener dans un fauteuil. Le quadruple vainqueur de l’épreuve lâche alors beaucoup d’énergie avant que ça ne revienne par l’arrière. Sagan d’abord, puis tout le groupe Cancellara ensuite. Juste avant le Carrefour de l’Arbre, tout le monde est donc groupé, mais Boonen a déjà lâché pas mal de forces. Du coup, quand la différence se fait dans le dernier secteur pavé d’envergure, il n’y a qu’un coureur d’Omega-Pharma Quick-Step qui peut suivre, et c’est Zdenek Stybar. Pas le plus à même de devancer Sagan et Degenkolb au sprint, eux aussi à l’avant…

…et peut remercier Terpstra

Ce Paris-Roubaix 2014, Lefevere et toute l’équipe belge le doivent donc en grande partie à Niki Terpstra, incroyable dans le final. A la sortie du Carrefour de l’Arbre, il est le dernier équipier de Boonen, et doit à tout prix ramener son leader sur les cinq fuyards que sont Cancellara, Vanmarcke, Sagan, Degenkolb et Stybar. La course se joue véritablement à ce moment là. Alors le Néerlandais donne tout, et le duo traverse l’avant-dernier secteur à toute vitesse, emmenant sur son porte-bagage le reste des poursuivants. Un effort incroyable de Terpstra qui permet un regroupement général à moins de sept kilomètres de l’arrivée. L’ancien pensionnaire de la Milram paraît complètement cuit, mais avec Stybar et Boonen dans le bon groupe, tout redevient jouable pour Omega-Pharma Quick-Step. Sauf que voilà, onze hommes sur le vélodrome, ce n’est pas possible. On se dit qu’un homme va forcément attaquer, et chacun imagine un scénario, excluant presque automatiquement un Terpstra que l’on pense hors course. Pourtant, à moins de six kilomètres du vélodrome, c’est bien lui qui portera l’estocade décisive.

Machine à rouler, le natif de Beverwijk ne s’est donc posé aucune question, et a profité de l’attentisme palpable au sein du groupe de chasse. Cancellara a pensé attaquer, mais ne l’a pas fait, redoutant le contre et préférant assurer un podium. Même tactique du côté de John Degenkolb, alors que Peter Sagan était au bout du rouleau. Terpstra a donc appuyé sur les pédales, sans connaître les écarts selon ses propres mots à l’arrivée. Régulier au possible sur les flandriennes du début de saison, il a donc pu prendre conscience, mètre après mètre, qu’il filait vers un sacre de prestige. Son entrée sur le vélodrome roubaisien, évidemment, a été accueilli par les applaudissements du public ; mais malgré son avance, Niki n’a pas ralenti durant plus d’un tour de piste. A 29 ans, l’habituel lieutenant ne semblait pas réaliser. Mais dans le dernier virage, il a pu, enfin, lever le pied, puis les bras. Parce qu’une victoire dans l’Enfer du Nord doit se savourer, même si ce n’est que quelques secondes. Ce dimanche, Terpstra n’était pas le favori ; mais il s’est montré incroyablement fort et très fin tactiquement. Patrick Lefevere, qui a remporté 12 de ses 20 derniers Paris-Roubaix en tant que manager, pourra ce soir lui offrir le champagne en guise de remerciement.

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