Le phénomène émerge à nouveau. Edvald Boasson Hagen a ressorti un moteur que l’on pensait noyé depuis plusieurs années. Sorti en force à trois kilomètres de l’arrivée, le Norvégien a fait un trou immense entre lui et le groupe d’échappés. De quoi avoir le temps de savourer un triomphe rédempteur.

Phénoménal

À trois kilomètres de la ligne, Edvald Boasson Hagen et Nikias Arndt partaient en force. Deux-cent mètres plus loin, le Norvégien était seul. Trop puissant pour l’Allemand, trop fort pour la meute. La démonstration est incroyable et signe d’un bouquet le retour au plus haut niveau de l’un des meilleurs coureurs du monde. Pourtant Arndt semblait fort, mais quand son compère du grand nord a pris le relais, l’Allemand n’a pas pu accrocher la surpuissante locomotive Viking. « Boasson Hagen était trop puissant », avouait vaincu Elie Gesbert, le benjamin du Tour présent dans l’échappée. Cette impression de marcher sur les adversaires dans une grande course, Edvald Boasson Hagen l’avait oublié. Cela faisait six ans qu’il n’avait plus gagné sur le Tour. L’année d’un doublé extraordinaire, à Lisieux et à Pinerolo. Plus troublant, il n’avait pas remporté de victoire d’envergure depuis la troisième étape du Dauphiné 2013.

Depuis, il a connu des victoires sur le Tour de Norvège, des Fjords, du Danemark… Rien de transcendant pour un moteur comme le sien. Comme si une Ferrari se contentait de courses de karts. Mais cette année, le Norvégien semblait entrevoir le bout du tunnel. Après l’abandon de Mark Cavendish suite à son accrochage avec Peter Sagan, Boasson Hagen récupérait le rôle de sprinteur principal chez Dimension Data. Si le coureur est réputé pour être capable de tout faire, la tâche n’était pas aisée. Il y a deux semaines, il passait à six millièmes d’une première victoire, échouant derrière l’implacable Marcel Kittel à la photo-finish. Deux fois troisième par la suite, le Norvégien retrouvait la deuxième place à Romans-sur-Isère derrière Michael Matthews, encore à la photo-finish. Alors à l’arrivée ce soir, il laissait éclater sa joie : « Je suis vraiment comblé, j’ai travaillé toute la journée et le final s’est parfaitement déroulé. J’ai été proche de la victoire plusieurs fois et enfin je l’ai fait ! »

Malin

Boasson Hagen était le meilleur coureur de l’échappée. Le plus rapide, le plus solide, le plus fort. Encore fallait-il s’en sortir avec la pancarte dans le dos. Alors qu’il aurait pu contrôler, assurer jusqu’à la dernière ligne droite, il a préféré attaquer à trois kilomètres. « Je ne voulais pas attendre le sprint, commence-t-il. Je n’étais vraiment pas sûr de gagner à 100 %, j’ai eu des désillusions avant. J’étais préparé au sprint mais parfois il faut prendre les choses en main. Quand j’ai vu le rond point, j’ai compris qu’il y avait une opportunité. » Car le Norvégien avait étudié le roadbook. « J’avais repéré le finish et je savais qu’en prenant à droite dans le rond point je serais plus rapide. J+’ai attaqué là, c’était le bon moment. »

Cette victoire aussi, arrive au bon moment. Il était l’un des plus grands talents du futur après sa fantastique année 2009 et son doublé Gand-Wevelgem – Eneco Tour à 22 ans, mais n’a pas eu la carrière immense qui lui était promise. Son passage chez Sky lui a laissé de beaux souvenirs, mais c’est bel et bien chez Dimension Data qu’aujourd’hui, Boasson Hagen a acté son retour au plus haut niveau, sa renaissance. À l’arrivée en Provence, comme depuis le début du Tour, il y avait de nombreux supporters norvégiens. Cette fois, ils criaient des « Edvald, Edvald, Edvald » pleins d’allégresse. Et Boasson Hagen espère encore plus : « J’ai déjà fini près de la victoire aux Champs (deux fois quatrième en 2015 et 2016, ndlr), dimanche je vais faire le sprint et si possible pour la victoire. Je le ferai à fond. » Peut-être qu’à partir de cette ligne d’arrivée ici à Salon-de-Provence, on ne parlera plus de l’espoir déchu mais du champion qu’est le coureur de Dimension Data. Vu la bonhomie quotidienne du garçon, l’éventualité fait plaisir.

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