Il y a un an, Alexander Kristoff abordait le Tour des Flandres dans la peau d’un favori, quelques semaines après avoir terminé deuxième de Milan-Sanremo. Mais cette saison, tout est différent : en pleine campagne de classiques flandriennes, sa forme de 2015 paraît loin. Il doit batailler pour être parmi les meilleurs dès que le pavé se pointe, et à quelques jours du Ronde, ce n’est pas pour rassurer.

« Je ne me sens pas aussi fort que l’an passé »

Le début de saison 2016 a été marqué par les excellents résultats des grands leaders, et le Norvégien n’a pas manqué à l’appel lors des premières semaines de compétition. Sur les routes du Moyen-Orient, il est même parvenu à faire mieux que la saison dernière avec cinq étapes décrochées au Qatar et en Oman. Avec plus tard une seconde place sur Kuurne-Bruxelles-Kuurne, Kristoff a achevé le mois de février plein de confiance et une étiquette de favori pour les grandes classiques collée à la peau. Mais déjà, après le week-end d’ouverture, quelques déclarations auraient pu nous alerter. « Je me suis senti limite toute la journée, sauf lors du sprint », expliquait-il. Après un Het Nieuwsblad où il n’avait pas pu se mêler à la victoire à cause d’ennuis techniques, les retrouvailles avec les pavés n’étaient finalement pas complètement réussies.

Or les mauvaises ondes se sont propagées jusqu’en mars. Malgré un programme strictement identique à l’année passée, celui que l’on surnomme parfois « The Norwich Salmon Killer » n’a pas gagné autant. Loin de là. Après un zéro pointé sur Paris-Nice, où il fut pris de vitesse par Démare, Bouhanni et Matthews, il n’a fini qu’à une anonyme sixième place sur la Primavera après avoir été à contretemps durant tout le final. Mais c’est lors du GP E3 que les performances du Norvégien ont le plus inquiété. Invisible durant toute l’épreuve, il a même été contraint de déclarer forfait pour Gand-Wevelgem. « Les médecins m’ont dit que je ne pouvais pas aller à Gand car j’étais légèrement fiévreux. Après le GP E3 je ne me sentais pas bien et ça s’est ensuite empiré », lâchait-il déçu. Qu’il semble loin le printemps dernier, où il avait abordé le Ronde dans un état de forme optimal.

Alors oui, le sprinteur de l’équipe Katusha a relevé les bras sur la première étape des Trois jours de La Panne, mais il ne cache plus ses inquiétudes pour la suite de son printemps. « Je ne me sentais vraiment pas très fort aujourd’hui (mardi), surtout comparé à Lieuwe Westra (qui l’a accompagné dans le final, ndlr), a-t-il avoué. J’ai essayé de faire ma part du boulot mais je n’avais pas trop les jambes. J’ai dit à mon directeur sportif que je n’allais pas pouvoir remporter l’étape. Finalement, on est restés à trois jusqu’au bout et j’ai pu gagner grâce à ma puissance. Mais j’espère que j’aurais de meilleures jambes dans les prochains jours… » Une confession sincère qui témoigne d’un manque de forme et de confiance. « Une victoire est une victoire, c’est toujours bon pour la confiance. Et puis c’est toujours mieux qu’à Harelbeke. Mais j’espérais mieux. Je ne me sens pas aussi fort que je ne l’étais l’an passé à la même époque. » Tout le monde s’en était de toute façon rendu compte.

Un rôle de favori à assumer

Pourtant, Kristoff va devoir dès ce week-end assumer un rôle de leader auquel il ne peut plus échapper. Longtemps dans l’ombre, son arrivée chez Katusha en a fait un autre coureur, un chasseur de classiques redoutable. Aujourd’hui, le Norvégien est observé et craint par ses adversaires. Tout le monde reconnaît ses qualités : sa résistance à l’effort et sa terrible pointe de vitesse, entre autres. Il n’empêche que cette nouvelle pancarte va être compliquée à gérer pour lui. Cette année, personne ne le laissera partir aussi facilement au sommet du Kruisberg, comme ça avait été le cas en 2015. Il ne trouvera pas non plus des alliés aussi enclins à coopérer dans le final, alors qu’il y a un an, Terpstra avait roulé avec lui vers Audenaarde pour finalement se faire cueillir au sprint. Et surtout, le Norvégien ne peut plus compter sur Luca Paolini, son homme à tout faire, crucial dans ses victoires mais désormais devant sa télé.

Tout ça, malgré tout, n’inquiète pas le garçon de Stavanger, qui reste serein. « Je ne suis pas du genre à trop gamberger sous l’effet de la pression, à ressentir plus de nervosité sous prétexte que j’ai un titre à défendre. » Ca tombe bien, il aura besoin de tout son sang-froid dimanche, dans les bergs flamands. Mais d’ici là, les interrogations qui planent sur lui ne se seront pas évaporées, et elles restent nombreuses. Surement un peu trop pour le voir conserver sa couronne, ce que seuls trois coureurs ont réussi ces quarante dernières années : Cancellara, Boonen et Devolder.

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