Maillot blanc un temps sur le Tour d'Italie, Rafal Majka a montré que la Pologne avait un grand avenir - Photo Saxo Tinkoff
Maillot blanc un temps sur le Tour d’Italie, Rafal Majka a montré que la Pologne avait un grand avenir – Photo Saxo Tinkoff

A l’instar de son homologue colombien, de retour sur le devant de la scène, la Pologne a repris du poil de la bête. Le pays réputé pour beaucoup de choses mais pas pour le cyclisme, fort de son Tour national de plus en plus prisé, s’éveille et permet l’éclosion de jolis talents depuis quelques années, dont Kwiatkowski ou Majka. De quoi compter sur eux pour l’avenir.

Une culture du vélo indéniable

Dans ce pays souvent victime collatérale des agissements des diverses puissances mondiales durant le XXe siècle, la passion d’une partie d’un peuple pour le sport cycliste a prit très rapidement après le lancement du premier Tour de France en 1903. Jozef Lange, premier champion national de la discipline en 1921 fut le premier d’une longue liste qui comportera le premier grand champion du pays en la personne de Boleslaw Napierala, héros national d’avant guerre avec ses deux tours nationaux et ses multiples titres  combinant la route et le cyclo-cross. D’autres grandes figures auront fait vibrer le pays qui ne s’internationalise pas encore au niveau des courses, la faute à un bloc soviétique répressif. Crée en 1948, la fameuse Course de la Paix voit le jour en compagnie de sa figure de proue, Stanislaw Krolak. Très porteuse tant du côté compétitif que humain et social en raison du contexte, le monde prend conscience d’un engouement présent en Europe de l’est vis-à-vis du vélo. Forte de cette expansion notable, Varsovie voit en 1971 son premier médaillé olympique lors des Jeux de Munich, Edward Barcik.

Mais le début des années 1980 est un tournant pour les pays situés derrière le rideau de fer, prenant de plus en plus d’importance. En 1987, Lech Piasecki envoie un signal fort en étant le premier coureur d’Europe de l’est a porter le maillot jaune d’une Grande Boucle lancée de Berlin, ville martyr. Déjà champion du monde amateur deux années auparavant, il va lancer une nouvelle phase du développement des blancs et rouges dans la hiérarchie mondiale. Les Lesniewski et Baranowski s’illustrent au plus haut cran mondial dans les courses par étapes, le dernier cité arrivera même a grimper dans le top 15 de la course jaune et de sa cousine rose. Dans un autre registre, on peut citer le méconnu Gwiazdowski, vainqueur d’un championnat de Zurich a l’apogée de sa renommée en 1999. En hommage au mouvement social monstre dans les chantiers navals de Gdansk, la course de la Solidarnosc est instaurée histoire de gratter encore un peu plus d’importance. Cette longue montée en puissance de cette historique nation est donc en plein essor aujourd’hui, au XXIème siècle, sur les bases de son histoire.

Une dynamique retrouvée

Malgré quelques années de flottement durant le début des années 2000, c’est incontestablement dans un nouveau souffle que la Pologne est en train de trouver sa place. Consolidant ses ressources autour de la Course de la Paix, entre temps adaptée au format espoirs, la formation devient le pari essentiel des fédérations locales, prêtes à patienter pour voir leur long travail porter leurs fruits. Parallèlement prend jour la première formation nationale de l’histoire du pays lors du nouveau millénaire, la CCC. Cette dernière, se voyant accéder au statut d’équipe « Continental Pro » en 2010 est constituée d’un mélange de coureurs d’expérience et de jeunes en devenir, malgré le fait qu’elle n’ait jamais pu réussir à courir « son » Tour de Pologne… Mais qu’à cela ne tienne ! Sur la célèbre Course de la Paix ayant vu différentes stars mondiales émerger comme Velits, Voigt ou Kreuziger, c’est le très jeune Michal Kwiatkowski qui crève l’écran, en devenant double vainqueur en 2008, à seulement 18 ans ! Passé professionnel chez Caja Rujal puis immédiatement passé dans le grand bain World Tour, il ne cesse d’impressionner par ses qualités qui font de lui l’un des coureurs les plus complets pour son âge. Très bon rouleur, il a forgé ses victoires sur les trois jours de Flandre-Occidentale, mais nous a aussi surpris par ses dispositions dès que la route se cabre. Deuxième à domicile l’an passé derrière Moreno Moser, il a épaté sur le Prati di Tivo lors du dernier Tirreno, conclut à la quatrième place finale, mais aussi sur les classiques ardennaises. Quatrième d’une Amstel surprise, il est sorti des lacets du Mur de Huy en cinquième position devant d’intenables spécialistes expérimentés. Le protégé d’Omega-Pharma Quick-Step suscite des attentes mais garde la tête sur les épaules, tout comme Rafal Majka.

Totalement inconnu lorsqu’il passe pro dans l’équipe Saxo Bank de Bjarne Riis, ce dernier fait sourire lorsqu’il déclare vouloir lui décerner le leadership sur le Tour d’Italie l’an passé. Finalement blessé, il brille sur la Vuelta en secondant Contador. Propulsé aux rênes de l’équipe au mois de mai sur un Giro apocalyptique, il fait mieux que rivaliser et livre une bataille acharnée avec le talentueux Betancur pour le gain du maillot blanc. Mais surtout, ce qu’on doit retenir, ce ne sont pas exclusivement ces deux noms qui cachent bien d’autres talents. Premyslaw Niemiec, lieutenant modèle de la Lampre et sixième du dernier Giro, Michal Golas ou encore Tomasz Marczynski ont pris du galon et doivent guider la classe biberon qui est prête à concurrencer n’importe qui. Alors oui, la Pologne a réussi son grand saut dans l’échiquier mondial et doit se maintenir à la position qu’elle mérite, sachant qu’avec un tel vivier de coureurs, tout est possible !

Alexis Midol

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