Sur le Tour des Flandres, Jürgen Roelandts a réalisé un beau numéro, immité une semaine plus tard par Vanmarcke - Photo lottobelisol.be
Sur le Ronde, Roelandts a réalisé un numéro, imité une semaine plus tard par Vanmarcke – Photo lottobelisol.be

Le bilan belge sur les flandriennes est famélique : aucune victoire. Mais à y regarder de plus prêt, le cyclisme du pays sortira peut-être grandi de ce début de printemps raté. Avec la génération des Hoste, Vansummeren et surtout Boonen qui commence à s’essouffler, les observateurs commençaient légitimement à douter d’une relève encore faible et plus orientée vers les ardennaises. Sur le Tour des Flandres et Paris-Roubaix, Greg Van Avermaet, Jürgen Roelandts et Sep Vanmarcke, tous les trois nés entre 1985 et 1988, ont prouvé qu’ils avaient le niveau.

Van Avermaet, plus belle la vie sans Gilbert

Puncheur ou flahute ? C’est la question que beaucoup de monde se pose, et à laquelle même le principal intéressé ne semble pas capable de répondre. Après des débuts tonitruants, ponctués d’un maillot par points sur la Vuelta et d’un titre honorifique de flandrien de l’année – remporté devant Boonen et Devolder, pourtant vainqueurs respectivement de Paris-Roubaix et du Ronde -, beaucoup voyaient en lui un futur grand du cyclisme mondial. Trop de pression d’un coup ? Peut-être, puisque le Flamand stagne alors durant deux ans, décevant inlassablement ceux qui croyaient en lui. Il faudra attendre un déclic, venu des Championnats du Monde de Geelong et de son transfert chez BMC, pour le voir de nouveau en haut de l’affiche. Depuis, Greg Van Avermaet collectionne les très bonnes performances sur les classiques et fait régulièrement partie des gros outsiders : que ce soit sur Milan-Sanremo, sur les flandriennes ou sur les ardennaises.

Continuant de jongler entre un rôle d’équipier pour Gilbert ou Ballan et celui de leader lorsque l’un des deux est absent, on ne sait toujours pas s’il est meilleur sur les pavés flamands ou sur les bosses des Ardennes. Mais cette question mérite-t-elle d’être postée ? Pourquoi ne pas considérer Van Avermaet comme un coureur bourré de talent, possédant une endurance et une polyvalence qui lui permettent de pouvoir briller sur tous les terrains ? Souvent comparé à Sagan et Gilbert, il est aussi doté d’une pointe de vitesse qui devrait lui permettre de conclure. Mais justement, conclure, finir le travail, c’est ce qu’il manque à Greg Van Avermaet. Trop souvent placé, il n’a encore jamais gagné de classique World Tour. Quelques corrections s’imposent encore pour faire taire toutes les critiques.

Vanmarcke, une progression linéaire

Le Courtraisien est un coureur qui, depuis ses débuts professionnels, passe les paliers, saison par saison, avec une perfection rare. Lors de sa première année pro, Vanmarcke impressionne sur Gand-Wevelgem et termine juste derrière Bernhard Eisel au sprint, malgré des crampes qu’il qualifiera d’atroces lors des derniers kilomètres. La saison suivante, en 2011, il quitte Topsport-Vlaanderen pour rejoindre Garmin et son armada de flandriens. Terminant 4e du Gp E3, il participe ensuite aux deux monuments pavés dans un rôle d’équipier. Et malgré le travail accompli pour protéger ses leaders, il parvient à se classer dans les 20 premiers de Paris-Roubaix. Un an plus tard, il gagne sa première semi-classique, l’Omloop Het Niewsblad, devant l’homme belge de la saison, Tom Boonen. Le tout malgré un rôle de leader qui était attribué avant le départ à Heinrich Haussler. Une victoire plein d’audace et de panache.

On attendait alors la confirmation, cette saison chez Blanco. Et depuis sa performance de dimanche, sur l’Enfer du Nord, on ne se pose plus de questions. Flandrien dans l’âme, humble et doté d’un énorme panache, il sait ce qu’il veut. Terriblement ambitieux, il refusa de participer aux Championnats du Monde Espoirs en 2010, prétextant qu’il n’avait “plus rien à faire dans cette catégorie”. Ses choix de carrière vont dans ce sens : il a choisi de grosses écuries tout en évitant les deux ogres belges – OPQS et Lotto – pour s’éloigner au maximum d’une pression qui aurait pu freiner sa progression. Du haut de son mètre quatre-vingt-dix, Sep Vanmarcke pourrait être le nouveau fer de lance des classicmens belges. Un passage de témoin qui fait penser à celui qui avait été opéré entre Johan Museeuw et Tom Boonen il y a quelques années.

Roelandts, une confiance à toute épreuve

Lui aussi de la “génération 85”, avec évidemment Van Avermaet, mais aussi Jelle Vanendert, ou encore Gianni Meersman, il ne tarda pas, chez Lotto, a exposer ses talents. Deuxième du Nokerse Koerse derrière le regretté Wouter Weylandt mais devant André Greipel, il enchaîne avec une victoire d’étape au Tour de Pologne et des places d’honneurs sur l’Eneco Tour. Mais surtout, il devient champion de Belgique, à la surprise générale, lors de sa première année professionnelle. La suite, comme souvent, ne sera pas aussi prodigieuse, le Flamand accumulant les places d’honneur, un coup au sprint, un coup sur une classique. Toutefois, souvent équipier, Jürgen Roelandts n’a pourtant jamais quitté l’équipe qui l’a lancé dans le grand bain. Une reconnaissance de plus en plus rare.

Et c’est donc cette saison,en 2013 et après une année 2012 ponctuée de galères, qu’il réalise son premier gros coup : une troisième place totalement méritée sur le Tour des Flandres. Il avait déjà prouvé qu’il possédait les qualités requises pour se montrer à son avantage sur ce genre d’épreuves, démontrant des capacités d’endurance particulièrement satisfaisantes, un sens du placement et une tactique que peu peuvent se targuer de posséder. Mais jusque là, cela n’avait jamais suffit. Longtemps considéré comme un coureur moyen par les médias et trop souvent sous-estimé, Roelandts aura donné raison à son équipe qui n’a pas recruté de spécialiste des pavés à l’intersaison. Une décision rare qui prouve que les dirigeants de Lotto-Belisol comptait sur le natif d’Asse. Pour ces trois là, à n’en pas douter, rendez-vous est donc pris pour l’année prochaine, où tout un peuple espère les voir encore meilleurs, et pour qui les classiques échappent un peu trop souvent aux mains belges.

Mehdi Khouch


 

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