Certes, on s’attendait à un tel spectacle : une échappée matinale reprise tardivement, une tentative vouée à l’échec dans la Cipressa, une neutralisation dans le Poggio et un sprint final qui sacrerait celui qui en avait gardé le plus. Mais maintenant que c’est fait, cela fait vraiment passer cette 105e Primavera pour une classique comme les autres. On ne peut pas avoir du grand spectacle chaque année, mais là clairement, c’est la déception qui prime. Même si la victoire de Kristoff est tout sauf imméritée.

Heureusement, il y avait Nibali

Sept fuyards partis tôt ce matin, et dont le dernier a été repris quelques hectomètres avant le début du Poggio seulement, cela suffit à montrer que la journée n’a pas été très agitée sur les routes de la côte ligurienne. C’est vrai, la pluie qui a fait son apparition n’a pas aidé, obligeant les coureurs à se vêtir de couches supplémentaires, et les incitant surtout à rester bien au chaud – façon de parler compte tenu de la météo – au sein du peloton. Du coup, il a fallu attendre pour que la course s’emballe – là encore, façon de parler… Et c’est un attaquant né, Vincenzo Nibali, qui a sonné la révolte dans la Cipressa. Plus pentue que le Poggio, la difficulté placée à moins de trente kilomètres de l’arrivée a donc été le théâtre de l’une des seules offensives sérieuses du jour. Problème, celui qui était monté sur le podium de l’édition 2012 n’a pas été suivi. Difficile, dans ses conditions, de creuser un réel écart.

Une nouvelle fois avec Nibali, on a donc eu droit à du panache et du spectacle, mais sans victoire au bout. Très honnêtement, dès son attaque et compte tenu de son isolement, c’était presque couru d’avance. On ne va cependant pas le lui reprocher, car sans lui, on se serait encore ennuyé ferme entre la Cipressa et le Poggio. Ou plutôt entre Milan et Sanremo. Car même le fameux Poggio a semblé inutile. André Greipel y a perdu ses espoirs de victoire, et Nibali y a été rattrapé. Mais c’est tout. Cancellara et Sagan n’ont pas bougé, et Gilbert a fait mine d’y aller avant de se rasseoir. Les passages à 8% ont été engloutis au train, situation idéale pour les sprinteurs encore présents. Et c’est seulement à 100 mètres du sommet que Nordhaug et Van Avermaet se sont décidés à sortir du peloton. Pour la forme, car évidemment avec la meute dix mètres derrière, les deux hommes ne pouvaient rien espérer.

Kristoff s’affirme

La descente du Poggio faite par le très bon Nordhaug permet à tout le monde d’arriver en bas sans encombre. Ca ne faisait alors plus aucun doute, Milan-Sanremo allait se jouer au sprint. Les prétendants étaient nombreux, cela faisait des années qu’un groupe aussi conséquent ne s’était pas disputé la victoire. Mais alors qu’on attendait Cavendish et Sagan, voire Cancellara ou Gilbert, c’est un outsider – dont on avait presque oublié la présence tant il a été discret – qui s’est imposé. Alexander Kristoff a profité de l’excellent travail de son coéquipier Luca Paolini pour aligner tout le monde sur le Lungomare Italo Calvino. Canci passait la ligne en deuxième position, pestant contre lui-même. Pourtant, la victoire était loin tant le Norvégien a dominé le sprint. Même Cav’ s’est rassit et a jeté un regard sombre au leader de la Katusha, bien trop fort après presque sept heures de vélo pour qu’on ne vienne lui voler la victoire. Un sacre mérité pour un Kristoff qui voit une ligne prestigieuse s’ajouter à un palmarès jusqu’alors surtout remplit de places d’honneur.

Malgré tout, il est difficile d’apprécier cette victoire comme on le devrait. Le spectacle attendu n’était pas au rendez-vous, et on attend encore, quelques heures après la course, que la magie de la Primavera opère. Mais rien ne se passe. Le vainqueur n’est pas le plus prestigieux possible, mais ce n’est même pas le pire. Cancellara pestait à l’arrivée ? Mais au sprint, on savait très bien que ses chances seraient réduites, alors pourquoi n’a-t-il rien tenté dans le Poggio ? Et tous ces coureurs, qui finissent dans le top 30 sans même avoir disputé le sprint, comme les Français Offredo et Chavanel. Pourquoi ne pas s’être montrés ? Cette édition était sur le papier destinée aux sprinteurs, et c’est comme si même les protagonistes s’y étaient résignés. Avec Le Manie en moins, clairement, Milan-Sanremo perd de sa saveur. Vivement donc l’année prochaine, avec au moins la Pompeiana promise par l’organisation. Parce que ce dimanche là risque de rester longtemps en travers des gorges…

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