Après deux étapes vallonnées pour passer des Vosges aux Alpes, la grande bataille des leaders doit reprendre dès demain avec l’étape qui mènera le peloton vers Chamrousse. On espère beaucoup de choses, mais surtout, que ça bouge, pour rester sur la première partie de Tour passionnante que l’on vient de vivre.

Le parcours du Tour devait nous empêcher de nous ennuyer : c’est jusqu’à maintenant une grande réussite. Dès les étapes anglaises, Nibali a sorti les dents pour se parer de jaune, avant que l’étape des pavés trois jours plus tard ne nous offre un très grand chambardement au classement général, puis que les Vosges ne fassent encore un peu plus de tri dans le top 10. Ce massif, justement, habituellement secondaire et mis à l’honneur pour cette 101e édition, a rempli son rôle à merveille. L’étape de la Planche des Belles Filles nous a tenu en haleine jusqu’au bout, s’ajoutant à la prise de pouvoir d’un Français au général à Mulhouse en la personne de Tony Gallopin, ensuite vainqueur à Oyonnax au terme d’une journée qui, peut-être pour la première fois cet été, n’aura pas été aussi intéressante que le laissait imaginer son profil. Qu’importe, les douze étapes vécues depuis le grand départ de Leeds nous ont offert un spectacle incommensurable par rapport aux éditions précédentes. Et on a vraiment envie que cela continue.

Même si les deux principaux favoris, Chris Froome et Alberto Contador, ont quitté le peloton en chemin, réduisant considérablement le suspense autour du futur vainqueur de la Grande Boucle, le spectacle peut encore être au rendez-vous. Surtout pour nous, parce que les Français sont là pour nous faire vibrer comme rarement. Le podium est si près qu’on croirait rêver éveillés. Mais Bardet, Pinot et Péraud ont vraiment les capacités pour le faire, chose que l’on attend depuis Richard Virenque en 1997. Il est alors facile de comprendre l’engouement tricolore autour de dix jours à venir qui s’annoncent riches en émotion. De Chamrousse à Hautacam en passant par Risoul et le Pla d’Adet, les grandes étapes et les arrivées en altitude ne vont pas manquer. Et chaque jour, à n’en pas douter, il y aura des tricolores pour titiller les cadors du peloton. De ce fait, même sans les deux maîtres annoncés dans les cols, le public aura de quoi vibrer. Ca fait du bien, vraiment.

Car en effet, après deux éditions plutôt ternes, où les Sky ont cadenassé la course, lorsqu’il le fallait du départ fictif jusqu’au sommet de l’ultime col, il nous tardait de voir un peu de mouvement. De voir une sélection par l’avant, comme l’a fait Nibali dans la Planche des Belles Filles, et des coureurs lever le cul de leurs selles, comme Pinot qui ne voulait pas laisser partir l’Italien trop loin. De voir aussi des garçons qui croient en leurs qualités, qui n’ont pas peur d’aller chercher un maillot jaune ou une victoire d’étape, à l’instar de Gallopin et Kadri. Et en plus ils sont Français, de quoi démultiplier notre joie. Car il faut le dire, le Français, s’il a tendance à rapidement critiquer ses champions, sait aussi apprécier chaque victoire. Alors bien sûr, on ne peut pas se réjouir des abandons de Froome et Contador, parce que ce sont d’énormes champions et qu’on attendait quand même avec impatience leur duel annoncé en montagne. Mais si cela permet de décomplexer le reste du peloton, de Nibali à notre trio tricolore, on ne va pas s’en plaindre plus que ça.

Ces dernières années – ou plutôt depuis 2011 et l’épopée de Thomas Voeckler -, le public ne se sentait pas transcendé par le Tour et ses protagonistes. Wiggins et Froome n’ont pas enchanté, par manque de panache voire d’humanité dans leur façon de l’emporter. Mais nous sommes prêts à prendre les paris : le Vincenzo Nibali de 2014, sans doute futur maillot jaune sur les Champs-Elysées, mais aussi tous les autres, sauront s’attirer la sympathie des observateurs les plus aguerris comme des novices. Parce qu’ils nous rappellent que le vélo n’est pas forcément prévisible. Que le maillot jaune peut passer les pavés mieux que le dernier vainqueur de Paris-Roubaix, que les Français ont les moyens de gagner des étapes à la pédale, et peut-être même de monter sur la boîte à Paris. Et on aime ça. On en redemande même. Alors messieurs, il vous reste dix jours. Et dès demain, il ne sera pas question de chômer.

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