Notre chroniqueur Gianni Savio évoque l'actualité cycliste sans langue de bois, comme toujours - Photo Tim de Waele
Notre chroniqueur Gianni Savio évoque l’actualité cycliste sans langue de bois, comme toujours – Photo Tim de Waele

Le Giro est désormais arrivé à son terme, et notre chroniqueur Gianni Savio en tire le bilan. Vincenzo Nibali, son équipe Androni, les conditions météos dantesques mais aussi l’affaire Di Luca, le fantasque transalpin n’oublie rien, et évoque avec la Chronique du Vélo tous ces sujets sans langue de bois, bien sûr.

Nibali remporte avec brio un Giro mouvementé

Je pense avant tout que Vincenzo Nibali a amplement mérité son succès. Il a démontré qu’il était le plus fort sur un Giro fort intéressant. Grand favori de la course, il a parfaitement su gérer ses trois semaines, entouré d’une très bonne équipe et d’un directeur sportif de qualité en la personne de Giuseppe Martinelli. Je considère cette victoire au final comme celle du cyclisme que je considère « propre » , celui que j’aime.  Ca me fait donc très plaisir et le public ne s’y est pas trompé lors de son passage sur les routes. Lors du dernier dimanche à Brescia par exemple, ce fut la fête au sein des spectateurs. C’est d’autant plus plaisant qu’on avait prédit une victoire de Wiggins et une domination outrageuse de la Sky, mais le scénario ne s’est pas du tout déroulé comme prévu, à ma plus grande joie. C’est un avènement pour le Squale, au terme d’un Giro éprouvant.

De notre côté, on n’a pas vraiment eu de chance sur ce Giro, mais je tiens à féliciter mes coureurs pour ce qu’ils ont fait. Nous avons quand même établi un record avec 1680 kilomètres d’échappées cumulées durant l’épreuve. A l’attaque tous les jours, les passionnés du vélo nous ont évidemment remarqués en tant que protagonistes récurrents. Nos objectifs de départ étaient clairs, une victoire d’étape et un top 10 au général. Au final, Felline a raté de peu – pour 300 mètres – une victoire à Serra San Bruno, et il a manqué trente secondes à Franco Pellizotti afin d’arracher la dixième place du classement général. Ils ont en tout cas illustré ma philosophie de course qui fut présente tout au long de ce Giro.

Des conditions météorologiques bien gérées

Nous avons eu la malchance de tomber sur des conditions atmosphériques particulièrement mauvaises. On a été accueilli par la neige, c’était très original (rires). Regardons l’arrivée sous une épaisse couche blanche en haut des Tre Cime di Lavaredo , cela reste quelque chose d’assez déconcertant. Mais avant tout, il faut noter que ces conditions rugueuses marquées par des températures négatives furent remarquablement bien gérées par les organisateurs du Giro. Ils ont annulé une étape qui pouvait être très dangereuse pour nous tous, surtout que personne ou presque n’est habitué à ces conditions glaciales. Je pense que c’était une sage et importante décision, bien que ça ait pénalisé certains coureurs, comme Franco Pellizotti qui était en forme.

Ces conditions ont aussi permis de belles images. La plus époustouflante de ce Giro dans les mémoires collectives sera à mon goût l’étape d’un autre temps, arrivant aux Tre Cime di Lavaredo. On a vu de véritables athlètes qui ont prouvé un certain héroïsme. En revenant en arrière, on s’aperçoit qu’on était dans la dernière ligne droite du Tour d’Italie et que les aléas météorologiques avaient plus qu’entamé les organismes des coureurs. En finissant dans le lieu mythique des Tre Cime, le sport et particulièrement le cyclisme ont livré une belle leçon de courage. Celui qui est capable de surmonter ces difficultés en tenant compte des changements de physionomie mérité l’approbation de tous, et voir Nibali y gagner avec le maglia rosa sur ses épaules est quelque chose de fantastique pour tout le monde. Il s’est inscrit dans la légende…

Danilo di Luca est « un fou »

Et puis cette journée du vendredi 24 mai restera dans les mémoires avec cette affaire Di Luca ! Avant de détailler mon sentiment sur ce fiasco, je le résumerai en une phrase : « C’est de la folie ! »  Cette même folie qu’on retrouve dans ses propos lorsqu’il prononce à de maintes reprises la bonne parole. En fin de saison dernière, une réunion avait eu lieu à Montreux, en Suisse, pour prendre des mesures suite au scandale Armstrong. Tous les managers avaient aussi demandé des sanctions plus sévères au niveau du règlement de l’UCI en vigueur. Mais personnellement, j’ai aussi exprimé mon souhait de ne pas s’arrêter aux coureurs mais de sanctionner également les directeurs sportifs et managers. Il faut encourager les enquêtes internes et augmenter ses propres prises de responsabilités, afin de pouvoir éliminer le dopage. Oui, je le dis haut et fort, nous avons le pouvoir de se débarrasser du dopage en augmentant nos prises de position, mais c’est comme ça…

Sur ce Giro, ce cas se rajoute donc à l’affaire Sylvain Georges, qui est moins grave à mes yeux mais qui reste du dopage pur et simple. Tout cela est donc contre-productif pour l’image du cyclisme si l’on rajoute les pesants cas du passé, et surtout envers les efforts pratiqués ces dernières années, notamment concernant le passeport biologique, la plus grande avancée récente. Cela reste toujours présent, mais bon je pense que Di Luca est un double exemple des problèmes actuels. Il est fou, c’est clair, mais je pense qu’il ne faut pas s’arrêter  à ses excès de substance illicites, sinon c’est sûr que le cyclisme en pâtira…

Propos recueillis par Alexis Midol


 

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