A 24 ans, ce compatriote de Sean Kelly né en Belgique est en train de s’imposer progressivement parmi les meilleurs sprinteurs mondiaux. Et pour lui, le fameux adage “Dis-moi qui tu as battu, je te dirai quel vainqueur tu es” s’applique à merveille. On peut demander à Bouhanni, Degenkolb, Guardini ou Sagan ce qu’ils en pensent, ayant tous été devancés par Sam Bennett depuis le mois de février. Ses deux victoires au Tour de Bavière la semaine dernière le propulsent encore un petit peu plus dans une nouvelle dimension, celle des futurs vainqueurs d’étapes sur les grands tours.

Une progression freinée par les blessures

L’ancien pensionnaire de La Pomme Marseille a vu son éclosion retardée, enchainant maladies et blessures dans ses jeunes années. Mais c’est pendant une période de convalescence pour un problème au genou en juin 2013 qu’il prend conscience que ce qu’il veut par-dessus tout, c’est être cycliste. « J’ai tout mis en œuvre pour revenir pendant l’été, et le déclic est venu à ce moment-là. » Il revient à la compétition sur le Tour de Grande-Bretagne et le coureur âgé à l’époque de 22 ans s’y fait remarquer en remportant une étape et en terminant deux fois deuxième. Appartenant à la modeste équipe belge An Post – Chainreaction, il expose pour la première fois ses qualités de sprinteur au grand jour, et de grandes formations s’intéressent à lui.

C’est le Team Net-App, devenu cette année Bora-Argon 18, qui le recrute début 2014. En partant dans cette équipe allemande qui évolue en Continental Pro, il s’apprête alors à participer aux plus grandes courses du calendrier. Et s’il a réglé ce problème, à l’époque, il était très impressionné par ses adversaires. « Quand j’ai débuté c’était étrange de courir contre Kittel, Greipel et les autres avec une équipe complète autour de moi. Je ne voulais pas les décevoir, je me suis mis beaucoup de pression. Maintenant je suis habitué, je veux juste les concurrencer et obtenir de bons résultats. »

Visant une année pleine, il ne compte finalement que 52 jours de course à la fin de la saison, et se montre déçu. « C’était très frustrant, je voulais courir davantage. Je voulais être performant sur la première moitié de la saison et revenir avec plus de victoires, mais en regardant en arrière, on voit qu’on ne peut pas tout le temps être au top », explique alors le sprinteur irlandais. Après un bon début de saison où il enchaine les tops 10, il remporte la Clasica d’Almeria puis une belle étape sur l’épreuve bavaroise, bien que le plateau n’y était pas exceptionnel. D’ailleurs, conscient de qu’il a encore du chemin à parcourir, il en veut toujours plus et voit désormais plus grand, avec les courses de trois semaines en vue.

Objectif Tour de France

On connait l’importance, pour les sprinteurs, de gagner tôt dans la saison pour ensuite pouvoir se libérer. Et cette année, l’Irlandais a lèvé les bras dès sa première course par étapes en gagnant le sprint massif de la dernière étape du Tour de Qatar, avant de partir à la découverte de Milan-Sanremo, une épreuve qui pourrait bien lui réussir dans les années futures.

Mais avant, pour pouvoir s’entraîner plus minutieusement et bénéficier de meilleures conditions climatiques, il est parti d’Irlande pour emménager à Monaco. C’est ce qui lui a permis de franchir un palier, et de devenir l’un des piliers de sa formation depuis le départ de Leopold König vers la Sky cet hiver. Avoir une équipe à son service est d’ailleurs nouveau pour l’Irlandais, et il lui a fallu s’adapter. « Je ne suis pas habitué à avoir autant de soutien, confiait-il en mars dernier. Avant, je trouvais seul mon chemin dans les sprints. » Mais il convient de l’efficacité d’être bien entouré. « Au Tour du Qatar, nous avions mené le peloton dans le final de la dernière étape et cela a très bien marché. » Il avoue être cependant toujours en phase de réglages. «  Je recherche toujours ma place dans le train, que ce soit au niveau du timing ou du placement. Mais je suis sûr que ça va venir. » 

Blessé début avril suite à une chute en Belgique, il a repris au Tour de Bavière avec le résultat que l’on sait. En devançant à chaque fois Bouhanni et Degenkolb, les deux grands sprinteurs de la dernière Vuelta, il a de quoi nourrir de grosses ambitions sur les courses de trois semaines, qu’il va découvrir en juillet prochain avec le Tour de France. Pour son premier grand tour, il devrait être accompagné de son plus fidèle poisson pilote, l’ancien pistard Shane Archbold, qui l’accompagnait déjà chez An Post. Un homme très important pour Bennett. « L’équipe voulait quelqu’un qui était capable de m’aider pour 2015. Je pense que c’est le mec parfait, et en plus c’est un ami ! » Le natif de Wervik, en Flandre, semble au plus haut mentalement et se trouve boosté par son rôle de leader. « Cela me donne de la confiance de savoir que mon équipe croit en moi. Ils savent que je peux gagner des courses et ils me soutiennent, c’est une grosse source de motivation. » Si aucun pépin physique ne vient le perturber, il n’est pas impossible de voir Sam Bennett lever les bras en première semaine sur la Grande Boucle. C’est dire le coureur qu’il est progressivement devenu.

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