Alors que sa campagne de classiques s’est terminée ce dimanche sur le vélodrome de Roubaix, Greg van Avermaet en sort forcément déçu, n’ayant toujours pas décroché la grande course qui manque à son palmarès. Troisième du Tour des Flandres et de Paris-Roubaix, le flandrien a ajouté deux nouveaux accessits à sa longue liste. A son plus grand désarroi.

Le Ronde n’a plus de secret pour lui

Grâce à sa polyvalence, van Avermaet a été capable, depuis le début de sa carrière, de briller sur tous les Monuments. Et en dehors du Tour de Lombardie (où il n’a jamais fait mieux que 12e, en 2011), il y a toujours connu le top 10 au moins une fois. Une performance de taille et non négligeable dans ce cyclisme moderne où l’on privilégie la spécification à outrance.

SanremoRondeRoubaixLiègeLombardieMondial
2007/Abandon29e//63e
200852e8e27e//17e
200913e35e38e//44e
201047e39e27e/15e5e
20119e22e/7e12e175e
201269e4e/73e17e24e
201336e7e4e63e19e23e
201425e2e17e//5e
201519e3e3e///

On remarque au premier coup d’œil que Greg van Avermaet enchaîne les bonnes performances sur le Tour des Flandres depuis la saison 2012 et son choix de se focaliser sur les classiques flandriennes. L’illustration de son profil passe-partout, lui qui était plutôt considéré comme un sprinteur au début de sa carrière, puis qui s’était mué en puncheur après son excellent mondial en 2010. Mais il est vite retourné à ses premiers amours en 2012, après l’arrivée de Philippe Gilbert chez BMC conjonguée à la suspension d’Alessandro Ballan.

Ce n’est d’ailleurs pas un hasard si l’ancien coureur de la Lotto est régulièrement aux avant-postes sur le monument flamand, il a toutes les qualités requises pour pouvoir y briller. Il connaît les différents monts par cœur, ses qualités de puncheur lui permettent de passer les hauts pourcentages sans difficultés, il aime prendre l’initiative et possède une bonne pointe de vitesse. Mais à chaque reprise, il lui a manqué un petit quelques choses pour pouvoir l’emporter, en particulier lors des deux dernières éditions. En 2012, il a réussi à régler le sprint de peloton derrière les trois hommes forts de la course : Boonen, Ballan et Pozzato. En 2013, il n’a rien pu faire face à Cancellara malgré son forceps sur le Paterberg. Et l’année dernière, on a longtemps cru qu’il pouvait l’emporter après avoir anticipé les débats avec Vandenbergh. Mais Spartacus l’a cette fois-ci battu dans les 100 derniers mètres. Cette saison, après avoir été un peu court sur le Vieux Quaremont, il s’est échappé du peloton dans le Paterberg en compagnie de Peter Sagan, mais Kristoff et Terpstra avaient déjà une vingtaine seconde d’avance, que le duo ne pourra combler.

Trop naïf au sprint

Depuis 2012, van Avermaet participe à la majorité des semi-classiques du calendrier. Son programme est scindé en deux périodes, les classiques de printemps en mars-avril et celles d’automne en  août-septembre. Voici son historique sur ces deux périodes.

Het NieuwsbladGP E3Gand-WevelgemFlèche brabançonne
2008/3e170e/
20094e28e//
2010108e26e/8e
201130e/13e15e
20125e26e27e5e
20135e24e3e6e
20142e10e28e/
20156e88e36e/

Comme sur le Tour des Flandres, on observe vite les nombreux accessits de van Avemaet sur l’Omloop Het Nieuwsblad, course d’ouverture du calendrier belge. Sortant souvent en forme des courses de préparation au Moyen-Orient, il aime rapidement se mettre en évidence. Il est passé très près de la victoire finale lors de l’édition 2014, mais il s’est fait surprendre par Stannard au sprint et beaucoup lui ont reproché son manque de lucidité dans le dernier kilomètre.

Il faut également souligner sa très bonne performance sur Gand-Wevelgem 2013, battu par un Peter Sagan au-dessus du lot. Quelques semaines plus tard sur la Flèche brabançonne, il n’est pas passé loin de la victoire en sortant dès le pied de la dernière difficulté. Mais contraint de travailler pour Philippe Gilbert, il ne peut pas jouer sa carte personnelle jusqu’au bout.

San SebastianGP QuébecGP MontréalParis-Tours
201011e//16e
20112e//1er
201213e2e14e6e
201318e3e4e48e
20148e5e7e39e

Sur les classiques d’été et de fin de saison, il a régulièrement été à son avantage. Avec moins de leaders présents sur ces courses et des profils appropriés, le coureur de la BMC a souvent fait admirer sa pointe de vitesse et son panache pour accrocher de très bons résultats. Mais comme sur l’Omloop Het Nieuwsblad, il a plusieurs fois échoué au sprint alors que la victoire lui semblait promise. En 2012 sur le GP de Québec, il fut battu dans la dernière ligne droite par Simon Gerrans alors qu’il semblait être le plus fort. Attaquant dans la dernière difficulté à trois kilomètres de l’arrivée, il avait lancé son sprint trop tôt à 200 mètres de la ligne, de peur que Sagan revienne de l’arrière. L’année suivante, il se fit bêtement enfermer dans l’emballage final et termina troisième derrière Robert Gesink, bien plus malin que lui sur le coup.

Outre ces deux déceptions, il régla en 2011 le groupe de chasse sur la Classica San Sebastian, derrière l’ogre Gilbert. Mais sa seule victoire sur une classique de l’ancienne Coupe du Monde demeure son succès sur Paris-Tours en 2011. Après s’être échappé avec Marco Marcato, il avait facilement disposé – enfin ! – de son adversaire au sprint.

Une question de mental et d’opportunités

Van Avermaet a régulièrement pêché mentalement dans ses quêtes de victoires. Entre septembre 2008 et juillet 2011, le Waslandien n’a jamais levé les bras, et ça l’avait longtemps miné, décrocher un bouquet se transformant même en obsession. Ce fût également le cas lors de la saison 2012, qu’il termina sans aucun succès. Cette peur de perdre fut très visible durant de nombreuses saisons et il a eu du mal à s’en défaire. Lors de ses échecs sur le GP de Québec, le Tour des Flandres ou sur l’Omloop Het Nieuwsblad, on a remarqué que cette psychose le tourmentait et l’empêchait d’être lucide dans le final.

A l’inverse, ses récentes victoires sur l’Eneco Tour, le GP de Wallonie et Tirreno-Adriatico lui ont donné confiance et ça s’est ressenti lors des classiques flandriennes, même s’il n’a pas su profiter des absences de Boonen et Cancellara pour lever les bras. Et malheureusement pour lui, à trop gâcher de telles opportunités, il risque de ne plus les voir se présenter. Il lui reste encore les classiques de fin de saison et les championnats du monde, où le parcours pourrait lui convenir, pour concrétiser. Mais à bientôt 30 ans, les portes commencent de plus en plus à se refermer et le spectre d’une carrière à la Björn Leukemans ou Leïf Hoste se profile. Si tel est le cas, ce serait un beau gâchis.

Mehdi Khouch

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