Rêver de maillot vert est naturel quand on est sprinteur. Mais tous ne peuvent pas compter sur le même investissement de leur équipe. Quand Nacer Bouhanni, Peter Sagan ou Mark Cavendish sont entourés de plusieurs coureurs, d’autres comme John Degenkolb, aujourd’hui chez Trek, doivent se débrouiller seuls. Plus que ça, l’Allemand, lui, devra même se mettre à la planche pour son leader.

Encombrant leader

Être dans la même équipe que Contador – sauf quand on s’appelle Armstrong – veut dire lui être totalement dévoué. Même lorsqu’on s’appelle John Degenkolb et qu’on a remporté Milan-Sanremo ou Paris-Roubaix. « Nous allons tous travailler pour Contador sur le Tour », confiait-il il y a quelques semaines à DPA. Pourtant, Degenkolb n’a envie que d’une chose : remporter sa première étape sur le Tour de France. Longtemps confiné à un rôle de poisson-pilote pour Marcel Kittel chez Giant, l’Allemand a connu une saison 2016 quasi-blanche après son accident du début d’année. Et dans sa nouvelle équipe Trek, les résultats ne sont pour l’instant pas à la hauteur de ses espérances. Il aurait voulu y remédier sur le Tour. Problème, il n’est même pas sûr de pouvoir compter sur son poisson-pilote, Koen de Kort.

De quoi forcément compliquer sa tâche. « C’est clair que je n’aurai pas quatre ou cinq coureurs à mes côtés. Les autres, oui, ils auront des coéquipiers avec eux », complète l’Allemand. Mais il n’est pas le premier. Mark Cavendish peut en témoigner. En arrivant sur le Tour de France 2012 avec Sky, le Britannique n’était qu’un coéquipier de plus pour Bradley Wiggins. Il n’était alors pas question de constituer le même train que celui qu’il avait connu chez HTC. Le champion du monde en titre d’alors a dû se débrouiller tout seul pour remporter trois étapes, dont celle des Champs-Elysées – où il avait reçu l’aide de son leader en jaune. Bel exploit tant Cavendish s’était épuisé à ramener les bidons et dicter le tempo au départ des étapes de montagne.

Une pièce d’horlogerie

Certains coureurs peuvent donc se permettre de ne pas avoir d’équipe : Cavendish en fait – ou en a fait – partie. Peter Sagan chez Tinkoff-Saxo l’a également prouvé, avec pour seul véritable lieutenant le fidèle Maciej Bodnar. Mais cette situation n’est évidemment pas facile à assumer et demande de solides épaules. Cavendish, en partant au bout d’une année chez Quick-Step en 2013, et Sagan, en rejoignant l’équipe Bora-Hansgrohe, ont préféré retrouver une certaine forme de confort, qui les met dans de meilleures conditions pour le sprint.

Un sprinteur sans train doit en effet s’accrocher à la roue d’un autre sprinteur, et donc se greffer à un autre train : la chance fait plus que jamais partie du jeu. L’incertitude est beaucoup plus grande. Sans oublier qu’un sprinteur accompagné en tire aussi profit en dehors des sprints. En 2010, Bernhard Eisel avait passé l’ascension du Tourmalet à motiver et booster un Cavendish à l’agonie. Sans son fidèle lieutinant autrichien, le sprinteur britannique aurait sans doute lâché prise et n’aurait pas remporté quelques jours plus tard l’étape des Champs-Elysées.

Seul contre tous ?

Alors oui, pour un Degenkolb, être seul chez Trek est délicat. Cela rend même quasi impossible l’objectif de maillot vert. Mais parfois, les intérêts du sprinteur et du leader de l’équipe coïncident. Par exemple, sur le dernier Giro, Fernando Gaviria, le sprinteur d’Etixx, a remporté la troisième étape en partie grâce à l’énorme travail de son équipe, qui a réussi une bordure et roulé à bloc pour que le leader au général, Bob Jungels, reprenne du temps. Une rareté. Le plus souvent, le sprinteur passe au second plan lorsqu’un leader d’envergure porte la même tunique. Tant pis pour l’Allemand. Tant mieux pour Bora, Lotto-Soudal, Dimension Data ou Katusha, qui auront moins à se soucier de John Degenkolb.

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