Dimanche, Cadel Evans a terminé cinquième de « sa » course, la Cadel Evans Great Ocean Road Race. C’était la dernière fois qu’il enfourchait son vélo pour une course professionnelle. A presque 38 ans, l’Australien a tiré sa révérence, et après des années de galère, part finalement par la grande porte. Personnage du cyclisme des dernières années, son histoire avec le Tour de France restera comme l’une des plus chargées en émotion.

Un Tour qui se refusait à lui…

Si Evans a commencé à faire parler de lui grâce à ses performances en VTT, c’est très rapidement la route et le Tour de France qui ont accaparé toute son attention. Il découvre l’épreuve en 2005, à l’époque où un Américain termine un règne long de sept ans sur les routes hexagonales. Lui n’est déjà plus un petit jeune puisqu’il a 28 ans, mais il se voit bien être le premier aussie vainqueur de la Grande Boucle. Il lui faudra s’armer de patience. Après avoir disputé un Giro et deux Vuelta, sa découverte de la plus grande course du monde n’est pas aisée, mais celui qui mène alors l’équipe Davitamon-Lotto apprend au milieu des outsiders, et termine huitième, à moins de deux minutes de la quatrième place. Le signe, déjà, qu’avec quelques années supplémentaires, le natif de Katherine pourrait viser très haut. Le Tour 2006 ira dans ce sens, avant une première grosse désillusion, en 2007.

Rasmussen viré, Alberto Contador hérite du maillot jaune. L’Espagnol est encore un gamin et l’Australien, son dauphin au général, a toutes les chances de récupérer le paletot de leader sur le contre-la-montre final vers Angoulême. Il n’en sera rien. Pour 23 secondes, Evans s’incline. Il monte pour la première fois sur le podium de l’épreuve, mais à 30 ans, vient de laisser passer une chance dont on ignore si elle se représentera. D’autant que l’édition suivante est encore plus cruelle : maillot jaune durant cinq jours, le protégé de Marc Sergeant le cède à l’aube de la dernière semaine, mais parvient à rester dans la course au général. Résultat, à la veille de l’arrivée, il semble évident qu’il ne va faire qu’une bouchée de Sastre sur le dernier chrono. Sauf qu’il ne reprend même pas 30 secondes au coureur de la CSC, et doit se contenter d’une nouvelle deuxième place. Comme si la malchance s’acharnait.

…avant qu’il ne force son destin !

A l’époque, il paraît clair que l’Australien n’aura plus de telle opportunité pour remporter le Tour de France. Hors de forme en 2009, victime d’une chute en 2010, Evans se rattrape sur d’autres épreuves, devenant champion du monde à Mendrisio avant de remporter quelques mois plus tard la Flèche wallonne. La trentaine bien sonnée, l’homme change un peu de philosophie et daigne désormais lever le cul de sa selle. Il faut pour cela le pousser dans ses derniers retranchements, mais il sait désormais que sans prendre d’initiative, il ne peut remporter les plus belles épreuves du calendrier, et notamment le Tour. Après un début de saison 2011 tout bonnement parfait, il se pointe au départ de Vendée avec la ferme intention de monter sur la plus haute marche du podium à Paris. Méticuleux dans sa préparation et tactiquement au point durant les trois semaines d’épreuve, il y parviendra. Sans se renier, mais en évoluant.

Alors qu’Andy Schleck tente un baroud d’honneur dans les Alpes, Evans prend les choses en main pour maintenir un écart raisonnable. Personne ne souhaite l’aider, et s’il n’avait pas bougé, le Luxembourgeois aurait sans doute gagné le Tour. Mais celui qui court alors chez BMC refuse de connaître à nouveau un tel échec. Autour de Grenoble, pour le traditionnel contre-la-montre à la veille de l’arrivée, il parvient à faire ce qu’il avait manqué en 2007 et 2008 : reprendre le maillot jaune au leader. A 34 ans, il vient de réaliser la course parfaite, et s’inscrit enfin dans la légende : plus vieux vainqueur de la Grande Boucle après Firmin Lambot, il est surtout le premier Australien sacré sur les Champs-Elysées. Depuis, le garçon n’a plus été en mesure de briller autant qu’en ce mois de juillet 2011. La faute au poids des années, et peut-être aussi à la difficulté de se remotiver après avoir atteint le Graal. Mais personne ne lui en veut, et tout le monde du cyclisme, aujourd’hui, salue le départ d’un grand champion.

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