Quelques jours avant le départ en Irlande, nous titrions déjà « Kittel et les autres » quand aux issues des quelques sprints massifs de ce Tour d’Italie. Mais quels autres ? Après l’abandon du colosse allemand de Giant, les cartes ont été totalement redistribuées, et le bouillant sprinter français Nacer Bouhanni explose enfin. Deuxième victoire sur le Giro, deuxième sur un grand tour : ses plus belles !

Le nouvel homme à abattre dans la quête du maillot rouge ?

Si c’est le transalpin de la Cannondale Elia Viviani qui s’élançait de Frosinone avec le paletot « rossa » ce matin, il ne faisait aucun doute que la victoire en combattant de Bouhanni sur le toboggan géant de Bari mardi dernier restait ancrée dans toutes les têtes. Dans une situation aux cas de figure de plus en plus ouverts, le tricolore partait avec la faveur des pronostics pour ce que l’on attendait comme le premier vrai sprint massif non tronqué par la pluie ou les chutes, et sans Marcel Kittel. Laissant les Orica et les Giant faire le boulot pour le maillot rose Matthews, pas inquiété de la journée, et Mezgec, la doublure légitime, Bouhanni était alors dans une situation idéale au dernier virage, et ne s’est pas fait prier pour prendre un avantage psychologique désormais certains sur ses rivaux. Le boxeur a une nouvelle fois fait dans son style caractéristique, en s’infiltrant dans un trou de souris entre les balustrades de la droite de la route et Luka Mezgec, lançant le sprint aux 300 mètres. Le talent a fait le reste, et son accélération remarquable a suffi pour contenir un Giacomo Nizzolo débordant plein centre, et un Matthews un peu juste. Un deuxième bouquet, un nouveau grand sourire sur les lèvres de l’enfant terrible du sprint qui a tant fait couler d’encre ces dernières années, et qui semble enfin être reconnu à sa juste valeur par ses pairs.

Toutefois, l’objectif de la victoire d’étape étant désormais doublement atteint dans le clan de la FDJ.fr, le Vosgien a affirmé sans complexe viser le maillot rouge du classement par points. Une tunique qui revient très fréquemment aux grimpeurs et aux hommes forts du général tant le Giro est sacrément généreux en haute montagne, mais qui pourrait sourire à Bouhanni si ce dernier fait le plein, et arrive à contenir son rival annoncé, mais qui ne fait que décevoir depuis Belfast, à savoir Elia Viviani. Vainqueur d’étape au Tour de Turquie devant un Cavendish qui profite du soleil californien, le pistard de formation est pourtant positionné dans les meilleures dispositions à l’occasion des derniers kilomètres, mais ne trouve toujours pas l’ouverture, tout comme Giacomo Nizzolo. Des Italiens en nombre, et un Mezgec déterminé qui voudront la peau d’un fantasque Nacer Bouhanni qui semble avoir retrouvé une confiance inébranlable, en témoigne sa prise de risque sacrément osée mais qui a payé. Comme si rien ne pouvait l’arrêter, ces victoires se positionnent en actes fondateurs pour la suite.

Jamais deux sans trois ?

Quelle suite, justement ? Demain samedi et dimanche, c’est le premier week-end montagneux traditionnel dans les Apennins, avec respectivement un enchaînement Carpegna – Montecopiolo cher à Marco Pantani, puis la montée du Pian del Falco di Sestola. Deux étapes donc synonymes d’économies mesurées pour les sprinteurs, qui retrouveront un terrain favorable à leurs qualités après la journée de repos de lundi. La dixième étape qui emmènera le peloton à Salsomaggiore Terme est un paradis pour hommes rapides, et sera un nouvel instant de vérité pour Bouhanni dans son rêve de maillot distinctif. Ses chances de scorer se comptent en effet sur le doigt de la main, puisqu’une seule étape avant l’entrée dans la terrible dernière semaine semble lui convenir, et l’étape de transition du dernier mercredi semble plutôt destinée aux baroudeurs, sauf si une équipe décide de mettre la main à la patte… Puis, bien sûr, il y aura la parade finale à Trieste. Cet objectif passera donc par la bataille des sprints intermédiaires, mais aussi par une régularité sans faille. Le plus dur est toujours de confirmer, et c’est en partie fait avec cette deuxième victoire en quatre jours, mais attention au réveil de concurrents sonnés et sans doute frustrés par un Giro qui est en train de leur passer sous le nez.

Sans doute d’ailleurs que quelques uns de ces hommes ne termineront pas la course rose, au contraire d’un Bouhanni qui a décidé d’aller au bout. Il serait alors dommage de se faire chiper des points précieux par un coureur n’ayant aucune ambition concernant le maillot rouge… La donne est donc claire, il faudra s’emparer du maximum de points possibles et conforter son statut de nouveau patron d’un Giro qui devait servir à oublier la désillusion de ses deux expériences ratées sur trois semaines en 2013. Il avait buté sur Cavendish, Viviani déjà, Modolo et Mezgec, cette fois, il est en haut de la hiérarchie, et compte bien y rester. Qu’on se le dise, l’adversité est clairement composée de second couteaux derrière le trio magique Kittel – Cavendish – Greipel, et les faits de course ne sont pas pour rien dans les résultats des derniers jours. Mais qu’importe, Bouhanni se doit de saisir les opportunités. Convoité par sept équipes World Tour selon son agent, il est sûr que cette parenthèse dorée ne peut lui faire que du bien. Tous les voyants sont au vert, prenez gare à la fusée Nacer !

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