La victoire d’Alberto Contador sur la Vuelta a prouvé une chose : qu’un coureur de la trempe de l’Espagnol ne s’aligne pas au départ d’une course si importante pour y faire de la figuration. Malgré un début d’été complètement pourri, le Pistolero a décroché un troisième succès en autant de participations sur le Tour d’Espagne. La marque des très grands.

Une constante chez Contador

En ce mois de septembre 2014, on se dit qu’Alberto Contador revient de loin, parce que tout juste deux mois avant de lever les bras à Saint-Jacques-de-Compostelle, il disait au revoir au Tour de France à cause d’un trait de fissure au plateau-tibial. L’objectif d’une saison s’envolait en quelques minutes, à cause d’une chute anodine dont il n’était pas vraiment responsable. La dure loi du cyclisme selon certains, celle-là même qui avait frappé Chris Froome quelques jours auparavant, et qui touchera Nairo Quintana en fin d’été sur les routes espagnoles. Mais si cet épisode, qui aura donc duré près de deux mois, entre le vrai-faux forfait de l’Espagnol et sa victoire finale, illustre bien cet adage qui dit que les grands ne meurent jamais, ce n’est qu’un exemple sur durée réduite. En effet, cela se vérifie sur l’ensemble de la carrière du Madrilène, victime de gros coups d’arrêt, mais qui s’en est toujours remis, avec chaque fois une victoire sur une épreuve de trois semaines comme pour mettre les choses au clair vis à vis de ses adversaires et des observateurs.

La première fois, c’était en 2004. Une grosse chute sur le Tour des Asturies avait abouti à un début de rupture d’anévrisme, avant que la situation n’empire et que l’Espagnol ne soit plongé dans le coma pendant trois semaines. Cela aurait pu signifier la fin d’une carrière à peine débutée un an auparavant, mais pas du tout. En quelques mois, Contador se remet sur pied, et contre toute attente, poursuit son éclosion. En 2007, sa première victoire sur le Tour de France marque un incroyable tournant : revenu de l’enfer, l’Ibère prouve au monde du vélo qu’il est un champion. Cela sera encore le cas quelques années plus tard, quand l’affaire du clenbutérol oblige le Pistolero à observer un repos forcé d’un an, et de faire une croix sur deux victoires en grands tours (Tour 2010 et Giro 2011). La réponse, à son retour, sera au moins aussi dévastatrice, avec un succès sur son Tour national un mois seulement après avoir repris la compétition. Parce que Contador ne baisse jamais les bras, et que les obstacles le rendent encore plus fort.

Maître des grands tours

Le cyclisme a bien changé depuis un peu plus de trente ans, et comparer Contador à ses glorieux prédécesseurs Merckx et Hinault serait inapproprié. Quand eux allaient gagner sur Paris-Roubaix avec autant d’aisance que sur le Tour, l’Espagnol vit à l’heure de l’ultra-spécialisation. Toutefois, les épreuves de trois semaines sont aussi exigeantes que par le passé, si ce n’est plus, et les performances d’Alberto sur ces grands tours qu’il chérit tant ne peuvent que lui ouvrir les portes de l’Histoire de son sport. Officiellement, il compte six grands tours au palmarès, même si lui persiste à affirmer qu’il a gagné huit fois, comme le signe que sa suspension continue de faire débat à l’heure où des coureurs pris à la même substance se voient blanchis. Qu’importe, ce n’est là presque qu’un détail statistique, qui fait de Contador le sixième ou le troisième homme le plus titré sur grands tours selon qu’on se rallie à sa cause ou non. Car dans tous les cas, le voici derrière Merckx et Hinault, mais au niveau des Anquetil, Coppi et Indurain. Ça y est, le Pistolero fait partie des très grands.

On vous le concède, ceux qui en doutaient encore étaient des marginaux. Mais désormais, cela fait l’unanimité. Capable de gagner dans toutes les circonstances, à l’arrachée comme sur le Tour 2007 (23’’d’avance sur Evans) ou en surclassant ceux qui se présentaient comme ses adversaires deux ans plus tard (4’11’’ devant Andy Schleck), Alberto Contador a prouvé qu’il n’était pas un de ces coureurs capables de coups d’éclat, comme on a pu le voir ces dernières années. C’est même tout le contraire. Le Madrilène joue sur la régularité en même temps que son panache, et a remporté six (ou huit) des neuf (ou onze) grands tours auxquels il a participé. Encore mieux, sur le Giro ou la Vuelta, il n’a jamais connu l’échec. Et à chaque fois qu’il a pris le maillot de leader sur une épreuve de trois semaines, il ne l’a plus jamais lâché. Dire que ce garçon n’a pas encore 32 ans peut donc laisser augurer encore quelques succès. Passer la barre des dix ne paraît presque plus si illusoire…

Buy me a coffeeOffrir un café
La Chronique du Vélo s'arrête, mais vous pouvez continuer de donner et participer aux frais pour que le site reste accessible.