Leipheimer en position aérodynamique lors d'un contre-la-montre, une chose à laquelle il nous a habitué - Photo Flickr
Leipheimer en position aérodynamique lors d’un contre-la-montre, une chose à laquelle il nous a habitué – Photo Flickr

Leipheimer s’est inscrit dans la durée. Sulfureux au possible, l’ancien disciple de Lance Armstrong a su s’émanciper de la filière américaine pour faire son trou en Europe. Amoureux des Tours de France et de Californie, le natif du Montana aura particulièrement marqué les esprits grâce à son style inégalable dans l’art du contre-la-montre, dont il perfectionna la technique « de l’œuf ». Brillant sur les courses par étapes, il se distingua sur les courses d’une semaine avec des succès en Suisse, en Allemagne et sur le Dauphiné Libéré.

Une montée en puissance progressive

D’abord amateur sur les routes du vieux continent, Leipheimer regagne les Etats-Unis au cours de l’année 96. Il passe professionnel sur le tard, à 24 ans. Champion des Etats-Unis de critérium, il fut déchu de son titre suite à un contrôle positif, une première expérience avec les autorités judiciaires qui n’empêchera pas l’audacieux coureur de faire son trou au cours des années à venir. Méthodiquement, il récite ses gammes sur le circuit américain dont il devient l’un des coureurs les plus en vue. Double vainqueur du Tour de Beauce, il vient de composter son ticket d’accession vers l’élite du cyclisme : l’US Postal lui ouvre ses portes en 2000.

Après une année d’apprentissage au sein de la formation dirigée par Johan Bruyneel, où Lance Armstrong s’impose comme le patron d’une organisation sans faille, Levi Leipheimer se révèle brusquement au cours de la Vuelta 2001. Régulier en montagne, où il accompagne son leader Roberto Heras jusqu’au sommet des cimes, il profite de la présence de trois contre-la-montre pour accéder à la 3e place du classement général final. Une première pour un Américain, une performance de choix pour Leipheimer qui change de dimension. 4e du championnat du monde chronométré, il accède au 18e rang de l’UCI.

Possédant un nouveau statut, et ne pouvant briguer une place d’importance dans une équipe US Postal fortement pourvue en talents, Leipheimer franchit le pas et paraphe un contrat avec l’équipe Rabobank de Jan Raas, qui voit en lui un potentiel futur vainqueur du Tour de France. Avec pas moins de 182 kilomètres de contre-la-montre au programme, le parcours de la Grande Boucle 2002 semblait effectivement taillé pour un Leipheimer dont les capacités progressent de jour en jour. Le débutant connaîtra pourtant deux désillusions consécutives sur le territoire français. D’abord correct 8e du Tour 2002, il sera rapidement contraint à l’abandon en 2003, puis subira deux terribles défaillances sur une Vuelta qu’il abordait dans la peau d’un outsider crédible. Clairement, le passage de Levi chez Rabobank fut un échec complet.

C’est un homme, Hans-Michael Holczer, qui va complètement inverser le destin du coureur américain en perdition. Le manager de l’équipe Gerolsteiner n’hésite pas une seule seconde au moment de s’offrir un Leipheimer qui, en quelques mois, va retrouver toute son efficacité. 3e du redoutable Critérium du Dauphiné Libéré, le leader de l’équipe allemande surprend en montagne sur les routes du Tour de France, dont il prend une 6e place révélatrice de sa confiance retrouvée. Vainqueur du Tour d’Allemagne au mois d’août, Leipheimer est un homme neuf. La saison 2006 sera un peu plus contrastée avec une nouvelle performance remarquable sur un Dauphiné qu’il remporte avec brio, mais aussi un échec sur le Tour de France (13e) dont il partait pourtant favori en l’absence d’Ullrich, Basso et Vinokourov.

Le bras droit de Contador chez Astana

Armstrong et Heras partis, la Discovery Channel se cherche un nouveau leader au moment d’aborder la saison 2007, Popovych et Savoldelli ne pouvant à eux seuls parvenir à satisfaire la soif de l’équipe américaine sur les courses par étapes. Outre le jeune Alberto Contador, c’est tout naturellement vers son ancien coureur Levi Leipheimer que Johan Bruyneel se tourna pour compléter son effectif. Le Californien d’adoption commence plutôt bien sa saison puisqu’il remporte non sans mal son premier Tour de Californie dans un duel acharné avec Jens Voigt. Egalement présent sur les Tours du Missouri et de Géorgie, il conclura sa domination sur le circuit américain avec une victoire lors du championnat national des États-Unis. Au départ du Tour de France pour la cinquième année consécutive, Leipheimer atteint enfin la plénitude de son potentiel en livrant une bataille de toute beauté avec Michael Rasmussen, Alberto Contador et Cadel Evans pour le gain d’une Grande Boucle mémorable. Impressionnant de technique et de maîtrise dans le contre-la-montre final entre Cognac et Angoulême qu’il écrase avec fermeté, Leipheimer verrouille sa 3e place synonyme de podium sur les Champs, et n’échoue qu’à 31 secondes de Contador au général.

Fidèle au champion espagnol, il suivra celui-ci au sein de l’équipe Astana, qui, Vinokourov banni, opéra un lifting fabuleux en débauchant une grande partie des meilleurs éléments de la défunte Discovery Channel. Écartée par ASO des principales épreuves du calendrier, comme le Tour de France, Astana se console partout où elle le peut en multipliant les victoires. Leipheimer apporte bien évidemment sa pierre à l’édifice. Un doublé sur le Tour de Californie, des victoires d’étapes chronométrées à la pelle, une place d’honneur sur le Dauphiné, l’Américain est inarrêtable ! Encore plus fort, sa 2e place sur le Tour d’Espagne où il tracte jusqu’au bout un Contador aussi volant que lui sur les pentes de l’Angliru ! Vainqueur des deux chronos, Leipheimer termine dauphin de son leader en le talonnant de très près. Placé dans une autre équipe, il aurait sans doute été tout proche de remporter ce grand tour.

Suite à cette grande saison, il se spécialisera de plus en plus dans les épreuves du circuit américain, dominant les nouveaux Tours de Gila, de l’Utah, du Colorado et de Californie. Moins présent sur les épreuves de trois semaines, où il connaîtra plusieurs grosses défaillances en dernière semaine, Leipheimer remportera encore un beau Tour de Suisse devant Cunego, ainsi qu’un troisième Tour de Californie. Légèrement déclinant, exposé à la croisade de l’USADA contre Lance Armstrong qui l’obligera à témoigner contre l’ancien septuple vainqueur du Tour de France, il s’était vu supprimer une bonne partie de son palmarès… Licencié par l’équipe Omega Pharma et suspendu 6 mois, on attendait un retour de Leipheimer au cours du printemps. Mais à bientôt 40 ans, la motivation et les jambes n’étaient sans doute plus présentes pour le pousser à continuer.

Louis Rivas


 

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