C'est dans des conditions dantesques que les leaders ont dû se livrer bataille ces derniers jours - Photo Giro d'Italia
C’est dans des conditions dantesques que les leaders ont dû se livrer bataille ces derniers jours – Photo Giro d’Italia

Ce week-end du Giro devait laisser des traces,. Il y en a eu, mais pas de la manière dont on pouvait l’imaginer. Se nichant dans les mythiques Alpes et ses cols culminant souvent à plus de 2000 mètres, la caravane rose s’est heurtée à des conditions exécrables dignes d’un mois de février. Si la journée de repos devrait faire le plus grand bien aux coureurs, un nouveau calvaire pourrait se présenter à partir de jeudi avec l’entrée dans les majestueuses Dolomites. Alors, est-ce un malheureux hasard ou a t-on affaire à une prise de risque trop grande des organisateurs ?

Un hiver qui perdure et des coureurs désemparés

Depuis le début de saison, de nombreuses courses ont été perturbées par les conditions météorologiques, avec notamment un Milan-Sanremo qui est rentré dans les annales. Mais tout cela, c’était il y a plusieurs mois, et aujourd’hui l’hiver joue les prolongations, s’invitant même sur la course rose où le soleil est si souvent de mise. Ayant contraint les téléspectateurs à ne vivre que les 450 derniers mètres de l’étape arrivant en haut du Jafferau, c’est en gladiateur, selon les mots de son équipe, que Mauro Santambrogio a réalisé un exploit sous les yeux incrédules des spectateurs qui n’avaient jusque là aucune information sur la course. Mais ce sont toutes les dernières 48 heures qui ont été transformées en un chemin de croix. Après le retrait du col de Sestrières, le chemin menant au fort du Jafferau fut un supplice, même pour les favoris, presque arrêtés dans les derniers hectomètres. Et que dire de l’étape dominicale, présentée comme la probable étape reine avec son enchaînement Mont-Cenis – Télégraphe – Galibier en guise de souvenir à la légende Marco Pantani ? Si le préfet de Savoie eut à l’origine interdit le passage du Giro sur ces lieux, un compromis fut trouvé pour faire passer le peloton au final sous un temps semblant venir des cieux, se déchaînant sur de courageux mortels.

Le son de cloche qui rime sans doute dans les bus, c’est un « Ouf ! » de soulagement avant la journée de repos bienvenue et deux étapes dites de transition. Ces dernières précéderont le triptyque final assurément explosif par son contenu, mais qui risque bien d’être une nouvelle fois balayé par l’épaisse couche blanche qui règne actuellement sur la Cima Coppi ou le Stelvio. Mais le danger ne va pas se concentrer en cet endroit, puisque dès mardi, il faudra de nouveau franchir le Mont-Cenis en début d’étape. Heureusement, jeudi, le cronoscalata de Polsa devrait être épargné, mais c’est surtout vendredi que l’on pourrait assister, une fois n’est pas coutume, à une étape titanesque. Gavia, 2618 mètres, Stelvio, 2758 mètres et Val Martello, 2059 mètres. On souhaite d’ores et déjà un bon courage aux équipes mobilisées pour déneiger, et nous permettre d’obtenir un Tour d’Italie comme on les aime…

Et si RCS était allé trop loin ?

Tout de même, un constat s’impose. La « furia italiana » de RCS Sport, représentée par ses deux hommes forts de ces dernières années, Angelo Zomegnan et Michele Acquarone, a t-elle dépassé les limites du sport ? En tout cas, ce n’est pas la première fois que la question se pose. En 2011, sous un temps déjà rendu chaotique par les averses, le Monte Crostis et sa descente terrifiante avaient été zappé du parcours après le décès tragique de Wouter Weylandt. Mais l’exemple le plus frappant remonte un peu plus loin, au 5 mai 1988. Ce jour-là, Erik Breukink réalisa une performance ahurissante pour gagner à Bormio sous une neige omniprésente, forçant les leaders à traverser le légendaire Gavia sous une tempête neigeuse démentielle. Nous étions encore en 1988, et des voix commençaient déjà à s’élever contre la folie du sport cycliste.

Par ailleurs, si à première vue la neige de mai fait sourire pas mal d’observateurs, elle n’est pas si rare que ça. A de si hautes altitudes, les températures sont logiquement très faibles et en fonction des types de saison hivernales, la neige reste souvent collée au sommet du Stelvio ou du Galibier, qui doivent attendre juin pour être totalement opérationnels. A t-on surestimé les aléas climatiques en choisissant le Galibier comme théâtre d’une arrivée cycliste ? Pire, doit-on remettre en cause le triple enchaînement de vendredi par peur de revivre un fiasco ? C’est toutes les questions qu’on peut se poser, car, rien ne semble arrêter la volonté de RCS qui nous propose chaque année de plus en plus de spectacle, en frôlant par endroits l’indécence. Il faudra évidemment faire le bon choix car l’image de cette édition 2013 peut en pâtir, dénonçant un parcours « tronqué » ou alors « inhumain » comme avait déjà été décrite la course d’il y a deux ans…

Alexis Midol


 

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