Il est le gros mystère de cette semaine au Tour du Pays-Basque. Sergio Henao, quatre jours de course dans les jambes en 2015 avant d’entamer l’épreuve ibérique, s’est pour le moment montré étincelant. Maillot jaune sur les épaules avant les deux dernières étapes, le Colombien a surpris tout le monde.

Douze mois particuliers

Depuis la fin de l’hiver 2014, le natif de Rionegro est passé par toutes les émotions. En mars de l’année passée, à cause de chiffres jugés anormaux dans son passeport biologique, le Colombien avait été mis sur la touche par sa propre équipe. La Sky, cristallisant déjà de nombreuses suspicions, ne voulait pas risquer de ternir son image. Henao est donc retourné au pays pour subir de nombreux examens médicaux de la part de son staff. Le but, vérifier que les chiffres incriminés n’étaient dus qu’à son entraînement en altitude au cours de l’hiver. A l’époque, le principal intéressé n’a pas d’autre choix que de faire le dos rond. « Je partage et comprends l’importance que donne l’équipe à mes derniers contrôles sanguins. J’ai toujours cru dans les valeurs éthiques du cyclisme que sont l’honnêteté et le respect des règles », assurait alors Henao. Une démarche qui se révèlera fructueuse, permettant au grimpeur de poche de la formation britannique de retrouver le chemin de la compétition au mois de juin.

Malheureusement, une chute et une grave blessure au genou auront raison de lui. Retour en Colombie, saison terminée. Une année noire pour le garçon d’alors 26 ans, qui ne peut plus être présenté comme un espoir. Parfois enchantant mais aussi régulièrement décevant, Henao retrouve donc les pelotons assez tardivement, en mars dernier sur la Semaine Coppi e Bartali. Pour un résultat assez anecdotique : dix-septième à plus de sept minutes du vainqueur Louis Meintjes, il n’a pas fait preuve du punch qu’on a pu lui connaître. Au contraire, il s’est montré incapable de peser sur la course, laissant Ben Swift et Konstantin Siutsou prendre le leadership de l’équipe. De quoi laisser penser qu’on ne retrouvera pas de si tôt le Henao deuxième de la Flèche wallonne en 2013 ou neuvième du Giro en 2012. Rien de surprenant cependant compte tenu de la longue absence du Colombien. Il paraissait logique de devoir lui laisser le temps de reprendre le rythme.

Renaissance expresse

Sauf que deux semaines après son retour sur les routes italiennes, Sergio Henao semble déjà au top sur le Tour du Pays-Basque. Alors que l’équipe Sky emmenait dans le Nord de l’Espagne des coureurs comme Nieve et Kiryienka pour assurer des accessits, c’est bien le Colombien qui crève l’écran depuis deux jours. Vers Zumarraga hier comme vers Eibar ce jeudi, c’est lui qui a fait péter le peloton, avec des attaques tranchantes qui le caractérisent si bien. S’il n’a pas réussi à concrétiser par des succès ces deux journées lors desquelles il semblait pourtant le plus fort, il se console pour l’instant avec le maillot de leader, de justesse accroché à ses épaules – il est dans le même temps que Quintana et Rodriguez. Une situation inimaginable il y a encore quelques semaines, lorsqu’on voyait Henao à la rue sur la deuxième étape de la Semaine Coppi e Bartali.

Mais c’est justement là le propre du grimpeur colombien, capable de passer des abysses aux sommets en un rien de temps. Il l’avait d’ailleurs prouvé le mois dernier, se reprenant presque parfaitement sur l’ultime étape – la plus difficile -, sixième au sommet du Roccapelago. L’épisode s’est répété de nombreuses fois au cours de sa jeune carrière, comme sur la Vuelta 2012 : 32e de l’étape arrivant aux Lagos de Covandonga, complètement lâché par ses adversaires au général, il termine deux jours plus tard sur les talons de Contador et Valverde à Fuenté Dé. Du Henao tout craché, un coureur rarement dans le calcul et qui le paie parfois très cher, mais qui nous offre aussi du grand spectacle à chaque fois que sa condition est bonne. A dix jours de l’Amstel Gold Race, celui qui avait réalisé un très gros printemps en 2013 est donc sur des bases similaires : il montre le bout de son nez au Pays-Basque, avant d’être au meilleur de sa forme sur le triptyque ardennais. Toujours aussi énigmatique, Henao est donc bien de retour.

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